Mes Mémoires d’Autan sont des miscellanées poétiques entremêlées de réflexions autour de l’être-soi d’un Sud-Ouest baigné par l’Atlantique et Mare nostrum, illuminé par nos campagnes gorgées de tournesols, et bien sûr surtout, pour moi, toulousain et tarnais ; alternances de nouvelles, d’essais et de poèmes en ancrage de cette terre d’Oc qui m’est chère, ces textes vivent au gré des méandres de Garonne et de l’Histoire ancienne ou contemporaine de la Ville Rose et du Grand-Sud…
Lorsqu’aux temps d’autrefois nous allions à la messe, Nos gros sabots aux pieds et le cœur à confesse, Nous savions qu’en rentrant, les joues rosies de froid, L’enfançon sourirait en sa crèche de bois.
Mais non, n’importe quoi ! Le divan explosait… Un sous-pull à paillettes, et un sac au crochet ! Et puis l’électrophone, et un jean peau de pêche ! L’intégrale de Troyat, des vinyles de Delpech…
En pantalon pattes d’eph’, dans son costume orange, Petit frère plongeait dans ses tas de légos. Le sapin débordait sous de lourds cheveux d’ange,
A la télé heureuse nous admirions Clo-Clo. Qu’ils étaient innocents, nos Noëls seventies, Gouleyants de cadeaux en ces temps d’avant Crise.
Aphorismes…
Noël…
Comme une aube mariée au crépuscule de l’année.
Oublier les nuits tombées sur notre monde vacillant sous les folies des hommes. Inspirer cette paix. Oser aimer.
Sourire aux inconnus et pardonner à son ennemi.
Entourer ses soucis de bolduc, décorer le malheur de mille cheveux d’ange, faire de chaque tristesse une boule de verre coloré.
S’aimer enfin. Se souvenir de nos sourires d’antan, aimer l’enfant qui veille en nous, comprendre l’adolescent en révolte et ses noirceurs devenues scories de l’usure des temps.
Imaginer le printemps, murmurer l’espérance, bénir le jour.
Voir l’étoile des bergers, bercer le divin contre son cœur.
Tu ES Dieu. Et NOUS sommes HUMAINS, ensemble.
Sonnet anticapitaliste
Qu’ils se gorgent de bile, tous ces bourgeois frileux !
Qu’ils étouffent de fiel en leurs habits de fête
Étranglés de bolduc en sanglantes paillettes :
Leur noël mascarades offensant tous les gueux !
*
Qui est-il, ce Jésus, pour ordonner bombances
Quand l’univers entier hurle révolution ?
Comment peut-on encore prêter dévotion
À ce charpentier fou générant tant d’outrances ?
*
Tout prélat est immonde et tout autel amer,
Nul besoin d’honorer et le fils et le père
Au triste anniversaire devenu une orgie
*
Où le capitalisme, tel un ogre affamé
Dévorant innocences en prétextant aimer,
Assassine les hommes d’un argent qui mugit !
Poésie contemporaine
Nocturne,
le souffle avisé des bêtes.
Le silence grelotte et la
paille gémit.
Guidés par l’étoile,
ils arriveront pour voir
sourire celui que l’on nommera
Dieu.
À la manière de …
Marcel Proust
Lorsque tante Léonie arrivait de la messe, je la guettais toujours, respirant avidement le parfum de cet encens entêtant me rappelant les longues heures passées à regarder, m’ennuyant entre deux sermons lénifiants et cantiques, le plafond et les anges de la petite chapelle du village voisin, me demandant si elle aurait peut-être croisé, en chemin, Swann qui devait justement arriver de la Capitale en cette veille de noël et si il ne lui aurait pas déjà glissé quelque anecdote savoureuse toute dorée des fastes de la ville lumière, avide que j’étais de connaître ce monde dont chaque étincelle illuminait mon quotidien d’enfant timide, et je ne manquais pas, délestant ma tante de son missel tout ourlé de cuir, tandis que notre bonne s’empressait de la délivrer de sa mantille et de son châle, de la câliner par d’innocentes questions, tentant de percer à jour le mystère de ses rencontres de parvis, et, alors que toute la maisonnée s’activait déjà dans les préparatifs de la veillée de noël, je n’avais de cesse de vouloir que tante ne me parle de Swann qui me paraissait, ce soir-là, tout aussi auréolé de gloire que le Roi dont nous fêterions bientôt l’avènement.
Georges Perec
Houx purpurins sous gui flamboyant : chantant un christmas carol, nous faisons fi du bruit, riant, jouant, ravis ! Christ surgit, un 24, à minuit !
Serge Pey
Frappe frappe frappe le sol
de ton bâton
Sois berger sois Roi-Mage sois la Vierge sois le Christ
tu es homme il est dieu
il est homme tu es dieu
sois lumière sois le feu sois l’étoile sois la paix sois noël sois le ciel
Frappe frappe frappe le sol
de ton bâton
Sois enfant sois jeune fille sois femme sois vieillard sois vivant
tu es la myrrhe il est l’encens
il est venu tu es présent
sois l’hostie sois le pain sois la vigne sois le vin
Poésie libre
Il est venu le doux temps de l’Avent
Humez frissons oyez clochettes
Joues cramoisies des petits enfants
Soleil timide tapi en sa cachette
Il est venu le doux temps du sapin
Piqué au vif par mille boules mises
Au gré des rires de tant de beaux lutins
Tout juste descendus de leur blanche banquise
Il est venu le doux temps des bougies
Lumignons vacillants à fenêtre embuée
Que la lumière soit en nos cœurs assagis
Et que nos mains tendues soient fête partagée
Il est venu le doux temps des parfums
Vin chaud cannelle sombre cardamone et gingembre
Mon marché de Noël ma maison aux embruns
Le pain d’épice aura sa belle couleur d’ambre
Il est venu le doux temps des vœux
Cartes anglaises dentelées étoiles scintillantes
Ressortons nos stylos faisons pause un peu
Amis perdus ou très chers retrouvons les ententes
Il est venu le doux temps des cantiques
Chérubins carillons angelots glorifiés
Lançons Alléluias dans toutes les boutiques
Écouter Sinatra c’est le jazz sanctifié
Il est venu le doux temps des Rois Mages
Et puis le Père Noël et le Saint-Nicolas
Rudolf le petit renne sage comme une image
C’est l’anniversaire du p’tit Jésus et ils seront tous là
Aline Korenbajzer, déportée et assassinée à Auschwitz-Birkenau, le 31 août 1942, le jour de ses 3 ans
Ne pas oublier
barbaries indicibles.
Garder la lumière.
忘れないで
言葉にならない野蛮人。
光を保ちなさい。
Wasurenaide
Kotoba ni naranai yaban hito.
Hikari o tamochi nasai.
Unsere irdischen Sterne
Brot Wort und
Umarmung
***
Nos étoiles terrestres
pain parole et
embrassement
Rose Ausländer
Ce sont les grands
marronniers qui lui manquent le plus. Elle se souvient de leurs fleurs
majestueuses piquant en corolles vers les pâquerettes, puis du vert flamboyant
de leur canopée, et enfin des dizaines de marrons polis et brillants qu’elle glissait,
émerveillée, dans ses poches.
Rachel l’amenait au parc
presque tous les soirs, malgré sa fatigue quand elle avait œuvré à la machine de
longues heures durant dans la pénombre de l’atelier de Monsieur Rosenstein.
Elle revenait toujours avec une part de roulé au pavot ou de strudel à la
cannelle, et Sarah sautillait ensuite à ses côtés en dégustant son goûter et en
racontant sa journée. Ces derniers temps, il se passait de drôles de choses, des
élèves disparaissaient, et la maîtresse, Mademoiselle Sylberberg, avait appris
aux enfants comment fuir par la porte arrière de la classe, au cas où, comme
elle disait…
Sarah et Rachel saluaient des dizaines de voisines, on parlait du temps, et on se demandait des nouvelles en chuchotant pour ne pas que les enfants entendent… En arrivant au Burggarten, Sarah commençait toujours par admirer la gracieuse statue de Mozart, en demandant à sa mère quand elle pourrait enfin avoir un violon pour jouer comme l’oncle David. Puis elle entraînait Rachel vers les imposantes serres qui se dressaient juste sous le musée de l’Albertina, immenses vaisseaux emplis de palmiers et de cactus comme un jardin de paradis.
Max Liebermann, « Die Gartenbank » (Le banc de jardin)
En cette heure vespérale, l’étrange lactescence des cieux viennois s’illuminait souvent d’un dernier bleu presque indigo, juste avant les éblouissements crépusculaires. Les merles s’interpelaient d’un arbre à l’autre, le gazon verdoyait en été et blanchissait en hiver, on poursuivait des cerceaux et, cachés par les douces frondaisons, on jouait ensemble, sans se préoccuper de qui portait l’étoile…
Sarah grelotte, malgré la
couverture pouilleuse jetée sur sa paillasse. Elle sourit néanmoins de toute
son âme lorsque Rachel titube vers elle et la soulève délicatement en lui
murmurant qu’elles vont enfin pouvoir aller prendre une douche. La jeune femme
se dirige vers l’extrémité du camp, ombre parmi les ombres, frissonnant dans la
bise qui au loin agite les grands bouleaux blancs, tandis que, perchées sur les
branches dénudés des hêtres, des corneilles croassent de l’autre côté des
barbelés.
Le soir est tombé, une
douce lumière céruléenne baigne leur enfer de bruit et de fureur et illumine
les fumées noires et âcres. Rachel chantonne une berceuse en yiddish, elle
répète à Sarah qu’elle l’aime jusqu’aux étoiles du ciel, qu’elle reviendront
bientôt courir dans les allées du Burggarten, qu’elle iront manger une glace
sur les bords du canal du Danube et qu’elles reverront l’oncle David, grand-père
Moshé et surtout papa, le beau Chaïm, qui est sûrement en train de construire
la maison de poupées que Sarah se souhaite pour Hanukkah.
La porte blindée s’ouvre sur un carrelage bleuté. Rachel embrasse sa fille et lui sourit, encore et toujours.
J’ai maintenu ma vie, en chuchotant dans l’infini silence…
Georges Séféris
Il n’est point de terre plus douce que sa propre patrie.
Homère ; L’Odyssée
‘Le 2 octobre la veille de l’incendie, ils couraient vers moi lançant leur cartable par-dessus leur tête……..
J’ai pris une photo ce jour-là. Elle est là, devant moi .Le lendemain,il n’y avait plus rien de ma vie : ma femme et mes enfants étaient morts ; au-dessus du Tanneron s’effilochait une fumée noire. Je n’avais pas vu de flammes si hautes depuis le temps où brûlait le ghetto de Varsovie.
Alors aussi j’étais resté seul : de ma vie, alors aussi, il n’y avait plus rien, que moi vivant.
J’étais sorti des champs de ruines, j’étais sorti des égouts, j’étais sorti de Treblinka et tous les miens avaient disparus. Mais j’avais vingt ans, une arme au poing, les forêts de Pologne étaient profondes et ma haine comme un ressort me poussait jour après jour à vivre pour tuer.
Puis pour moi, après la solitude, semblait venu le temps de la paix : ma femme, mes enfants.
Et oui cet incendie, le Tanneron en flammes, le crépitement du feu, cette odeur et la chaleur comme à Varsovie. Et on m’a tout repris, tout ce qu’on avait semblé me donner : ma femme, mes enfants, ma vie. Une deuxième fois il ne reste que moi vivant.’
Martin Gray, Au nom de tous les miens
Ce roman m’a terrifiée lorsque j’étais enfant.
Les images venues de Grèce sont atroces. L’idée de ces gens morts enlacés, comme à Pompéi, est insupportable.
Il ne peut rester que la poésie et la musique.
Pour qu’un jour la vie continue…
Nous avons beau avoir brisé leurs statues, nous avons beau les avoir chassés de leurs temples, les dieux n’en sont pas morts le moins du monde. Ô terre d’Ionie, c’est toi qu’ils aiment encore, de toi leurs âmes se souviennent encore. Lorsque sur toi se lève un matin du mois d’août, une vie venue d’eux passe en ton atmosphère ; une forme adolescente, parfois, aérienne, indécise, au pas vif, passe au-dessus de tes collines.
Quand les mots tombent sur le corps de la nuit On dirait des vaisseaux qui labourent les mers Les hommes à bord semant et les femmes parlant Parmi les baisers qui claquent Des lézards passent dans les frissons des crêtes D’une mer qui s’étend jusqu’au sable Avec ressacs et clapotis Peu avant que le soleil se lève quand résonnent Les voix des rhapsodes de la matière Et les clameurs d’un coq debout Sur une colonne de sel des contrées du midi Quand gonflent les désirs des multitudes sur le rivage Qui s’avancent dans les rafales du vent Sous les yeux des filles bienheureuses Penchées les seins touchant l’onde L’eau pure des ruisseaux Jusqu’à sentir dans leur corps et leur âme Sans conditions et sans limites La montée acquise du plaisir.
(Extrait)
Andrèas Embirìkos , “Ce jour d’hui comme hier et demain”
***
…Le printemps est insoluble. Comment apprendre la flamme à la goutte ? L’angoisse transcende la vie rendant ainsi les plaisirs inutiles. Ah, quel trou de ténèbres où naguère tenant sur ma tête un coq pour affoler la nuit j’ai hurlé soudain comme si l’on m’avait planté une balle : — Un rosier au clair de lune ! Horreur, les secondes le dévorent ! Comment conserver le daimon intact ? Mais si l’on ne peut — alors suffit, je pense pour un bout de bénédiction, de guérison peut-être ce chien rêveux, ce typhus gris… Ave César ! Mes yeux sont des trouvailles de la mort.
Ce soir est comme un rêve qui nous grise ; ce soir le val est un lieu enchanté. Dans le pré vert que la pluie a quitté, lasse, la jeune fille s’est assise. Ses lèvres s’ouvrent, on dirait deux cerises ; profond, son souffle plein de volupté fait sur son sein doucement palpiter une rose d’avril, la plus exquise. Quelques rayons échappés aux nuées hantent ses yeux ; un citronnier sur elle a fait tomber deux gouttes de rosée qui sur ses joues font deux diamants vermeils et l’on croirait qu’une larme étincelle tandis qu’elle sourit face au soleil.
Matin et toutes choses au monde posées à la distance idéale du duel. On a choisi les armes, toujours les mêmes, tes besoins, mes besoins. Celui qui devait compter un, deux, trois, feu était en retard, en attendant qu’il vienne assis sur le même bonjour nous avons regardé la nature. La campagne en pleine puberté, la verdure se dévergondait. Loin des villes Juin poussait des cris de sauvagerie triomphante. Il sautait s’accrochant de branche d’arbre et de sensations en branche d’arbre et de sensations, Tarzan de court métrage pourchassant des fauves invisibles dans la petite jungle d’une histoire. La forêt promettait des oiseaux et des serpents. Abondance venimeuse de contraires. La lumière tombait catapulte sur tout ce qui n’était pas lumière, et la splendeur érotomane dans sa fureur embrassait même ce qui n’était pas l’amour, et jusqu’à ton air morose. Dans la petite église personne à part son nom pompeux, Libératrice. Un Christ affairé comptait avec une passion d’avare ses richesses : clous et épines. Normal qu’il n’ait pas entendu les coups de feu.
Pas sur Dieu ni les saints ni les rois affairés , Pas non plus sur l’amour autrement qu’il se doit , Je n’écrirai de vers , et je m’excuserai : Poète assis , comptant les sujets sur ses doigts . Je fleurirai le monde et les cours fastueuses , Les femmes , les ronds-points , les sentiments , les villes , Et ne salirai plus les traditions tueuses : Ni la foi ni l’argent ni leurs maisons serviles . Je dormirai , bien sûr , d’un sommeil éthylique Souffrant ce cauchemar par la voie symbolique …. Puis rirai au réveil de cette mascarade . Car jamais , non jamais , je ne renoncerai , A versifier sans frein ni collier mes tirades . Non par droit mais devoir , je nous blasphémerai .
Il est temps que je parte. Je connais un pin qui se penche sur la mer. À midi, il offre au corps fatigué une ombre mesurée comme notre vie, et le soir, à travers ses aiguilles, le vent entonne un chant étrange comme des âmes qui auraient aboli la mort à l’instant de redevenir peau et lèvres. Une fois, j’ai veillé toute la nuit sous cet arbre. À l’aube, j’étais neuf comme si je venais d’être taillé dans la carrière. Si seulement l’on pouvait vivre ainsi ! Peu importe…
***
Encore un peu
Et nous verrons les amandiers fleurir
Les marbres briller au soleil
La mer, les vagues qui déferlent.
Encore un peu
Élevons-nous un peu plus haut.
***
Donne-moi tes mains, donne-moi tes mains, donne-moi tes mains.
dans la nuit j’ai vu
la cime aiguë de la montagne,
regardant par-delà la plaine inondée
avec la clarté de la lune invisible,
en tournant la tête, j’ai vu
des pierres noires recroquevillées,
et ma vie comme une corde tendue
début et fin,
Moment final
mes mains.
Celui coulera qui soulève de grandes pierres
ces pierres je les ai soulevées tant que j’ai pu
ces pierres je les ai aimés tant que j’ai pu
ces pierres, mon destin.
Blessé par ma propre terre
torturé par ma propre tunique
condamné par mes propres dieux,
Ces pierres.
Je sais qu’ils ne savent pas, mais moi qui tant de fois ai suivi
le chemin qui va de l’assassin à la victime
de la victime au châtiment
du châtiment au prochain meurtre,
À tâtons
dans l’inépuisable pourpre
la nuit de ce retour
Quand les Erinnyes ont commencé à siffler
Parmi l’herbe maigre
J’ai vu des serpents mêlés avec des vipères
noués sur la génération maudite
Notre destin.
Voix jaillies de la pierre de sommeil
plus profondes ici où le monde s’assombrit.
mémoire du labeur ancré dans le rythme
frappé sur la terre par les pieds oubliés
Corps coulés dans les fondations
de l’autre fois, nus.
Yeux, yeux
fixés sur un point
que tu ne peux lire, comme tu le voudrais :
l’âme
qui se bat pour devenir ton âme
maintenant même le silence n’est plus à toi
ici où les meules ont cessé de tourner.
***
…On nous disait, vous vaincrez quand vous vous soumettrez.
Nous nous sommes soumis et nous avons trouvé la cendre.
On nous disait, vous vaincrez quand vous aurez aimé.
Nous avons aimé et nous avons trouvé la cendre.
On nous disait, vous vaincrez quand vous aurez abandonné votre vie.
Nous avons abandonné notre vie et nous avons trouvé la cendre.
Nous avons trouvé la cendre.
Il ne nous reste plus qu’à retrouver notre vie maintenant que nous n’avons plus rien.
O malheureux Ajax, qu’as-tu été, et qu’es-tu à cette heure ? C’est au point que tu mérites les pleurs de tes ennemis mêmes.
Parfois, on se sent un peu infantilisé par cette « grosse mamelle tiède de l’éducation nationale » – citation que je dois à Denis Fontaine, professeur d’art plastique et artiste-, et on a envie de dépasser un peu ce monde qui est souvent le seul que l’on a connu, d’un statut d’élève à celui de professeur, après le bref passage à la case étudiante…
C’est aussi en ce sens que j’ai commencé à écrire, un soir d’avril 2008, le 30, plus précisément, en trébuchant sur les mots d’un poète amazigh sur un site de partage de poésie :
Poésie,poète et lecteur( dédié à Abdeslam Nassef )
Dédié à Abdeslam Nassef
Il y a poésie et poésie. Tout ce qui s’écrit et qui prétend être poésie ; n’est pas du tout poésie. La poésie est un besoin quotidien comme l’air ; c’est le pain spirituel du poète. Le poète écrit tout d’abord pour son plaisir. Tout poète qui écrit a une intention et il n’existe pas de création neutre ou d’écriture blanche et innocente. Le poète ne peut pas plaire à tout le monde. Le poète est un vieil enfant qui s’arme de mots pour casser le nez à ses aînés. Le poète est un révolté contre l’ordre établi. Le poète est engagé pour des causes sociales ou politiques. Le poète peut être mystique ou profane, romantique ou réaliste, surréaliste ou symboliste, imprécateur ou lèche-bottes, enfant chéri sous la tutelle paternelle politique et sociale ou enfant espiègle trouble-fête. Le poète peut être inclassable, hermétique, simpliste, fade, meneur de foules ou tout simplement prophétique. Le poète peut être nul ou talentueux. Le poète est toujours un être humain qui ne pourrait aucunement traiter des thématiques inconnues à ses semblables. Le poète doit être conscient de sa sensibilité, de sa motricité, de sa vocation, de sa signature, de ses limites, du respect de ses lecteurs et du devenir de sa création.
Au café au sein de la cacophonie, je me fraie mon destin de poète. Tel un prédateur, je guette les mots (la langue est un gibier rare et très prisé) au lieu de prêter oreille fine à la médiocrité lot des mentalités restreintes ; je leur tends mes pièges ; je veille à ce que l’appât soit attrayant et le piège bien camouflé et quand le mots mord dans l’appât ,il est sans faille pris dans le piège tendu de mains expertes. (…)
Le poème une fois composé et à la portée du lecteur ; c’est son destin d’être lu et commenté, apprécié ou déprécié par le lectorat. Les jugements catégoriques, les lacunes de lecture à la va-vite, l’acharnement à toujours vouloir coûte que coûte émettre un commentaire de la part du lecteur pourrait nuire au poème et au poète. C’est une passion que de lire un poème; c’est tout un plaisir et un art de que lire un poème. Si le lecteur au lieu d’émettre aveuglément et avec une ignorance évidente des commentaires blessants ou dénigrants, mieux vaudrait ne rien dire. Si le lecteur ignore comment apprécier un poème, ce n’est pas la faute à l’auteur ni à personne de même. La compréhension exige l’attention et l’intérêt. Le poète a son monde intérieur qu’il dévoile à peine car tellement jaloux de cette magie-là qu’il possède. Le poème est comme un enfant dont le poète a peur qu’il soit maltraité par le lecteur. Le poème qui mérite la survie survivra malgré tout. Le poète qui est reconnu l’est car il est véridiquement poète ; le vrai poète méconnu et mal compris sera ultérieurement reconnu. La beauté, la bonté, la sagesse, la générosité demeurent des vertus qui ne meurent.
Amitiés
Farid . »
30/4/2008 23:21
Plume d’or
Inscrit le: 30/4/2008
De: Neiges sud sapins lumières
Envois: 1148
Re: Poésie,poète et lecteur( dédié à Abdeslam Nassef )
Farid,
Au détour d’une douce et solitaire soirée en terre gasconne, j’ai trébuché sur ce site et me suis pris l’âme dans vos mots, d’une infinie sagesse, d’un beau réconfort.
Merci pour ce message d’outre-mare nostrum, aussi précis qu’un mirage qui se profile au détour d’une dune, muvant et ferme, défintivement vrai.
Je vous offre « ma »poétesse ce soir, celle à qui j’ai dédié un petit travail universitaire, « Rose Ausländer, une poétesse juive en sursis d’espérance ».
Puisse ses mots venir vous trouvez, sinon, je vous la traduirai.
Salam,
Sabine.
Oh, bien sûr, j’avais déjà balbutié quelques textes auparavant, rédigé mon mémoire de DEA sur la poésie de Rose Ausländer en 2005, et puis surtout commis année après année d’indigestes dissertations d’agreg au fil de mes tentatives de passages de concours -concours que je travaillais pas, d’ailleurs souvent, je ne lisais même pas les œuvres…Mon texte sur notre maison de campagne, « Les Rochers du Moulin du Roy », avait été publié dans la Revue du Tarn ; j’avais ébauché quelques textes pour un concours de nouvelles de… Marie-Claire !
Et un jour, étrangement, d’un seul coup d’un seul, le 30 avril, j’ai compris qu’il était temps de renouer avec le vœu pieux formulé dès l’âge de huit ans, quand j’avais écrit dans une rédaction que je voulais écrire, comme Andersen. C’est vraiment grâce à ce petit électrochoc de la rencontre littéraire, sur les pages d’expression de ce site, que je me suis soudain souvenue de la dizaine de cahiers que mon amie Marie-Claude et moi-même noircissions, sur les bancs du lycée…La poésie…Celle que nous avions découverte dans les cours de notre cher Monsieur Crostes, que nous déclamions, cheveux au vent, sur les rives du lac de la Borde-Basse, dévorant Rimbaud, Baudelaire, Eluard…Avant de coucher nous-mêmes nos émotions sur ces petits mots échangés en cours de maths (« petit mot », explication à l’intention des jeunes lecteurs : SMS écrit sur un bout de papier et passé de la main à la main dans une salle…) et dans nos cahiers…
C’est ainsi que je m’inscrivis sur « Oasis ». Sur ce site, je devins Rosam, puis Scarlett, puis Louandrea. C’est là aussi que je découvris les « réseaux sociaux », peu de temps avant Facebook (« Delechat », un poète d’Oasis et peintre, alias le talentueux Tony Sossi, devint d’ailleurs mon premier « ami Facebook » !), les joies des discussions en ligne, au gré des amitiés avec des poètes de tous les pays…
Car sur Oasis se retrouvent aussi de nombreux poètes du Maghreb. J’ai l’honneur de fréquenter depuis dix ans maintenant deux poètes marocains de grand talent, Farid et Mostafa, qui sont mes frères en littérature et en humanité. Même si nous ne nous sommes jamais rencontrés, j’ai un immense respect envers leur talent et nourris une réelle affection pour ces poètes ! J’ai d’ailleurs eu la joie de préfacer le dernier livre de Mostafa Houmir, dont les cartes postales ornent mon bureau…
Si j’ai pris différents « pseudos » pour écrire sur Oasis, c’est que… j’ai parfois pris part à quelques discussions houleuses, et ai été « bannie »… J’en souris aujourd’hui, mais Oasis est une grande famille, et, comme dans toute famille qui se respecte, il y a parfois des pleurs et des grincements de dents… Quoiqu’il en soit, même si j’ai bien peu le temps de participer à ce forum aujourd’hui, en raison d’obligations diverses, et même si les textes qu’on y trouve ne sont pas toujours du niveau de « la Blanche » de Gallimard, la poésie y est VIVANTE. Et à quelques encablures de la fin du Printemps des poètes et juste avant le Marché de la poésie, je voudrais insister sur cette parole poétique plurielle qui fleurit sur internet et qui est trop souvent oubliée et décriée.
Quelle désolation, en France, que ces querelles de clocher autour d’un art minoré de force, avec d’une part ces « concours de poésie «-vaches à lait des organisateurs qui parfois réclament des sommes folles et offrent ensuite trois poussières de livres et des « médailles », comme à des généraux-poètes-, et où l’on exige de surcroît souvent de la « poésie classique », et d’autre part les grandes maisons qui paradoxalement ne publient que l’épure de la modernité, loin de tout classicisme.
Car un bon poète est un poète « mort », ou alors un poète dont de rares mots, jetés sur page blanche comme neige fragile, nous interpellent faiblement, derniers mohicans d’un art compassé, qui se murmure en alcôves de mots, ou qui se beugle, lorsque les dits poètes se piquent de hurler leur modernité en festivals de rues, nouveaux baladins, faisant du poème un gueuloir…Et il est bien difficile d’oser se « dire poète » (mais je le fais…) si l’on n’est ni un chantre de la poésie moderne si « minimaliste » et surtout sans rires, sans vers (le vers, c’est péché…), souvent sans musicalité, ni un « bruissonnant » , s’époumonant au gré de scènes ouvertes dans d’étranges variations vocales…
Au milieu de ces assourdissants silences, circulant presque sous le manteau, se vendent les « revues », caviar intellectuel circulant parmi une élite d’initiés… Pour « en être », bien sûr, il faut se plier aux carcans de la modernité, car l’alexandrin en est banni, le sonnet chassé, et la rime exilée.
Mais tout autour, loin des places fortes -et souvent un peu élitistes, parisiennes, boboïsées…- que sont les manifestations publiques dédiées, se pressent donc ces milliers d’internautes poètes et/ou amoureux de la poésie, décriés par certains, car dépeints comme maladroits, et parfois méprisés, car traités ouvertement, sur d’autres forums ou dans des essais, d’incultes…Alors que leurs mots sont merveilles vives, cristaux de vérité, pépites parfois…
Car la poésie VIVANTE, c’est aussi la leur…Et je tenais ce soir à remercier l’équipe des créateurs et modérateurs de m’avoir accueillie en ce lieu qui m’a…donné des ailes…
Merci aussi infiniment à mon amie Geneviève, qui a créé tout au long de ces années de magnifiques mises en pages à mes textes et m’a toujours été un précieux soutien…
Et bien sûr à Adeline, créatrice du site.
Tout naturellement, un jour, je suis redevenue « Sabine Aussenac ». L’écriture m’avait beaucoup aidé, d’ailleurs, durant de longues et sombres années où, suite à un divorce international et aux escroqueries de mon ex époux, je m’étais retrouvée confrontée à une descente aux enfers, subissant un surendettement et une lourde paupérisation. Il n’a plus jamais été question de me taire, vis-à-vis de quiconque.
26/12/2009
Quand on connaît Voltaire on ne peut plus tomber
On m’a dit de me taire et je me suis levée :
Quand on connaît Voltaire on ne peut plus tomber ;
Quand on meurt seul à terre en pays dépeuplé,
En songeant à naguère et aux vents déployés.
On m’a dit de partir, alors j’ai insisté ;
Tous ces mots à franchir, et Verlaine qui pleurait…
Mon cœur git en déroute, éternel vagabond :
Un métèque qui doute, sans logis et sans nom.
On m’a dit de l’attendre, alors j’ai patienté.
Quand on aime on est tendre : Othello le sentait.
Ophélie sans ses voiles, en apnée des soleils,
Orpheline ou marquise :je bois l’eau des merveilles,
Mais demeure insoumise aux apprentis tyrans.
Balafrée en mon âme je provoque à tous vents.
Voilà, la boucle est bouclée : il est des choses qui perdurent, de l’enfance à la mort, quand on sent qu’on doit aimer cet enfant qui veille en nous et qui, déjà, devinait nos routes. Mon écriture a grandi, s’est déployée différemment ; j’ai remporté de nombreux concours de poésie, mais surtout de nouvelles, j’ai écrit deux romans, (Jim, si tu me lis…), je « blogue », couvre des festivals… La poésie m’arrive aussi parfois en allemand (j’ai remporté le prix de poésie de Hildesheim) et en occitan…
Et j’aimerais qu’elle aussi prenne une place essentielle dans la société, qu’elle ne soit pas cantonnée à un seul « Printemps des poètes » de quelques semaines, ou à un seul « Marché » parisien… Puisque mon ministre a décidé de « revenir aux fondamentaux », je souhaiterais aussi que les enfants aient la possibilité d’apprendre à nouveau des poèmes par cœur, de découvrir, au fil de leur scolarité, les auteurs, leur lecture et leur déclamation…
Internet, vous le voyez, est merveilleux. Bien utilisé, il nous permet de superbes voyages et des échanges passionnés. La poésie y est vivante, sachons la débusquer, la partager. Je salue ici tous les auteurs de notre « Oasis » qui m’a été terre adoptive. Et bien sûr les merveilleux poètes que j’ai aussi eu l’occasion de croiser sur d’autres réseaux sociaux, que je lis avec un infini plaisir. Certains, reconnus et édités, parcourent le monde et lisent leurs textes au Festival de poésie de Sète, d’autres font simplement le bonheur de leurs lecteurs, sur la toile ou ailleurs… Salah Stétié, Khal Torabully, José Le Moigne, Volker C. Jacoby, Jacques Viallebesset, Suzanne Dracius, Éric Dubois,, Martine Biard, François Teyssandier, Xavier Lainé, Evelyne Charasse, Mohamed El Jerroudi, Robert Notenboom, Élaine Audet… je vous embrasse !
Pour terminer, je souhaite vous offrir les mots d’une merveilleuse poétesse iranienne dont le fils, Hossein, un ami, avait traduit en persan « ma » poétesse de la Shoah, Rose Ausländer.
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PS : Bon anniversaire, chère Marie-Claude, enfant du premier mai et des libertés…
06/08/78…
« Le ciel Une maison bleue Un champ de blé Des fleurs Une fille Une guitare Des enfants Des gens Elle parle quatre langues A étudié Hölderlin et Dante C’est sa maison Perdue au milieu des bois C’est sa vie Souvent entourée d’amis Manger son pain Pétri à la main Et les fruits de son verger Soleil Bonheur A travers chaque sourire On offre son cœur Plus de rancœur Culture intelligence Mais plus de concurrence Seulement amour et paix Peut-être à jamais. »
Amis toulousains et d’ailleurs, venez partager des poèmes dans le kiosque de la Place Pinel à l’acoustique unique au monde!
Apportez vos textes, je lirai les miens, vous direz les vôtres, ce sera le Printemps de Pinel!
Contact:
Inspiré par le thème du Printemps des Poètes 2018, l’Ardeur…
Quand l’Ardeur devient folle au renouveau de mars…
Quand l’Ardeur devient folle au renouveau de mars, Elle rayonne en nos villes en une immense farce, Fait des nuits des soleils, des étoiles des jours, Et en cent poésies elle déclame l’Amour.
Quand l’Ardeur se réveille, primevère en rosée, Après tous ces hivers qui nous laissent agacés, Elle transcende joyeuse les fusils et les peines, Nos envies hirondelles s’y élancent en vraies reines.
Quand l’Ardeur se réveille, au Printemps des Poètes, On entend des clameurs, des youyous, des silences… C’est la mer qui déferle en nos pavés offerts,
C’est la neige qui fond, de New-York à la Mecque, Et tant de mots qui crient qui résonnent et qui dansent Que les Hommes enfin se regardent en frères.
PS: une alternative au kiosque sera aussi d’écouter la poésie en appartement…Ce Printemps des poètes sera le vôtre!
Je serai-s ravie de venir dire mes textes chez vous, en lecture seule ou en partage musical, et ces lectures peuvent être suivies d’une conférence autour de la poésie.
Un texte de 2011, splendidement mis en mots par mon amie Corinne:
Chère jeune poétesse!
Vous me demandez si vos poèmes méritent d’être nommés poèmes. Vous me demandez si vous êtes une poétesse.
Que vous répondre, chère jeune poétesse, que vous répondre, si ce n’est que la nuit vous sera vie.
La nuit, lorsque soufflera l’Autan et que Garonne gémira comme femme en gésine, vous le saurez.
La nuit, lorsque seul le rossignol entendra vos soupirs, vous le vivrez.
Vous vivrez ces instants où le mot se fait Homme, où quand d’un corps malade jaillit cette étincelle que d’aucuns nomment Verbe, quand certains la dédaignent; les étoiles apparaissent, et des mondes s’éteignent.
Vous me demandez, jeune amie, si vous êtes faite pour ce métier d’écrivain.
Mais écrire, belle enfant, ce n’est point un métier, ce n’est pas un ouvrage.
Poésie et argent ne font pas bon ménage, poésie est jalouse, et le temps est outrage.
Vous verrez le soleil dédaigner vos journées, et les ors, les fracas, les soirées et les fêtes, bien des autres y riront, se payant votre tête.
Seule au monde et amère, comme un fauve en cavale, vous lirez, vous irez, sachant mers et campagnes, portant haut vos seins doux, vos enfants en Cocagne. Loin de vous les amours, parfois quelque champagne.
Mais les mots, jeune amie, les mots, ils seront vôtres.
Vous les malaxerez comme on fait du pain frais, vous les disposerez en lilas et bouquets, vous en ferez des notes, des sonates, des coffrets.
Et quand au jour dernier vous serez affaiblie, vos mains seules en errance, votre bouche enfiévrée, on vous murmurera qu’on vous a tant aimée.
Mais il sera trop tard: vos vers auront fugué.
Alors soudain des peuples chanteront vos ramages, on vous récitera, des statues souriront; un écolier ému relira quelque page. Et un soir, quelque part, au fin fond d’un village, ou dans un bidonville, enfumé et bruyant, une jeune fille timide osera les écrire, ses premiers vers d’enfant, vous prenant en modèle.
Alors ma jeune amie, ce jour-là, doucement, comme en ronde éternelle:
Je vis en état d’urgence En forêts d’incandescences On veut m’édicter couvre feu Mais je n’obéis même pas à Dieu On me dit d’arrêter de me poser Me reposer m’apaiser De regarder passer les trains De prier de joindre mes mains De faire silence ou pénitence Mais je ne sais que fronder Me relever vibrer frissonner Je veux foisonner d’existence Même si ma vie s’enfuit Je veux d’amour faire bombance Même si seule dans mon lit Je me veux transe transie transportée Même si je suis abîmée Je vis en état d’urgence Entourée de snipers affamés D’explosions inertes De grenades à désamorcer Sortir ne pas me terrer Dire non au ghetto Provoquer l’ennemi Paris brûle en cercle rouge Et je tire sur tout ce qui bouge J’arrache les rideaux Je me veux cible et point de mire Je ne vous tournerai jamais le dos Mourir les yeux ouverts Regarder l’Autre en face Je vis en état d’urgence En attente permanente de miracle Je suis oracle Chaque homme qui passe est peut-être le bon Je m’enflamme je m’embrase Des tabous je fais table rase Je serai le tison sous la braise Brandon inerte à réinventer Je suis la fleur fossilisée Qui ne demande qu’à germer J’attends le savant qui lira mon génome Et je brûle tous les métronomes J’attends le souffle La tempête et les vents Imperturbable par tous les temps Je suis la gardienne du phare Ma lampe allumée veille de l’aube aux soirs Je vis en état d’urgence Me ris des pastels et autres guimauves Je veux du rouge des sanguines Je me veux vermeille ou purpurine Je serai la lettre écarlate Le coquelicot la rose rouge Ta cerise sur le gâteau Ma bouche aura saveur framboise Je te retournerai les sangs Mon ciel d’éternel crépuscule renaîtra En aube aiguë Viens buvons toutes les ciguës trinquons au diable Et à l’amour Je vis en état d’urgence Je suis le feu la vie la chance Et ta corne d’abondance Je suis entrée en résistance Rejoins moi dans le Maquis Outragée brisée martyrisée Toi seul sauras me libérer.