J’ai encore rêvé d’ailes #hirondelles #printemps #migrateurs #voyage

C’est la lumière qui m’alerte en premier. Imperceptiblement différente. Une sorte de frémissement de l’air, une envolée.

D’ordinaire, j’ai comme un sixième sens. Je sais que lorsque je vais lever les yeux, elles seront là. Un peu comme vous devinez qu’une lettre importante vous attend dans la boîte.

Alors j’ose tourner mon visage vers le ciel, vers ce bleu, ce jour-là, intense, presqu’insupportable, ce bleu qui nous réconcilie soudain avec toute la beauté du monde ; et elles sont là : mes hirondelles.

Je les vois, je les aime, je les sens, si proches, si lointaines, et leurs grands cercles fous me sont comme une aubaine ; soudain, tout s’apaise. Je sais que le monde est à sa place, et que j’ai ma place au monde. Ces frémissements d’ailes dans la première lueur du couchant font de cet instant, de cette minute précise où j’assiste au retour des hirondelles, le moment le plus précieux de mes ans.

Cet instant est mon renouveau, mon équinoxe. Ce moment est mon mascaret et ma dune, mon éveil. Car pour moi, ces hirondelles symbolisent la vie, son éternel retour, sa puissance infinie, la vie, pleine, entière, résiliente et solaire, indestructible.

La grâce, déjà, de ces cercles infinis, de ces ballets aériens, fusant au crépuscule jusqu’au ras des tuiles, ou s’égarant jusqu’aux confins du ciel, me bouleverse. Moi la femme-glèbe, aux sabots de plomb, embourbée dans mes vies tristes, je me sens soudain comme transfigurée, touchée par cette légèreté aérienne.

La liberté, aussi. Assignée à résidence dans ma propre existence, pieds et poings liés par mes soucis, en immobilisme total de par mon manque de surface financière, je suis en admiration devant ces gitanes du ciel, devant ces nomades absolues. Mes hirondelles me disent la bonne aventure, elles seules savent qu’à travers le prisme obscurci de mes gouffres, il reste cette lumière.

Et puis l’oxymore du Bleu de Delft de ce ciel de mai parsemé d’onyx, le contraste parfait entre les ailes veloutées des ébènes en envol et notre printemps d’azur : d’aucuns aiment regarder une ligne d’horizon maritime, qui apaise et invite à tous les voyages… Moi, c’est en contemplant ces tableaux toujours renouvelés que je me sens revivre.

Chaque année reviennent mes grandes espérances : je rêve à un été qui serait différent, qui aurait à nouveau un goût d’enfance et de vent… Je revois la route sinueuse qui menait à la mer, et ce moment précis où le paysage se fait méridional. Au détour d’un virage, l’air s’emplissait de cigales et de pins. Les vacances commençaient. Et puis les cousinades, les odeurs de vergers, les haricots cueillis et le foin engrangé…

Oui, lorsque reviennent mes sœurs du ciel, je reconnais le chemin du bonheur.

*** Cette petite prose a été écrite il y a quelques années, lorsque je me débattais encore dans un enfer social, entre un douloureux divorce international et un monceau de dettes laissées par un autre…


Je me cogne à la prison du ciel

Je me cogne à la prison du ciel

Hirondelle perdue en confins d’irréel

A la recherche de ces infinis soleils

Englués au fond des vallées de merveilles

Tournoyant en cercles éperdus d’immense

Fébrile enfant comme soudain en transes

Je voudrais pour toujours décrocher vieilles lunes

Alourdie dans ma quête par d’ancestrales runes

Je frôle cimes d’arbres

En poussant cris de marbre

En tombeau de ma vie

Je me sens engloutie

Et puis je redescends en piqué maladroit

Happer quelque lumière aux confins des grands froids

Mes grandes migrations ne me sont que misère

J’avais rêvé l’Afrique me voilà en hiver

Oiselle sans boussole

Egarée un peu folle

Oh rendez moi mes ailes

Donnez moi ces printemps que je m’y fasse belle

Où sont ces crépuscules en confins de lumière

Qui m’offriront enfin ces espérances fières

Je veux crier au ciel mes chants d’été soyeux

Je veux à tire d’aile voleter vers les feux

De ces couchants si roses que les joues en frémissent

Me faire signe noir de nos amours prémisses

J’écrirai dans l’azur

Je serai des plus pures

Et au jour déclinant nous quitterons les sols

Vous et moi mon ami pourqu’enfin je m’envole…

Et puis les dettes ont été effacées, le temps a fait son oeuvre, et j’ai même décroché l’agreg externe en 2016, ce qui m’a permis de voyager à nouveau, de fouler enfin ma terre germanique, celle de mon deuxième pays, et aussi celle d’outre-Danube… J’en ai bien profité après ces années de disette: la Rhénanie, bien sûr, berceau familial, mais aussi la Baltique tant aimée à Rügen, les peintres fous de Worpswede, la vallée de l’Elbe en poussant jusqu’à Prague… Un stage de l’institut Goethe m’a offert, enfin, l’émerveillement de Berlin… Une résidence d’artiste m’a permis de déguster les fastes viennois… Mon projet autour de Rose Ausländer a encore ancré cet amour de la découverte.
Puis vint le Covid, et, à nouveau, l’immobilisme…

Et ce soir, en voyant revenir les voyageuses, j’ai pensé à toutes nos envies de liberté, de voyages, de routes, de sentes, de navires, de vols, d’envols…
Bientôt…


En attendant, sachons, comme nos sœurs du ciel, tournoyer en cercles infinis au-dessus des bonheurs du quotidien… Regardons le bourgeon, inspirons ce printemps, et regardons-nous, dans les yeux. Le masque ne nous prive pas de ce plaisir-là.

Des hirondelles dans le ciel d'Ajaccio un 29 février !

C’est le retour des hirondelles

C’est le retour des hirondelles

Les voilà reines du grand ciel

Elles passent et crient à perdre haleine

En cercles d’anges onyx ébène

Criblant mes soirs de perles noires

Elles tournent belles en mes espoirs

Derviches anciens à mes fenêtres

Comme autant d’âmes en disparaître

Le ciel soudain a goût d’immense

Envie de me jeter en vol

De tournoyer comme en enfance

En éternelle escarpolette

De devenir une escarbille

Comme étincelle d’un soleil

Qui partirait en matin d’or

Sur des sentiers couleur nuages

Leurs cris frissonnent en mes désirs

Je les envie les belles oiselles

Si libres en grâce d’absolu

Leurs arabesques giflant mes soirs

Sont ma kabbale et mon miroir

Nul ne saura jamais vraiment

Si je préfère obstinément

Bâtir nichée à mes enfants

Ou voler libre en crépuscule

Bien maladroite libellule

Que vienne enfin l’heure stellaire

Celle où s’aimeront nos deux lunes

Lorsque blottie contre ton ciel

Tu me diras ton hirondelle.

Peut être un gros plan

Bel an neuf! #bonneannée #2021 #poésie #voyages #confinement

Chères toutes, chers tous!

Avec un peu de retard à la suite de soucis de santé, recevez tous mes vœux pour cet an neuf: qu’il vous soit, ainsi qu’à vos aimés, joie, lumière et douceur.

Trois anciens poèmes pour nous souvenir des voyages qui nous semblent si lointains et inaccessibles, des campagnes qui nous manquèrent tant durant les confinements, et un dernier poème presque prémonitoire:)

Une pensée particulière à toutes celles et ceux qui ont été malades et/ou qui ont perdu un proche.

Prenez soin de vous! Aimez-vous! Que les cœurs soient unis et qu’ensemble nous résistions au virus et au découragement!

PS: n’ayez pas peur du vaccin…

Auch…, un premier janvier…

Un jour nous irons vers les Nords

Un jour nous irons vers les Nords
Nos paysages seront blancs d’or
Reine des Neiges tu m’aimeras
Cristal de l’œil repartira

Je serai Gerda ou bien la Reine
Palais de Glace fondra sans peine
En fjords folies fendrons nos rêves
Vie boréale passion sans trêve

Un jour nous irons vers les Ests
Vers des toundras inaccessibles
En yourtes libres lâchant du lest
Humant ces bises inaudibles

Nous grimperons Himalayas
Amour sherpa de nos tendresses
Toujours je serai ta Geisha
Sous cerisiers tu me caresses

Un jour nous irons vers les Suds
Oubliant froidures trop prudes
Palmiers de feu air indigo
Terres sauvages douceurs des eaux

Quatre éléments un seul amour
Tous nos lointains disent « toujours »
Abyssinie parée de sienne
Îles Marquises céruléennes

Un jour nous irons vers les Ouests
Vers une Irlande aux embruns vifs
Rousseurs rochers l’amour nous reste
Voilier ancré en château d’If

Une certitude et un voyage
Comme un élan d’envols immenses
Comme l’arc-en-ciel en paysage
Points cardinaux des mille transes.

Vienne…

Se souvenir des belles choses

Se souvenir des belles choses
Du vent qui siffle sur les lauzes
De ces châtaignes en bogue douces
Et des clairières gorgées de mousses
Savoir encore le goût des mûres
Qui éclatent à nos palais d’été
Et de ces rires en cousinades
Sous les glacis de la cascade
Lorsqu’en retrait du monde adulte
Nous échangions premiers baisers
Se souvenir de l’aigle noble
Et de la buse en la vallée
Ils hurlent majesté aèdes
D’un temps où seule comptait
La vérité
Se souvenir de mots si simples
Margelle bougie édredon
La vie n’était que plume d’ambre
Et la lumière vacillait
L’eau gouttait en ribambelle
Elle coulait de source vive
Se faisait truite en ru d’été
Se faisait lac en vraie montagne
Et mer là bas côté garrigues
Notre eau puisait en monde propre
Et nous savions le poids des beaux
Se souvenir des odeurs sombres
Fermer les yeux sur nos antans
Voilà la cave aux vins poussière
Et les pommes suries embaumant
Montons échelle vers poutrelles
Foin et graines aux blonds décors
Et la malle aux mille dentelles
Maie de la bru bonnet jeté
Oh vous moulins tournez encore
Se souvenir des pas sur neige rêche
Blottis glacés on rêve au feu
Minuits chrétiens la cloche sonne
Nos noëls ressemblaient à un « Martine »
Et Sébastien parmi les hommes
Nous fredonnait ses brumes claires
Se souvenir des jours d’école
Des encriers violets tachés
Nous étions tous des Petit Chose
Meaulnes m’aurait bien épousée
La Seine prend sa source
Et ma vie me détrousse
Peu à peu je me noie en bien tristes horizons
Rendez-moi Saint-Louis sous le chêne
Et l’autre dit le Hutin
M’entendez-vous vieille Pucelle
Qui guérira mes écrouelles
La vie se fait tendre buvard
Se souvenir de nos enfances
Nous redresser toucher du bois
La vie était une évidence
Peut-être n’est-il pas encore trop tard…

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Quelque part dans le Tarn…

Bas les masques !

Bas les masques !
Il ne suffit plus de désirer les frasques
Ou de maudire en sang les impossibles humeurs
Toi et moi nous serons de plus en plus fantasques
Et un jour nous saurons déguster nos bonheurs.

Hauts les cœurs !
Désormais au grand jour je vivrai mes rondeurs;
Nul n’aura la main mise sur mes appétits d’ogre
Vins et miels me seront comme un appât frondeur
Si tu m’aimes à mon corps ne jetteras l’opprobre.

Liberté !
Si le ciel m’appartient, la terre m’est contée:
J’en serai citoyenne jusqu’aux confins des jours!
Voir Venise et mourir mais plutôt y rester;
Nos voyages auront la couleur des amours

Garonne, en voyage immobile…

Et puis, pour rire un peu, en souvenir, mes « mauvaises résolutions » du premier janvier …2009!! Comme elles semblent lointaines, et pourtant si proches:)

Mes mauvaises résolutions….:::)))

Mieux trier mes ordures.
Vraiment. Pas seulement de temps à autre, en visant la bonne poubelle. Ne pas mentir à mon fils en lui disant que j’ai rapporté les piles…
Ne plus utiliser 10 mugs dans la même journée pour mes thés et tisanes.
Ne pas shooter dans le chat, même très légèrement, quand il miaule plus d’une demi heure après avoir déjà eu sa ration de croquettes bio.
Résister à la tentation de regarder les mails toutes les 5 minutes
Disons, m’accorder plutôt 10 minutes.
Ne pas boire plus de 25 tasses de café par jour.
Arrêter de me dire malade pour le plaisir de voir mon doc chinois.
Ne plus mettre les Gipsy King à fond; il n’est pas certain que mes voisins les aiment et ils ne savent pas forcément que cela m’aide à me concentrer lorsque je vide le bac du chat.
Arrêter d’avoir tout le temps des pensées moqueuses et/ou médisantes:
exemple:
Au tribunal, alors que j’y suis pour un ÉNORME souci: « Tiens, je n’avais pas remarqué que dans ma petite ville même les avocates ne se maquillaient pas! »
Ne plus écouter France Info plus de 15 minutes, voire plus, jusqu’à être capable de réciter les flashs aussi bien qu’une poésie de Maurice Carême.
Basculer plutôt sur « Lahaie, l’amour, la vie » en faisant la vaisselle du midi, ça m’évitera de mourir coincée et me permettra de briller dans les soirées en donnant des adresses coquines du fin fond de ma campagne.
Travailler cette idée du lancement d’un MAXI SEXY CENTER dans mon département.
Car le foie gras, c’est has been, non?
Arrêter de ne PAS m’épiler les jambes sous prétexte que je suis « hors ligne ». Oui, on ne sait jamais. Toujours être habillée comme si Karl Lagerfeld himself venait souper. « La STYLE », ou rien.
Lire le Monde. Non, je n’ai pas dit « acheter », ça, ça m’arrive. J’ai bien écrit « Lire ».
Aller à Paris. Le dire, le faire, et recommencer. Parce que la vie, la vraie, se passe statistiquement aux endroits peuplés, nantis de théâtres, de librairies, de quartiers, de rencontres.
Aller à la mer.
Sans rien. Aller à la plage en maillots et en tongues, même sans serviette, et si possible sans enfants, panier, goûter, crème solaire, ballon, livre, portable, monnaie pour les beignets, maillot de rechange, parasol, couche de rechange-bon, ok, je n’ai plus de nourrisson, c’est dans l’absolu-, bouteille d’eau, petits jus.
Juste aller à la plage, regarder, nager, se coucher à même le sable, sentir.
Aller à la montagne.
Sans rien. Aller à la montagne avec une bonne paire de chaussures, une carte et un chapeau-un bonnet selon la saison. Et surtout sans enfants, sacs, deux mille barres de survie, batons que je porte, guide des GR, pique nique débordant…
Faire faire des cartes de visites ciblées, les garder dans des petites pochettes et les distribuer.
Sur la carte pro, bien mettre un titre ronflant et une super photo, et la donner le plus souvent possible, ne pas oublier les liens internet, et ne pas hésiter à aller au devant des possibles. Bien sûr que ça existe, des profs qui quittent l’Education Nationale…
L’autre carte, celle où il est écrit « I’m free, what else? », je la donne comme ça, au feeling, je la tends à cet inconnu croisé au parc et qui a un si beau regard, je la dépose sur le siège de mon voisin de train qui est plongé dans la lecture de Baudelaire-si si, ça existe, aussi!!!-, et je m’épargne ainsi les 39,90 euros de l’abonnement Meetic.
Tiens, à propos Meetic, je blackliste illico toute personne faisant plus de 5 fautes d’orthographe par ligne et je me mets à faire des recherches par mots-clefs.
La quête de l’Homme doit se pratiquer avec la rigueur d’une recherche universitaire.
Je regarde les émissions intelligentes.
Je ne zappe pas quand je vois Arlette Chabot ou Yves Calvi.
Ils sont aussi respectables que Cauet et ont DROIT à leur part d’Audimat.
J’arrête de regarder » Miss Swann », de toutes manières je n’aurai JAMAIS le courage de m’attaquer chirurgicalement à ma ptose abdominale, et il est HORS DE QUESTION que je me transforme en Barbie.
J’admets que ma PREMIERE OPERATION esthétique a été une erreur, et j’assume enfin la joie de ma transformation:
Avant, j’étais blonde à forte poitrine, aux yeux bleus, 95/60/95, je mesurais plus d’un mètre 75 et je chaloupais des hanches et du regard.
Aujourd’hui, je porte de grosses lunettes, je mesure un mètre 60 pour 60 kilos, je n’arrive pas bien à trouver ma taille de soutif et les abdos ne marchent pas, mais je dois être heureuse avec ce nouveau corps et cesser cette nostalgie ridicule. J’ai droit à ma différence.
Je ne tchatte plus avec**** jusqu’à 2h du matin, c’est ridicule.
Je relis Proust, Hugo, j’apprends enfin à tricoter et je fais des chaussettes pour les petits prématurés du Brésil.

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https://sabineaussenac.blog/2017/12/29/et-puis-2018-deviendra-souvenir-voeux-bonne-annee-2018/

Nos armoires

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C’est comme un adieu…Mais en fait, ce n’est qu’un au revoir. Malgré tout, il faut un certain courage pour, deux fois l’an, se séparer de nos compagnons de toujours, qui nous entourent de bien près, nous englobent, nous portent et nous rassurent : nos vêtements, dits « d’hiver » ou « d’été »…

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Ouvrir l’armoire. Soupirer, en pensant qu’avec tous ces changements climatiques, ces heures que nous allons passer à trier, ranger, étiqueter seront peut-être vaines. Et puis, en attrapant à pleine main l’étoffe molletonné de nos gros pulls plus proches des doudous des petits que d’un lainage, se souvenir d’une autre douceur, celle que notre mère appelait « Modenschau », « défilé de mode » en allemand…

Nous défilions devant la glace de l’armoire de notre chambre, ou parfois en bas, au salon. Souvent, maman mettait l’un de ses disques préférés, pour égayer encore l’atmosphère. Et c’est au son de Bill Haley et de ses « Comets », des Beatles ou de « Nathalie » que nous enfilions nos robes à col claudine et autres pattes d’éph’ pour vérifier ce qui nous irait encore à la saison suivante, ce qui passerait dans l’armoire de sœurette, serait envoyé à nos cousines ou serait remisé pour quelque génération suivante… C’est accessoirement ainsi que mes filles m’en veulent toujours, plus de vingt ans après leur enfance, de leur avoir fait porter des robes des seventies… Pourtant, elles étaient délicieuses, mes poupées, dans les tenues crochetées par ma grand-mère ! Et je ne regrette pas de les avoir fait grandir dans des fleurs et des volants plutôt que dans des jeans troués ou des robes moulantes noires aguicheuses…

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Les gros pulls veloutés sont donc sagement pliés, puis déposés dans un grand sac poubelle (propre, je vous rassure) agrémenté de grains de lavande piqués, cette année, à Basso Cambo, au cœur de ce Mirail périurbain dont je vole chaque jour quelques instants rupestres en y changeant de bus, y cherchant les arbres et les coins de verdure…

Viennent ensuite les velours, mes tuniques adorées, plus chatoyantes les unes que les autres, petites mémoires de ce qui aurait pur être et adviendra peut-être un de ces prochains hivers… Au gré des pourpres et des ors, imaginer cette soirée où nous irions faire éclater quelque bulle de champagne dans un grand restaurant, se dire que, l’année prochaine, c’est sûr, nous fêterons dignement la Saint-Sylvestre…

Plier aussi les jupes longues, les robes, les tweeds, ceux qui nous font toujours dériver vers une Irlande dont nous arpenterions les verts et les mauves, fouettée par les bruyères et les vents – quand notre maximum, depuis des mois, côté campagne, consiste à admirer, par temps clair, la grandiose chaîne des Pyrénées qui se profile derrière le champ de colza juste avant que le bus n’arrive au collège…

Les étagères se clairsement, les cintres se vident et se balancent comme les mats d’un bateau attendant misaine, on hésite sur le sort réservé aux vêtements de « mi-saison », ceux que, depuis quelques années, on ne porte plus, puisque le ciel a pour vilaine habitude de nous faire passer à présent directement de canicule à frimas, nous privant de nos divines petites vestes de velours et de nos jolis bas ajourés, nous obligeant à enfiler directement nos lainages et nos oripeaux matelassés… Pleine d’espérance folle, on remise quelque jolies pièces vers l’arrière de l’armoire, il faudra simplement se souvenir de leur existence après nos longs mois d’été et éviter de nous engoncer trop vite dans les informes tenues sans âme du quotidien…

Vraie femme nous sommes, faisant le fameux « yo yo » depuis notre enfance, étant passée de 90 kilos à 55 en 2004, quand nous avions décidé d’en finir avec les tailles XXL, avant de grignoter imperceptiblement, de Nutella en stress divers, notre taille de guêpe pour remonter, ménopause aidant, vers un petit 67, et, récemment -merci à l’EN qui nous fait voyager trois heures par jour cinq fois par semaine !-, de redescendre sous la barre des soixante, youpi ! Vraie midinette écervelée nous demeurerons aussi, persuadée que nous serons capables, si si, c’est certain, de « retrouver un corps de rêve », enfin, – même si nous n’en avons jamais eu !!! – avant l’été à venir, et nous laissons donc en place ces jeans taille basse et ces tuniques moulantes qui, une saison durant, s’étaient imaginés nous vêtir, qui le temps d’une soirée, qui le temps d’un colloque… Tiens, allez, on scelle un pacte avec nous-même, cochonne qui s’en dédie : cette sublime robe noire au décolleté de soie, elle nous ira pour les derniers jours d’été, chiche, on la portera même pour la pré rentrée…

Voilà. L’hiver est plié, à nous l’été ! À nous les étoffes légères comme une brise de juillet soufflant sur des voilages, les petits imprimés guillerets comme un rosé d’Anjou, les échancrures profondes comme une gorge de montagne… Ravie, comme en retrouvailles joyeuses lors d’une cousinade, on plonge à bras raccourcis dans les sacs de l’été dernier, qui regorgent de trésors oubliés, comme passés aux oubliettes au fil des mois de grisaille, de boues froides, de vents déchaînés…

La voilà, NOTRE robe fétiche, celle que nous avons portée lors d’anciens rendez-vous et qui, par le miracle de son étoffe laxe, nous va toujours, faisant fi des variations de notre silhouette…

Nous la portions lors de cette inoubliable soirée qui nous a valu, des années plus tard, le premier prix du concours de nouvelle de Brive, et son orange mâtiné de noir a ce goût de sanguine décrit par Françoise… Enfiler ma robe orange va de pair avec le souvenir de cette phrase lue à dix-sept ans, que j’aurais tant aimée faire mienne, malgré les aléas de mon corps gourd…

«Je m’installai tranquillement sur une marche avec une tasse de café et une orange et entamai les délices du matin: je mordais l’orange, un jus sucré giclait dans ma bouche; une gorgée de café noir brûlant, aussitôt, et à nouveau la fraîcheur du fruit. Le soleil du matin me chauffait les cheveux, déplissait sur ma peau les marques du drap. Dans cinq minutes, j’irais me baigner. » Bonjour Tristesse, Françoise Sagan

Combien d’étés rêvés depuis mon adolescence, d’étés perdus au gré d’une vie compliquée, qui n’ont jamais été synonymes d’insouciance, mais plutôt de combats, d’évasions poussives, de privations, de frustrations… Il faudra bien rompre avec ce cycle des tristesses, oublier les disputes, ne garder que le Beau… Elles étaient jolies et virevoltantes, les robes de princesses de mes filles, lorsqu’elles sautillaient le long des allées d’Étigny ou couraient dans les méandres du parc de la Pique, pendant nos cures à Luchon… Et je me souviens avoir ressorti la robe africaine de mon premier mariage pour cette seule escapade arcachonnaise, tandis que mon garçon qui ne voyait jamais la mer, durant nos années de plomb, escaladait fièrement la dune du  Pyla…

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Accrocher nos vêtements d’été dans notre armoire prend soudain des allures de promesse. Se jurer, croix de bois croix de fer, que cette année, ces merveilleuses tuniques ne resteront pas cantonnées aux berges de Garonne, mais iront danser le long de quelque golfe clair…

Oui, nous irons à Berlin, car il est juste impensable de ne pas passer quelques semaines outre-Rhin, dans notre deuxième patrie dont nous avons si longtemps été privée, mais il faudra aussi renouer avec les sables et les cigales, au moins quelques jours, pour montrer Mare Nostrum à cette jolie robe dont les ancres et les voilages sont comme une invitation au voyage…

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Nous essayons, passons les petits pantalons de lin, les fines bretelles ; une chose est certaine, nous avons de magnifiques épaules, rondes, toutes veloutées, l’une d’elle constellée de tâches de rousseur, vestiges d’un énorme coup de soleil datant de cette époque où les effluves inégalées de l’Ambre Solaire ne protégeaient en rien des UV… Pour le reste, savoir s’arranger, tricher, recouvrir les inégalités et autres ptoses de couleurs éclatantes, et le tour sera joué…

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La chambre se fait à présent océane et alpine, la ville rose est loin. Le superbe kaki de ce pantacourt appelle les sentiers d’été, je peux sentir les herbes folles caresser mes mollets dénudés et entendre le cri de la buse qui fait le Saint-Esprit… Quant aux fleurs éparpillées de mes tuniques, elles dansent au gré des ressacs, langoureusement enlacées autour d’un corps légèrement hâlé, et, en les accrochant d’une main distraite, j’ai les pieds tout mouillés par l’écume, songeant à la douceur vespérale de cette plage désertée par les familles, quand nous marcherions vers la jetée…

Nous ? Je souris. Il n’y a aucun « nous » à l’horizon, mais justement cette promesse de l’été, celle qui fait rêver les filles, de 7 à 77 ans, à des feux de camps et aux guitares, à de longues nuits emplies de grillons et à cette main qui, toute engourdie par le soleil et les vagues, un jour, peut-être, saisira la mienne…

En refermant l’armoire, je caresse doucement les grues de ce peignoir estival qui peut aussi se faire paréo… Et me dis que nos vêtements migrateurs ressemblent, souvent, à ces escouades audacieuses qui s’élancent à travers les cieux, espérant l’infini…

Et quand les grues cendrées voleront sur la ville

Au profond du silence je murmure : Source aveugle, cresson des renaissances.

Les rayons de tendresse qui ruissellent en mes sens font de mes pas soieries, toutes ourlées de gaieté.

Tu me veux exilée. Je ne bougerai pas. 

J’attendrai sous les pins, écoutant la falaise. L’océan qui revient, et les cris de l’effraie. Quand viendra au matin le parfum d’aubépine, je marcherai vers nous, de déserts en ravines.

Au lointain, tu entends mes mots ricocher sur ton cœur. Tu ne m’as plus parlé depuis notre évidence. Je te sens apeuré comme un chevreuil blessé ; j’ai volé tes secrets, j’ai franchi des blessures.

Tu me veux résignée. Je n’espèrerai pas.

Mais je ne tairai pas les fleurs vives et les prés, ni le ciel de printemps, tout perlé d’hirondelles. Je te dirai des villes où des vies nous attendent, et puis je veux ton rire, comme un lac de montagne.

Au creux bleu des promesses, je suis celle qui vient. 

J’irai seule au marché, y voler des framboises, imaginer ta bouche qui picore sur moi. Au midi je verrai quelque film, comme on part en voyage, pour rêver que peut-être tu me prendrais la main.

Tu me veux séparée. Je serai ta moitié.

Et quand les grues cendrées voleront sur la ville, tu sauras que le temps est venu pour aimer.

http://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/actualite/ecrits/item/il-ferait-bon-en-ars-en-re

http://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/actualite/ecrits/item/encore-un-ete-sans-la-plage

https://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/reforme-grandes-vacances_b_2769627.html

Vous souhaiter…Bonne année 2019!

Vous souhaiter…

L’amour, celui qui vibrionne et carillonne en chantant, par les beaux soirs d’été lorsqu’on part aux étoiles…

La joie, celle qui donne les joues roses aux petiots et les larmes aux creux des yeux délavés des Anciens.

Le rire, celui qui fait glousser les corsages et tressaillir les salles obscures, sonore et pimpant, tout ourlé de fous-rires.

La paix, celle qui clame en grandes plaines que le front a cédé et que les vareuses bleu de sang pourront rentrer au pays.

Le temps, celui qui coule paresseusement comme la Loire en châteaux, s’étirant femme fière de ses atours éternels, sans savoir qu’elle va à la mer.

La folie, celle qui, douce et guillerette, rend les femmes amoureuses et les hommes à passions.

Le courage, celui qui soulève le métro pour arrêter la bombe et qui offre à la femme battue les ailes de sa fuite.

La bonté, celle qui donne aux escarres l’impression d’être roses ou jasmin, quand un sourire éclaire les nuits longues des errants de la vie.

Le rêve, celui qui crée les mondes et dessine l’envie, quand le cancre devient premier violon et que nos nuits outremarines se piquètent d’étoiles.

L’invention, celle qui océane les déserts ensablés ou rend à cet enfant ce cœur qui bat l’amble.

Le désir, celui qui crépite, incendiaire, dans les corps des aimants, dévorant les ivresses comme un grand soleil rouge.

La beauté, celle qui peint les toiles en oranges sanguines et délie les corps des ballerines éternelles.

Le détachement, celui qui berce les solitudes toutes brodées d’ipomées, cheminant vers montagnes en offrandes de vie.

La volonté, celle qui guide l’égaré vers les sentes odorantes, là où mille tilleuls ombragent sources claires.

Le plaisir, celui qui se partage sous les pommiers tout enivrés d’abeilles ou dans un lit froissé qui frémit sous le vent.

La fraternité, celle qui se rencontre quand on n’a plus rien et qui met l’homme d’équerre malgré de lourds chagrins.

Le voyage, celui qui comme un père vous guide et vous élève, ou comme mère aimante vous embrasse en folies.

L’espérance, celle qui jamais ne cèdera d’un pouce aux idées sombres des pisse-vinaigre, car toujours nous resterons debout.

Le savoir, celui qui déchire les voiles de mille  obscurantismes et lève l’ancre pour de nouvelles découvertes.

La douceur, celle qui prend la main ou caresse satin ou embrasse carmin et embrase matins.

 

Je vous embrasse et vous aime!

Palais de glace…

 Je suis la femme-bulle, enfermée dans son palais de glace. Prisonnière de mes morts, je vis derrière la vitre et vois passer la vie.

Elles sont là, toutes mes vies possibles, à portée de rêve…Il y a toutes ces maisons inconnues, ces hommes à aimer, ces rencontres improbables, ces métiers non exercés… Et si…Et puis les vies passées, les presqu’îles, les torrents, les fureurs océanes, tout ce magma mémoriel qui déferle et s’engouffre en chaque interstice de mes présents et pollue mes rivières…

Je suis en cet instant précis au milieu de ma vie, j’ai atteint la « mi route » de Desnos.

Et je me sens confluente, source et delta, comme prisonnière de cette banquise qui ne demande qu’à fondre. Je vois passer à la surface de mes glaces toutes ces images, toutes ces perspectives non saisies, et n’ose me dire qu’il est trop tard. Il ne peut être trop tard.

Il m’est tout simplement impossible de croire que la vie, ce n’est que ça, ce seul combat permanent entre les chiens et loups de ces mensonges, il m’est impossible de ne pas entendre, attendre la suite.

Éternelle rousseauiste-c’est la faute à Voltaire-, je sais les temps prédits de la bonté. Cette idée de planter un pommier, même si la fin du monde était pour demain, cette idée que la vie même est renaissance, mouvance, intensité toujours renouvelée, ne me quitte pas.

Il est miraculeux qu’il reste la lumière, disait Claude Vigée.

Ma vitre est légèrement embuée, et pourtant je vois passer mes rêves, encore et toujours.

Il y aurait eu ma vie parisienne. Si j’avais terminé ma khâgne, si je n’avais pas épousé un cheminot cégétiste pour fuir la coupe d’un conseiller général RPR de père…Avec mon boy friend d’alors, devenu un people du monde des lettres, nous aurions écumé le Flore et les Champs…Oui, je les vois, notre petit appartement du Marais, et nos nuits à Saint-Germain, et ma carrière de normalienne, puis de journaliste…En avais-je la carrure ?

Je me souviens de l’une de nos rencontres entre nos divorces respectifs, il m’avait invitée chez Lipp et m’éblouissait de son assurance, de ses mots, de son parisianisme. Je mesurai, l’espace d’une soirée, la béance entre nos deux univers, entre ma petite vie de provinciale maladroitement engoncée dans ses routines et les brillances du succès universitaire. J’avais presque perdu, à cette époque, l’habitude des mots, égarée en terre hostile, sommée de défendre ma pitance intellectuelle devant le cercle militant des amis de mon époux. C’était Pol Pot, je devais pratiquement faire mon méa culpa et me justifier de mes lectures, de mon amour du mot. J’étais orpheline, soudain, de cette vie qui aurait pu être mienne, si j’avais suivi la voix royale de « Normale ».

C’est ainsi que je me promène, orpheline de mes vies, tantôt femme d’à côté, ardente et passionnée, tantôt Scarlett enfin domptée, sans même un Rhett, sans même un Tara à reconstruire.

Il y aurait ce castel dont je serais la reine, et mes roses parfumées que je respirerais comme en tableau de Waterhouse. Je peux entendre crisser les graviers de mes rêves, et sentir le lilas embaumant nos parterres. Je suis la Dame des Sablonnières, ou Léopoldine aux Feuillantines, de grands arbres bruissent dans le parc où jouent nos enfants blonds, et j’écris sur cette petite table ancrée sous la glycine. J’aime ce jardin, qui respire chaque soir comme un poème d’Anna de Noailles ; j’entends le clapotis de la fontaine, et je te vois, assis à ton bureau, ta belle tête de penseur penchée sur quelque idée qui flâne.

Et nos arbres, tous nos arbres…Le marronnier et ses fruits polis que je récolte comme autant de galets de ma terre, l’allée de tilleuls sous laquelle nous avions échangé notre premier baiser, les cerisiers sous lesquels tu me nommes ta geisha à chaque printemps, et le cèdre bleu, mon cèdre, ma certitude. La peupleraie trouée de lumières, et puis la sapinière, comme échappée des Ardennes de mon enfance, silencieuse et pérenne.

Poétesse, ce lieu m’ancre et me ressource. L’été accueille nos stagiaires en écriture, et le festival de musique ancienne que nous avons créé. Jordi Savall est mon meilleur ami. La lecture de mes textes qu’il a accompagnés l’an passé a été retransmise en duplex sur Arte, ma mère en avait informé la terre entière.

Il m’arrive de descendre plus au sud, aimantée par la Toscane, par les ocres et les siennes, guidée par les cyprès.

Un enfant bruni par la lumière joue à l’ombre de la cour. J’ai lu un jour que Carole Bouquet vinifie en Toscane, et je me rêve pont entre deux rives, messagère de cette terre gorgée de soleil, offrant les grappes de ma vigne…Comme j’aurais aimé, oui, vivre en Italie, en éternelles vacances romaines, en petite mort à Venise, sculpturale et galbée, outrancière et légère, Madone et courtisane…La Villa Médicis a été longtemps ma terre promise, j’y ai beaucoup appris. Traductrice, essayiste, comédienne, je me sens Beatrix et Joconde.

Mais je peux aussi me faire océane, traversant continents pour explorer le temps. La possibilité d’une île me ravit ; battue par les flots, la petite cabane abrite mes amours luxuriantes avec quelque artiste déchu. Je le rejoins les nuits de tempête, lorsque la mer tarde à me rendre mon époux, et pose nue devant la vitre embuée par nos étreintes. Les chroniques que j’envoie au Times respirent la passion, les embruns fouettent ma plume. Parfois je pars encore bien plus loin, vers ces contrées où je défends la cause de mes sœurs martyrisées. On parlerait de moi pour le Pulitzer. Bernard-Henri m’a proposé une écriture à quatre mains, j’y réfléchis.

L’Angleterre m’appelle souvent, j’accoste à Beachy Head et vais de cottage en vallon, comme habitée par cette histoire royale. L’exception britannique parle à mon cœur de midinette, et, lorsqu’une vielle main gantée soulève la dentelle devant le carreau gauchi orné d’ipomées pour me regarder traverser le village, je crois reconnaître Agatha.

Mais je préfère encore m’appeler Moïra. Tu aimes tellement mes cheveux de sorcière que tu m’as surnommée Sanguine. Depuis notre jardin d’hiver où poussent des palmiers, je vois la baie, violente et passionnée comme les longs romans pleins de bruit et de fureur que j’écris en souriant. Parfois, tu m’apportes un Darjeeling fumant et passes tendrement une main dans mes cheveux lumière, avant de rallumer le feu. Arrête, tu dis des bêtises. Le Goncourt, c’est pour les vrais écrivains…

Et puis il y a les villes, les villes tourmentées et les cités radieuses, les odeurs des marchés et les ruelles sombres, les façades éclairées et les jours de pénombre.

Tu m’as offert Venise, je t’ai guidé à Rome. Tu m’as demandée en mariage au pied du Golden Gate, jamais je n’oublierai ta main californienne aimant ma vieille Europe. New York est mon village, Calcutta me bouscule, mais toujours je reviendrai vers toi, eau verte de mon Canal du Midi.

Tiens…La vitre se fissure…Le verre se brise en milliers de nacres irisées, les fractales de mes vies semblent converger comme autant de particules élémentaires vers un réel tangible. Car la vie est là, allongée comme Garonne ondulant d’aise entre les neiges et l’océan, coulant impassible aux pieds de ma ville rose, m’attendant.

Il faudra bien le traverser, ce miroir, si je ne veux pas finir comme Nora dans sa Maison de poupée. Il faudra arrêter le train d’Anna et prévenir Vronski, il faudra aimer Brahms, décommander Julien Sorel.

Et dire adieu aux Feuillantines, aux Twin Towers et à l’enfer de mes dernières années.

Il faudra que je m’extirpe de ma gangue littéraire qui m’a protégée des jours sordides, il faudra que la chrysalide en éveil ose devenir papillon. Maintenant, c’est à mon tour d’écrire ces mots qui m’ont sauvée. La vitre pare balle dont je m’étais entourée saura faire place à l’immense.

Ne plus rêver ma vie.

Mais vivre mes rêves.

« Mi route

Il y a un moment précis dans le temps

Où l’homme atteint le milieu de sa vie

Un fragment de seconde

Une fugitive parcelle de temps plus rapide qu’un regard

Plus rapide que le sommet des pamoisons amoureuses

Plus rapide que la lumière

Et l’homme est sensible à ce moment. »

Desnos.

NB: Monsieur Roger Grenier, un des piliers de Gallimard, avait beaucoup aimé ce texte, ainsi que d’autres nouvelles… Grande Maison en a décidé autrement… Voilà des années qu’il dort dans mes tiroirs, ce cera mon cadeau de fin d’année…

Comme une valse de Vienne #carnetdevoyageVienne1

Comme une valse de Vienne

 

Il suffit de lever les yeux.

Partout, sans cesse, de jour comme de nuit.

La beauté se niche dans les moindres recoins de la ville, envahissant les places et les larges avenues, escaladant les façades, se profilant comme une ligne d’horizon pérenne et sublimée.

De Vienne, je ne connaissais presque rien, hormis quelques souvenirs ancrés en ma mémoire, plutôt diffus, car noyés dans un très beau périple cyclotouriste que, jeune mariée à peine sortie de l’enfance, j’avais fait à 19 ans, entre Autriche et Forêt-Noire… Et nous n’avions passé qu’une journée dans la capitale, campant vers le Danube, entre les pentes escarpées, les prairies verdoyantes et les chalets fleuris d’une Autriche idyllique.

Je me souvenais de la lumière de ce ciel d’octobre, lactescente et diffuse, de la fabuleuse  serre à papillons non loin de l’Albertina, de ce parc immense où nous poussions, jeunes Français émerveillés, nos vélos déjà un peu épuisés par les cimes et l’air alpin, et de ces deux imposantes nefs de pierre se faisant face, deux musées, le Kunsthistorisches Museum (Musée des Beaux-Arts) construits en regard parfaitement symétrique du Naturhistorisches Museum (Musée d’histoire naturelle). Mon compagnon avait voulu visiter le muséum, et je ne gardais donc en mémoire que des images d’art précolombien, de plumes multicolores, de reptiles et de masques africains.

Du reste, je ne savais rien. C’est pourquoi j’étais si impatiente, l’été dernier, de plonger dans l’Histoire et de mettre des images sur tous les fastes impériaux dont je parlais souvent à mes élèves sans les connaître vraiment.

L’accueil de l’Office de tourisme envers une blogueuse française fut d’ailleurs tout simplement fastueux, lui aussi ! Nantie du « Vienne Pass », précieux sésame me permettant de voyager en illimité sur le réseau si bien achalandé, je me vis aussi offrir l’accès à des dégustations prometteuses dans des hauts-lieux de la gastronomie viennoise, tandis que les musées et le festival ImPulsTanz m’invitaient à découvrir collections et manifestations estivales… La légendaire hospitalité autrichienne n’est pas un vain mot, j’en fis la merveilleuse expérience tout au long de mon séjour.

C’est en fait en rentrant de Vienne et en redécouvrant des ruelles pourtant si familières et aimées que je pris douloureusement conscience du manque soudain de toute cette historicité et des grands espaces viennois, et surtout de la sensation oppressante d’étroitesse ressentie dans ma ville rose après cette escapade austro-hongroise… Plonger, au retour d’une ville où tout n’est que « luxe, calme et volupté », dans laquelle de larges boulevards et de grandes artères abritent un air presque alpin et pur, tant la circulation est policée et fluidifiée par la multiplicité des transports en commun, dans le caractère médiéval des venelles toulousaines et dans ma ville bien-aimée que soudain je trouvais non plus rose, mais grise, sale, encombrée, me fit prendre conscience de la magnificence unique de cette ville qui aimante, depuis des siècles, les arts, la musique et le Beau.

L’architecture, poumon séculaire de Vienne, séduit d’emblée le visiteur qui se retrouve soudain en posture de figurant dans quelque film historique, ébloui par la virtuosité de ces palais rencontrés à chaque coin de rue, par tous ces atlantes soutenant à bras le corps des murs aux encorbellements déliés, par les flèches élancées du Stephansdom (la cathédrale Saint-Étienne) et par la coupole et les ors baroques de la Karlskirche, quand il n’est pas éberlué par les facéties d’un Hundertwasser et de sa maison gironde et multicolore…

La ville vous aspire comme un tourbillon coloré, tantôt en suspens dans les couloirs du temps, lorsqu’au détour de quelque toile de musée ou devant quelque statue languissante vous vous retrouvez face au Baiser de Klimt ou en tête à tête avec le regard émouvant de Sissi, tantôt  en phase totale avec la modernité, au gré des scènes virevoltantes ou saccadées du festival ImPulsTanz , des troquets alternatifs et des tags longeant le canal du Danube ou des expositions ultra contemporaines du Mumok, le musée d’art moderne.

J’écris ce texte en surveillant le bac philo, dont l’un des sujets est : « Peut-on être insensible à l’art ? ». À Vienne, c’est tout bonnement impossible, impensable. Car l’art est partout, vous environne, vous englobe, vous caresse, vous dorlote, vous surprend, vous émeut, s’immisce en vous comme un doux poison vous inoculant ad vitam aeternam comme un parfum de Habsbourg…

Même le plus réfractaire des visiteurs finira par arpenter en fiacre sonnant et trébuchant les pavés tapissant la cour de la Hofburg (le Palais impérial) en faisant allégeance à l’imposante statue de Marie-Thérèse avant de s’élancer à l’assaut des petites places ombragées et des mémoires vives : Vienne est comme un livre d’histoire à ciel ouvert dont l’art serait le firmament.

Et la musique, que dire de la musique… L’ancienne capitale austro-hongroise n’a pas usurpé son titre de « capitale européenne de la musique », quand on sait qu’aucun Viennois ne passe une année sans aller qui à l’opéra, qui à l’un des innombrables concerts proposés par une armada de jeunes gens perruqués et poudrés qui, du haut de leur habit bleu roi ou pourpre, arpentent les rues piétonnes aux alentours de la cathédrale ou les abords de la Haus der Musik, (la Maison de la musique, un fabuleux musée interactif)  pour proposer quelque messe, requiem ou symphonie…

Bien entendu, le divin enfant prodige n’est jamais loin, et même si la folie des « Mozart Kugeln », ces délicieuses bouchées (littéralement « boules de Mozart » !) de pâte d’amande et de pistache enrobées de chocolat et de colifichets à l’effigie du Maestro n’égale pas celle de Salzbourg, Wolfgang Amadeus accueille le néophyte du haut du parterre en forme de clef de sol agrémentant sa statue, qui se dresse au cœur du Burggarten.

Au bout des allées d’un autre parc de la ville, très prisé des habitants, le Stadtpark, c’est un autre géant de la musique qui, tout étincelant de dorures et violon fringant au bras, fait valser Vienne et son Danube bleu… Johann Strauss, de ses compositions intemporelles, emblèmes des crinolines tournoyantes, accroît encore le romantisme échevelé de la ville aux valses à mille temps, du célèbre « bal des débutantes » au concert du nouvel an retransmis dans le monde entier.

J’embrassai cette ville avec passion, bercée par les lumières de ces cieux immenses veillant sur ces constructions plus étonnantes les unes que les autres, de l’imposante bibliothèque aux fastes du palais de Schönbrunn, valsant d’un musée à l’autre entre le Museumsquartier, les statues du Belvédère et les larmes du Musée juif, émerveillée par la luxuriance émeraude des parcs émaillant la ville, amusée par la typicité chantante de l’accent viennois, et surtout bouleversée de ma rencontre avec cette « Mitteleuropa« , berceau de tant de plumes dévorées depuis l’adolescence…

Combien de fois avais-je été moi-même veillée par les anges rilkéens, éblouie par les nostalgies d’un Stefan Zweig et emportée par les pages foisonnantes d’un Joseph Roth? Mettre enfin des visages sur tout un pan de ma cosmogonie littéraire fut comme un aboutissement d’un long chemin. De même, ma rencontre avec des toiles mythiques comme celles de Klimt ou de Schiele, imaginées, contemplées virtuellement ou sur papier glacé, et soudain incarnées, a été cathartique…

J’aurai encore besoin de plusieurs textes pour vous parler de ces « viennoiseries » culturelles, artistiques, musicales, gustatives, et je vais vous quitter en aiguisant vos papilles avant une suite prochaine de ce petit récit de voyage… D’abord, pour moi, il y eut une émouvante rencontre avec Gutenberg ! Oui, c’est bien une statue de cet immense pourfendeur de nuits, de par l’onyx de ses encres d’imprimerie qui apportèrent la lumière au monde, qui orne la place où se dresse la vénérable institution culinaire Lugeck où j’ai dégusté mon premier Wiener Schnitzel… Imaginez un instant le fondant d’une viande aussi tendre qu’un Lied de Schubert, qui se découvre après un croquant aussi doré que les ornements du joyau baroque de Schönbrunn… Ce restaurant et ses célèbres escalopes de veau à la viennoise ont tenu toutes leurs promesses, foi de presque végétarienne très difficile en ce qui concerne la viande…

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Photo Flickr

Mais pour ressentir le cœur battant de la cité, il faut avant tout déguster une Würstel, comme la nomment les autochtones avec leur inénarrable accent mâtiné de dialecte ! Aussi gâtée qu’une héritière des Habsbourg, j’eus encore une fois la joie d’être invitée dans ce véritable monument national qu’est la « friterie-saucisserie » Bitzinger, au Würstelstand sis juste devant le musée de l’Albertina, où, entre un solide montagnard en culotte de cuir traditionnelle, deux Japonaises et un cadre en costume cravate, je manquai défaillir de plaisir en croquant dans la plus divine « Knack », comme disent les jeunes, de toute mon existence, entourée par les adorables sourires des cuistots, Naim, Sam et Costa, aux origines variées mais à l’âme et au doigté indéniablement viennois pur jus ! Car comme à Berlin, qui revendique haut et fort la recette secrète de la sauce de la « Currywurst », c’est bien, à Vienne, autour des barquettes de saucisses que l’habitant, quand il n’est pas dans l’un des célèbres cafés dont je vous parlerai plus tard, partage, dans un joyeux brassage sociétal, ce plaisir simple et urbain.

Il faudrait enfin évoquer les saveurs exquises des créations du glacier Eis Greissler, découvertes encore une fois grâce à la générosité de mes bienfaiteurs. Et je terminerai ce premier opus mémoriel en remerciant très chaleureusement toute l’équipe de l’office du tourisme, et en particulier Madame Bettina Jamy-Sowasser et Monsieur Florian Wiesinger, qui ont si gracieusement facilité mon séjour dans la capitale austro-hongroise. Et bien entendu Nathalie, qui se reconnaîtra…

Une année presque a passé, à rêver à ce premier voyage et à imaginer le suivant, à retravailler les rencontres et les impressions, les images et les éblouissements de la découverte. Car aller à la rencontre de Vienne, pour une binationale franco-allemande, c’est aussi oser le dépaysement linguistique, historique, géographique. Puisque l’Autriche n’est pas tout à fait le même pays que l’Allemagne, mais pas tout à fait un autre non plus…

 

De Vienne les enfants sont l’art et la musique

La lumière laiteuse envahit la cité,

Des Atlantes alanguis, forces fantastiques…

Ors baroques, clameurs, opéras, menuets :

De Vienne les enfants sont l’art et la musique.

 

Cent Mozart nous accueillent, perruqués et poudrés,

Virevoltant joyeux d’une douce folie.

La légende des siècles, au quartier des musées,

Resplendit en ses toiles comme un ange sourit.

 

Un fiacre dodeline sur le haut des pavés:

Ici chaque touriste devient empereur !

L’Histoire aux tons immenses caracole en palais

 

Quand tant de valses folles y déclinent bonheur.

Les Schnitzel et les Würstel, aux parfums éternels,

Font réponse aux beaux-arts de leurs appâts charnels. 

PS :Je vais aussi, délibérément, éviter les sujets politiques durant ces petits instantanés de voyage… Oui, je le sais, la peste brune a de nouveau ravagé le pays, mais d’une part je ne souhaite pas ici relayer des éléments concernant les dernières élections mais au contraire prendre de la hauteur, et d’autre part je sais qu’à Vienne, justement, la population est encore éclairée et non hostile aux Migrants.

http://www.stadt-wien.at/wien/touristinfo.html

https://www.viennapass.fr/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mozartkugel

http://www.lugeck.com/

https://www.bitzinger-wien.at/

https://www.eis-greissler.at/unsere-laeden/innere-stadt/

NB: crédits  photos Sabine Aussenac et Sylvan Hecht.

 

 

 

 

 

Il me faudrait mille ans…

Bigăr Waterfall Caras Severin, Roumanie

https://www.youtube.com/watch?list=UUFdl9eVjbA5839cwS_CSYWA&v=AtCBE6UiQs0

Il me faudrait mille ans.

Pour rester une enfant et devenir adulte, pour vivre intensément et être catapulte, pour savoir la douceur d’un couchant apaisé, découvrir la Toscane ou avoir mes bébés.
Comment faire le tour de cette vie immense, comment trouver le temps des danses et décadences, être mère et amante, lire Dante, prendre tous ces trains et les avions qui chantent ?

Frissonner au matin lorsque le jour poudroie, marcher en toute neige et ne pas avoir froid, savoir faire du feu et les tartes aux groseilles, comprendre le chinois et le vol des abeilles ; jouer du clavecin, et puis du violon en un bal en Irlande, découvrir les sonates et rester la rockeuse de diamants, hésiter entre arpèges et soirées de défonce. Comment apprivoiser cet infini qui gronde, ce tsunami du temps, cette mort par seconde ?

Il me faudrait mille ans.

Pour lire tous les livres, parler les langues anciennes, me faire ballerine et me mettre en cuisine, pour aller au Pérou ou aux confins des mondes, pour aimer tous ces hommes au regard d’amadou, ou bien un seul amour que je rendrais si fou.

Je ne veux renoncer à l’appétit intense, je suis celle qui dit et qui vibre et qui danse, je me veux courtisane et amie et infante, je ne veux pas choisir.
Quand je ferme les yeux parfois je revois ces rayons de lumière où dansaient si graciles les infinies poussières. Je me sens particule élémentaire, de ma propre existence à peine locataire. « Si Dieu me prête vie » me disait ma grand-mère…Si Dieu me prête vie je n’aurais pas assez de ce temps dévolu pour aimer assez bien tous mes frères ici bas, et l’indienne en sari et le clochard d’en bas, pour adopter chinoise jetée aux détritus, pour élever mes enfants au regard ingénu, pour aider mes amis en chaque coin de rue.

Comment trouver la route ? Eviter nos déroutes ? Est-ce que j’aime Brahms ? Pourquoi dois-je choisir entre Bach et Johnny, pourquoi ne puis-je être Janis et Dame de Fer, mettre un jour un tailleur le lendemain pattes d’eph ? Pourquoi choisir la route et grandes découvertes plutôt que coin du feu et cultiver ma vigne ?
Quand aurai-je le choix ? Je me voudrais sereine et vraiment accomplie, je ne suis que vilaine aux sabots d’infinis, jamais en paix des braves, toujours dans la bravade et l’éternel regret…

Il me faudrait mille ans.

Pour donner naissance et allaiter bébés, pour écrire mes livres et ne pas renoncer. Découvrir Mexico et tous les Béguinages, adorer les Buddhas et prier en couvent, et puis manifester et taguer le réel, m’engager me mouiller me retrousser les manches, aider les sans papiers scier les vieilles branches, goûter tous mes fantasmes, oser en rire enfin, et revoir tous les films et relire tout Proust.

Parcourir la Bretagne aller à Compostelle, construire ce chalet et restaurer la grange, planter les ipomées élaguer ce vieux chêne apprendre à faire la sauce et rester mince toujours. Pour aller en Floride et aussi à Big Sur, écouter l’opéra mais danser sur les Stones, pour ne pas oublier la jeune fille en fleur qui jamais ne voulait perdre sa vie à la gagner, pour l’enfant que j’étais si tendre et si fragile, pour la femme accomplie qui choisit ses amants, pour l’aïeule à venir qui fera confitures, ou plutôt comme Maude saura parfum de neige…

La liberté d’une île. Le désert des tartares. Les grandes pyramides. Les lagons les Grands Lacs le Mont Blanc et les chutes, ma vie me bouscule comme en Niagara, et je roule aveuglée par mes rêves en défaite ne pouvant renoncer à ce sens de la fête. Mon rêve familier me hante en comète explosive, c’est celui d’une pièce inconnue découverte en mes murs, et je crie et je chante en découvrant heureuse comme une constellation, nouvelle Belletégueuse, et je parcours la pièce en m’y rêvant joyeuse…Au matin de ce rêve récurrent et magique, je me vis en futur et me sais à venir.

Il me faudra mille ans.

Pour enfin parcourir les couleurs de la terre, connaître les musées et les peintres et leurs cieux. Pour oser m’envoler sans parcours ni repère, pour faire les bons choix en agaçant les Dieux, pour ne plus regretter, pour enfin m’apaiser, pour te surprendre un jour quand tu auras grandi et aller à nos noces en robe d’organdi, pour en rire avec toi en nos folies ultimes, pour aller tout de go aux confins des ultimes, pour devenir sérieuse et ne plus m’affoler, pour me faire hirondelle comme on construit l’été. J’apprendrai la patience.

J’aurai mille impudences mais serai respectée, on lira mes intenses et je serai aimée. J’aurai droit à la plage sans me sentir coupable, et tous les murs brisés de forteresse ancienne auront capitulé devant un amour vrai.

Ce sera mon noël et mon temps des cerises, ma cité de la joie bruissera de cigales, tu m’attendras debout en aimant mes silences et ne m’accuseras pas de te faire une offense.

Il y aura les voyages et le retour au port, et l’odeur des vendanges en éternel retour, et les mots ribambelles et les cœurs paradis : séculaire et légère, elle sera l’heure exquise.

Sabine Aussenac.

http://www.sabineaussenac.com/