Une rencontre entre autrices d’#Occitanie #8mars #Toulouse: récit et bilan!

(Photo extraite de la lettre de Convergencia Occitana)

Ce fut beau, sororal, puissant, engagé, lumineux, profond, vibrant, intime, international, et c’était à l’image de notre ville rose! Nichées dans l’antre chaleureux et chargé d’histoire de l’Ostal, les personnalités des unes et des autres ont pu à la fois démonter leur ancrage dans ce terroir occitan si fécond et leurs envols respectifs vers l’Universel, puisque la magie de ce moment de partage s’est aussi exprimée dans les multiples passerelles entre les mondes: nous avons pu croiser littératures et Histoire, géographies et langages, sororités et fraternités, arts et Nature, et nous n’étions pas, loin s’en faut, dans un simple entre-soi toulousain ou occitan.

Car la beauté des régionalismes réside aussi dans les ouvertures qu’ils procurent, comme autant de méridiens et de passages: c’est ainsi que chaque intervention en a appelé une autre, en un ballet des passages de relais, entre un « private joke » au sujet de nos attaches respectives autour du Gers ou de la ville de L’Union et de multiples chiasmes entre les parcours, les engagements et les objectifs.

Les autrices, un peu floues mais bien présentes! Crédit Convergencia Occitana.

C’est l’essayiste Chantal Armagnac qui a ouvert le bal après la riche présentation de la rencontre par la très dynamique Florence Ginisty, avocate au barreau de Toulouse et très engagée dans le monde associatif. Chantal Armagnac a régalé le public, au demeurant formidablement constitué non pas seulement de femmes et/ou de féministes, mais d’un beau panel de parité, car les messieurs étaient eux aussi présents en nombre, d’extraits de son ouvrage sur le pastel, mettant en lumière le parcours de la Belle Paule et son destin d’égérie de la beauté condamnée à un rôle représentatif, un peu comme le sont certaines stars actuelles, puisque cette idée que beauté et intelligence n’iraient pas de pair a encore la vie dure… Si les lectrices et lecteurs ne connaissent pas le pastel, cette étrange plante à la floraison jaune qui offre de si extraordinaires nuances de … bleu, je les invite à en savoir plus!

Liens vers les ouvrages de cette autrice:

  • Les Couleurs de ma Gascogne, Éditions Grand Sud Albi Rouge, 2011, Jaune 2012, Bleu 2015
  • Le Pastel en Pays de cocagneÉditions Bleu Pastel Albi, 2016, réédité et actualisé en 2022
  • L’Oeuvre au BleuÉditions Un Autre Reg’Art, Albi, 2023

https://www.ladepeche.fr/article/2016/11/16/2459244-decouvrir-le-pastel-avec-chantal-armagnac.html

https://fr.wikipedia.org/wiki/Belle_Paule

http://www.lauragais-patrimoine.fr/PATRIMOINE/PASTEL/PASTEL01.htm

Instagram de Florence Ginisty:

https://www.instagram.com/florenceginisty/

Anne-Pierre Darrées nous a ensuite exposé son passionant parcours d’éditrice, insistant sur les lacunes culturelles qui l’ont conduite à promouvoir les présences et plumes féminines et à permettre de multiples publications aussi passionnantes les unes que les autres. Poésie, récits, essais, les paroles de femmes se libèrent grâce aux éditions Reclams! Anne-Pierre insistera sur le fait qu’encore aujourd’hui, les femmes parfois manquent de confiance en elles, écrasées par les millénaires de patriarcat, et son parcours international lui confère, c’est certain, une belle légitimité, puisqu’elle a été représentante de femmes à Bruxelles et engagée dans le groupement WIN. Elle aussi fédère, rassemble, organise des rencontres: à plusieurs, on est plus fort.es!!! Pour en savoir plus, le lien vers le podcast se trouve plus bas!

  • Edicions Reclams, 31800 Landorthe
  • Productions d’autrices :
    • Les anthologies :
      • Paraulas de Hemnas, 35 poetessas occitanas (épuisé), 2020
      • Tien-te fièra, creatoras occitanas (sortie fin 2025)
    • Les livres pour adultes
      • Fabienne Vayrette-Péchali, E víver,  2024
      • Adeline Yzac, Quò’s pas per res,  2022
      • Danièle Estèbe-Hoursiangou, La murèna atendrà,  2022
      • Maëlle Dupon, Vènus a l’escorpion,  2022
      • Cerc literari La Musnegra (5 autoras, 4 autors), Tempèsta d’enlà, 2025
      • Anne-Pierre Darrées, L’Astarac, l’âme paysanne (introduction à la culture astaracaise), 2025
    • Jeunesse
        • Anne-Pierre Darrées, Ercules l’iniciat, 2021 et 2024
        • Aure Séguier, Rodeo preïstoric,  2023
        • Aure Séguier, La fugida de la guerrièra, 2025
    • Enfants
      • Eva Cassagnet, Paraulinas,  2023
      • Eva Cassagnet, L’ors e las sasons,  2024
      • Eva Cassagnet, Lo camparòu, 2025

https://www.wincommunity.org/

La voix douce et forte de Fabienne Vayrette a tout naturellement pris le relai, puisque cette autrice de fictions, de contes et de nouvelles est justement éditée par Reclams… Quelle sarabande métissée que ce récit qui, en occitan, nous emporte à Moscou, dépeignant le combat d’une certaine Anna contre la guerre… Comme il est étrange pour le cerveau de faire le lien entre notre langue d’Oc, si ancrée dans son territoire ancestral, et le monde lointain, aux confins de l’Oural, et comme il est puissant, ce sentiment de sororité entre les femmes de tous les pays… J’ai pour ma part, en écoutant le récit d’Anna la Moscovite et de sa pancarte contre la guerre, pensé à Anna Politovskaïa, la journaliste assassinée, à Anna Akhmatova, la poétesse russe si libre, et à Marina Ovsiannikova, cette journaliste qui a brandi la pancarte « No war », défiant le régime…

https://www.reclams.org/fr/catalogue/produit/192-e-viver

https://www.lisez.com/livres/no-war-lincroyable-histoire-de-la-femme-qui-ose-sopposer-poutine/9782809847789

La périgourdine Cecila Chapduelh, artiste polylatentueuse puisqu’à la fois poétesse et chanteuse, chroniqueuse et doubleuse de films, mais aussi artiste plasticienne car intégrant la dentelle et le tissu à des livres d’artistes, nous lira ensuite de la poésie, enchantant l’auditoire par sa passion de la culture occitane. Inspirée par le poète provençal Max-Philippe Delavouët et ayant baigné dès l’enfance dans cette langue qu’elle manie avec brio, elle va nous ravir en listant des répliques entre homme et femme issues de la littérature orale et poétisées. Cecila, couseuse de mots, dentellière féministe, manie la langue occitane avec humour et brio!

  • Mina de plomb, mina de ren/ Mine de plomb, mine de rien (Montpeiros, Éditions Jorn, 2023) 
  • Volutas (2020)
  • Contribution aux anthologies
    • Paraulas de hemnas (coordination de Paulina Kamakine, éditions Reclams, 2020)
    • Par tous les chemins, florilège des poésies en langue de France (coordination de Marie-Jeanne Verny et Norbert Paganelli, éditions Au bord de l’eau, 2019) 
  • Alimentation de la rubrique « Per la veirina entreduberta » de la revue Lo Diari 
  • A chara o crotz/À pile ou face (Éditions Lo Chamin de Sent Jaume, 2015)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Max-Philippe_Delavou%C3%ABt#:~:text=Max%2DPhilippe%20Delavou%C3%ABt%2C%20ou%20Mas,d’expression%20proven%C3%A7ale%20et%20fran%C3%A7aise.

Ce sera ensuite au tour de la chercheure Martine Boudet, coorganisatrice de la rencontre, essayiste autonomiste, altermondialiste spécialiste d’éducation inclusive et du patrimoine occitan, animatrice d’un blog, se situant au carrefour de « la France » et de l’Occitanie puisqu’originaire de Limoges, au nord de notre région, et aussi professeure de Lettres Modernes, de passionner l’auditoire: elle insiste sur cette bi culturalité et va nous lire un extrait de sa dernière publication, « L’emblématique des régions de France », un ouvrage qui va analyser différents symboles autour de cette idée de nation tout en décryptant les différences coercitions liées au pouvoir, toujours dans la perspective d’une lutte contre l’hégémonie culturelle.

  • L’emblématique des régions de France (Paris, Panthéon, 2023) –Avec le soutien de l’université Paris-Cité
  • Les langues-cultures moteurs de démocratie et de développement (direction, Le Croquant, 2019). Participation de la DGLFLF/ Direction de la langue française et des langues de France
  • Les hymnes et chants identitaires du grand sud (Toulouse, IDECO, 2009) – Primé aux jeux floraux de 2010
  • Les femmes et le féminin en terre d’Oc et au Félibrige (co-direction, Éditions du Félibrige, Aix-en-Provence, 2023)
  • Blog « Parité occitane »

Voilà donc le podcast de ce début de rencontre, grâce au remarquable travail de radio Ter et au travail du magicien des sons, Manu!

La deuxième partie de la rencontre sera consacrée aux solidarités, en intégrant les interventions de femmes ukrainiennes et kurdes. Florence Ginisty passe donc tout d’abord le micro à Oxana Conor, présidente de l’association Ucraïna en Occitània, une organisation qui travaille en lien étroit avec la Maison de l’Occitanie. Il reste environ 400 réfugiés ukrainiens en ville rose sur les quelques 2400 personnes ayant fui les combats, et des liens se sont tissés entre les deux cultures: Oxana pratique par exemple la danse occitane, qui lui rappelle les danses traditionnelles. Elle va nous interpréter un chant du XVe siècle dans sa langue et proposer à la vente de superbes foulards portés par les femmes de son pays, que l’association ramène lorsqu’elle rentre de ses missions humanitaires.

https://www.facebook.com/sabine.aussenac/videos/1867195190774045

https://www.ladepeche.fr/2023/08/05/a-la-rencontre-de-lukraine-en-musique-sur-le-marche-11379925.php

https://www.ladepeche.fr/2025/02/23/les-dons-ont-cesse-les-esprits-se-sont-eloignes-a-toulouse-lassociation-ucraina-lutte-pour-la-memoire-avec-les-foulards-des-grands-meres-12515212.php

Florence va ensuite présenter l’association des femmes kurdes, située à l’Union, et l’une des représentantes, vêtue avec une autre jeune femme d’une superbe tenue traditionnelle, va faire un magnifique récit au sujet des luttes des femmes kurdes, souvent exilées. Elle nous parlera des combats du Rojava et de tous les bouleversements qui se succèdent depuis des décennies dans cette région. Le rôle des femmes est d’autant plus essentiel que certains villages sont portés à bout de bras par des communautés féminines. Elle nous dira aussi son inquiétude vis à vis du nouveau régime syrien, et citera bien sûr « Femmes, vie, liberté, car tous les combats se rejoignent en ce sens!

TOULOUSE. rencontre avec Somayeh Rostampour autour de son livre "Femmes en armes, savoir en révolte : du militantisme kurde à la Jineolojî", paru aux éditions AgoneRDV le 20 juin 2025 à 19hTerra Nova18 rue Gambetta31000 TOULOUSE

Kurdistan au féminin (@femmeskurdes.bsky.social) 2025-03-23T09:43:39.024Z

Béatrice Dillies, grand reporter à la Dépêche, prendra ensuite tout naturellement la parole au sujet de son livre autour du Kurdistan. Elle fera donc le lien avec les récits des femmes kurdes en parlant de la voix brisée du peuple kurde, le plus grand peuple du monde sans état, en évoquant entre autres la langue « empêchée », ce qui nous rappelle l’occitan que l’on a aussi interdit de parler à nos grands-parents lorsqu’ils étaient à l’école… Elle nous raconte ce peuple, à la culture musicale et poétique si riches, ses combats contre les dictatures, et cette voix que l’on a tentée d’effacer par de multiples génocides, par des viols comme arme de guerre, et nous lira un extrait puissant de son ouvrage au sujet des mères dénommées les « mères lionnes » et du massacre des « 8000 de Barzan ».

  • Un génocide oublié-La voix brisée du peuple kurde (Récit), Paris, L’Harmattan, 2023

https://www.institutkurde.org/info/il-y-a-38-ans-la-deportation-et-le-massacre-de-8000-barzanis-1232552070

J’aurai ensuite la joie de présenter Rose Ausländer, une grande poétesse allemande originaire de la Bucovine, une région aujourd’hui située en Ukraine, à laquelle j’ai consacré un essai en 2022 paru aux éditions du Bord de l’Eau, poétesse que je traduis et qui est au centre d’un roman en cours d’écriture, « Rose, entre le ciel et ici ». Je vais lire un passage de mon essai où je parle de la langue allemande que la poétesse avait sciemment « oublié » après la Shoah, le ghetto et durant son exil, avant de la retrouver en résilience.

Voilà la suite du podcast de la rencontre par radio Ter:

Après une pause passionnante où l’auditoire a pu échanger avec les autrices, feuilleter et acheter nos livres et se réjouir de la beauté du lieu, la rencontre a repris avec l’émouvante voix d’Élodie Lousteau, poétesse et chanteuse d’origine basque, spécialisée dans les chants anciens. Elle nous chantera a capella un superbe chant grec et nous lira un extrait bouleversant de son ouvrage Cracher le silence. Elle nous explique s’être aussi intéressée à la langue avec sa grand-mère qui perdait la mémoire, creusant l’intériorité d’une personne malgré les absences. Elle explore ainsi les méandres de la maladie d’Alzheimer au travers de la poésie.

  • Cracher le silence, éd. Rosa Canina, 2023 
  • S’effacer, éd. Encres vives, 2017

https://www.facebook.com/sabine.aussenac/videos/3980637432182403

Enfin, en apothéose de notre belle rencontre et en miroirs de toutes les paroles et chants de femmes, c’est la trobaïritz et barde Estella du Val qui va interpréter plusieurs chants, s’accompagnant au tambour. Ayant étudié de nombreux styles musicaux, avec une réflexion approfondie autour de la condition féminine, la chanteuse ravira la salle avec sa voix intense et son interprétation singulière.

https://www.facebook.com/sabine.aussenac/videos/664714666017581

https://www.instagram.com/estella_du_val_diodoryza/

https://www.facebook.com/people/Estella-Du-Val/100015627755235/?_rdr

Voilà enfin le dernier podcast de la rencontre:

Et en bonus un lien vers différentes interviews d’autrices par radio Occitania:

https://www.podcastics.com/podcast/episode/rencontre-avec-les-autrices-occitanes-a-lostal-doccitania-353494/

Pour terminer: le résumé en occitan du Journalet!

https://www.jornalet.com/nova/23034/tolosa-rescontre-literari-per-donar-visibilitat-a-las-autoras-occitanas

Rencontre cultural e literari « Promocion de las femnas d’Occitània »                  Rencontre culturelle et littéraire « Promotion des femmes d’Occitanie,  organisée par la fédération Convergencia Occitana, la librairie La Tuta d’Oc  (IEO31), Radio Occitania, Radio Ter, le journal en ligne Jornalet, les associations « Nos conversations » et Ukraina en Occitanie, ainsi que le restaurant A Taula, le samedi 8 mars 2025 à l’Ostal d’Occitania (TOULOUSE)

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Une rencontre entre autrices d’#Occitanie #8mars #Toulouse

Quelle belle idée que de réunir des autrices autour de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes et de la culture occitane! Pas peu fière d’y avoir été conviée! L’événement, organisé à l’initiative de la dynamique Martine Boudet, de Convergéncia Occitana et de La Tuta d’Òc, sera riche en émotions.

Nous nous rencontrerons dans l’enceinte du magnifique Ostal d’Occitanie, le 8 mars, de 16 à 19 heures, pour échanger au gré de lectures et d’interventions. Il y aura la possibilité d’acheter nos ouvrages, et je me ferai une joie de dédicacer mes Mémoires d’Autan et mon essai sur Rose Ausländer.

Quelle joie que d’être associée à ces sœurs en écriture… Notre région foisonne de talentueuses plumes féminines qui, au gré des siècles, ont laissé leurs empreintes au gré de leurs engagements littéraires! Des Trobairitz et de Clémence Isaure à nos jours, en passant par Eugénie de Guerin, Sabine Sicaud ou Louisa Paulin, la poésie féminine a toujours résonné en nos belles contrées méridionales. Et les romancières, essayistes, dramaturges et chercheuses ne sont pas en reste, comme la rencontre de samedi nous le prouvera.

Il est si important de continuer à nous mobiliser, femmes et hommes de bonne volonté, ENSEMBLE, pour les droits des femmes et contre les inégalités de genre! Dans tous les pays du monde, ces droits, quand ils ne sont pas carrément foulés aux pieds, demeurent fragiles et à reconquérir chaque jour… Nous, autrices d’Occitanie, souhaitons porter haut et fort nos voix plurielles pour que dans les domaines de la littérature, de l’édition, de la recherche, nous puissions les faire entendre.

Que de combats à mener, entre les violences faites aux femmes qui ne diminuent pas, loin de là, les féminicides, le plafond de verre, la charge mentale, les inégalités salariales, les inégalités face à la prise en charge de notre santé, le droit des femmes à disposer de leur corps… Et je pense aussi très fort aux femmes iraniennes vilipendées et assassinées pour le non port du voile, aux femmes afghanes qui ne disposent même plus du droit à la lumière puisque le gouvernement a décidé de murer leurs maisons, aux femmes ukrainiennes en proie à la guerre, aux femmes palestiniennes qui ont tant souffert des bombardements et aux femmes juives assassinées ou prises en otages le 7 octobre…

Le chemin sera long, il est urgent de l’emprunter pour faire bouger les lignes!

Venez en nombre! Ce sera un beau moment non seulement entre autrices d’Occitanie, mais entre gens de cœur, et on y parlera de condition féminine, d’égalité et de vie culturelle et sociale occitane! Chantal ARMAGNAC, Martine BOUDET, Cecila CHAPDUELH, Anne-Pierre DARRÉES, Béatrice DILLIES, Élodie LOUSTAU et Fabienne VAYRETTE vous attendent!

Voici les informations autour de l’événement.

Je vous incite à parcourir l’annonce de la rencontre en cliquant ci dessous sur le lien – si vous le consultez depuis un ordinateur il y a une jolie animation dynamique, et depuis le smartphone il faut descendre après l’annonce bilingue pour trouver les autrices) en suivant le lien ci-dessous et à découvrir les liens des différentes autrices. Le second lien vous dirigera aussi sur l’Ostal.

  • 08/03
  • 16h
  • Ostal d’Occitania
  • 11 rue Malcousinat (Tolosa)
  • Gratuit
  • Organizacion : Convergéncia Occitana, Martine Boudet, La Tuta d’Òc

Pastorada del cèl

La poësia
es lutz e dança,
palomba dins la nuèit,
revolum del cant de las fuehlas,
terra nòstra e vin d’alegrança,
sosc inatengible dins la votz d’amor.

La poësia
es crit de revòlta que canta
come los ausels,
ama de fuòc sacrat,
breçairòlas del lop e croisada de la colomba,
raives de las montanhetas,
luna e esteletas : pastorada del cèl.

La poësia
es lo silenci de fum,
la Menina e l’ostal, sorga e fòrça,
alas blancas, e aigueta que camina sus
mon còr.
***

La pastorale du ciel

La poésie
c’est la lumière et la danse,
palombe dans la nuit,
tourbillon du chant des feuilles,
notre terre et vin d’allégresse,
songe inaccessible dans la voix d’amour.

La poésie
c’est un cri de révolte qui chante
comme les oiseaux,
âme du feu sacré,
berceuses du loup et croisade de la colombe,
rêves de petites montagnes,
lune et étoiles: la pastorale du ciel.

La poésie
c’est le silence de la brume,
la grand-mère et la maison, source et force,
ailes blanches, et eau vive qui chemine sur
mon cœur.

Je reproduis directement le texte bilingue ici:

 » Convergéncia Occitana & La Tuta d’Òc vous invitent à une rencontre culturelle et littéraire pour la promotion des femmes d’Occitanie, à l’occasion de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes le 8 mars 2025.
Huit autrices (Chantal Armagnac, Sabine Aussenat, Martine Boudet, Cecila Chapduelh, Anne-Pierre Darrées, Béatrice Dilliès, Élodie Lousteau, Fabienne Vayrette) seront présentes pour vous présenter leurs ouvrages, lire des poèmes et des extraits d’œuvres, interpréter des chants, … Les échanges continueront avec un débat sue l’histoire et l’actualité de la condition féminine en Occitanie et une séance de dédicaces et d’entretien radiophoniques, le tout avec l’animation de Florence Ginisty, membre de Convergéncia Occitana.

Évènement porté par Martine Boudet, avec l’aide des associations Convergéncia Occitana & IEO 31 / La Tuta d’Òc

**

Convergéncia Occitana & La Tuta d’Òc vos convidan a un rencontre cultural e literari per la promocion de las femnas d’Occitania, a l’escasença de la jornada internacionala de lucha pels drechs de las femnas lo 8 de març de 2025.
8 autoras (Chantal Armagnac, Sabine Aussenat, Martine Boudet, Cecila Chapduelh, Anne-Pierre Darrées, Béatrice Dilliès, Élodie Lousteau, Fabienne Vayrette) seràn presentas per vos presentar lors obratges, legir de poèmas e d’extraches de libres, interpretar de cants, … Los escambis contunharàn amb un debat sus l’istòria e l’actualitat de la condicion femenina en Occitania e una sesilha de dedicaças e d’entretens radiofonics, lo tot amb l’animacion de Florence Ginisty, sòcia de Convergéncia Occitana.

Eveniment portat per Martina Boudet, amb l’ajuda de las associacions Convergéncia Occitana & IEO 31 / La Tuta d’Òc

Informacions practicas :
Aperitiu dinatòri pagant sus plaça (sus reservacion, restaurant A Taula) »

Toulouse l’Andalouse #canicule en #poésie #été #Occitanie

(Sonnet caniculaire…)

Toulouse l’Andalouse

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Un éclat de mica qui brille sur Garonne,

Les eaux comme orphelines ont grand soif de glaciers.

Brique en feu hébétée de la folie des hommes,

En miroir des fournaises où les tuiles mariées

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À lumière aveuglante semblent ciel asséché.

Saint-Sernin carillonne, son appel tel un glas…

Le Capitole brûle, grand oiseau affolé,

En Jacobins déserts le palmier parle bas.

**

Toulouse l’Andalouse n’en peut plus de l’été,

Elle suffoque elle gémit elle quémande pitié !

Au Canal les platanes perdent déjà couronne…

**

Rendez-nous l’allégresse de nos enfances enfuies,

Menthe à l’eau et piscine, les grillons dans nos nuits…

Nous devons solidaires stopper folies des hommes !

**

(Haiku)

**

ville rose a chaud

Dame Garonne meurt de soif

Capitole étouffe

(Poésie contemporaine)

Coudre mémoires des soleils

**

Épure des soifs

été obsolescent

**

Au Capitole en irradiance

coudre mémoires des

soleils d’antan

**

Ombre absente

joue à colin-maillard

**

Terre insulaire de

Garonne au lit défait :

Toulouse Andalouse

assassinée

(Prose)

Je voudrais qu’on me rendre l’été

D’aussi loin que je me souvienne, à Toulouse, en été, il fait chaud ! Mille rayons de soleils fous habitent ma mémoire…
« Mais quel cagnard!/ Punaise, ça tape!/ Mets ta casquette, pitchoun, tu vas te prendre une insolation!/ … »

Oui, dans le Sud-Ouest, en été, il fait chaud ! J’ai grandi à Albi, et porte encore en moi le souvenir de cet été 76 où, rentrant d’un séjour en outre-Rhin, nous fûmes horrifiés par la pelouse jaunie et par les dahlias racornis… En été, disait ma grand-mère paternelle, on se tient à l’ombre. Me reviennent non seulement ces sensations de touffeur absolue en mettant le nez dehors au zénith, mais aussi cette agréable fraîcheur des cours des vieilles maisons, de cette ombre bienfaisante entre un catalpa et des hortensias au bleu intense… Une ou deux chaises de jardin un peu écaillées, les graviers qui crissent, odeurs de mousses, presque sylvestres : malgré les fortes chaleurs, se sentir bien, apaisé…

Avant d’arriver à notre maison de campagne, nous nous arrêtions parfois au café du village voisin. Parfum unique de cette grenadine ou de la menthe de l’enfance, vacarme des chutes de la rivière proche, canopée immense des tilleuls… Même aux heures chaudes du midi, on pouvait rester dehors, à l’abri des tonnelles… D’ailleurs, nos mères cuisinaient, des ratatouilles qui mijotaient longuement, et nos pères attisaient les braises du barbecue, en ces temps où l’on ne se pâmait pas encore devant des soupes froides et du tofu…

Oui, il faisait chaud ! Mais pas trop pour passer des heures entières le long du ruisseau qui demeurait glacé, à y bâtir moulins et barrages, les jambes bardées de nos méduses transparentes ; pas trop pour aller en expédition familiale à la rivière, pour s’y baigner malgré les anguilles et les vasières, pour y pêcher le goujon ; pas trop pour aller cueillir des bassines entières de mures, ou de prunes, ou d’abricots, dont nos mères faisaient, malgré la chaleur, de goûteuses confitures ; pas trop pour lire, allongés sur des lits de camp de camping, avant de disputer d’interminables parties de Monopoly ou de faire tourner Jean Ferrat sur l’électrophone.

Plus tard, ayant troqué le Tarn pour « ma ville », Toulouse, dans mon premier appartement du quartier des Chalets, l’astre était en contact direct avec notre vie de jeunes mariés, en ces années quatre-vingt où même les ventilateurs semblaient objet exotique, que l’on rencontrait dans des films dépeignant de poisseuses chaleurs amazoniennes… Depuis les trois vasistas, la lumière aveuglante faisait de nos aubes, déjà, des fournaises… Nous vivions à l’espagnole, dînant tard, puis sortant arpenter la place Saint-Sernin ou marcher vers Garonne, nous enivrant d’hirondelles.

Les étés d’Occitanie ont toujours été baignés de cette indicible lumière, aussi éclatante que celle que Cézanne peint sur Sainte-Victoire, aussi irradiante que les ors toscans… Toulouse l’Andalouse adorait ses étés de plomb, sa brique accueillant cette chaleur estivale en osmose parfaite. Car les nuits permettaient de reprendre son souffle, et puis on savait « tenir le frais » en fermant les persiennes et les volets. Rouge fier des tuiles et des briques rouges du Midi chères à Claude, bleu perçant d’un ciel infini qui promettait la Gascogne ou la mer, Toulouse chavirait de chaleur mais ne pliait pas.

Mais ça, c’était avant. Car notre belle ville rose, à présent, suffoque littéralement, accablée par un soleil torride. Bien sûr, la région a pour le moment été épargnée par les terribles feux dévastateurs qui embrasent la Gironde et la Bretagne, Toulouse a simplement très chaud. Mais cette chaleur est anormale, terrible, suffocante. Les organismes sont épuisés par les vagues successives de ce que l’on nomme à présent canicule…

Et comme il est paradoxal de vivre dans l’obscurité, de se terrer dans les pénombres où halètent poussivement les ventilateurs, de se cloîtrer dans nos intérieurs étouffants alors qu’au-dehors explose la lumière estivale ! Cette nuit permanente me donne l’impression de vivre aux alentours du cercle polaire, dans quelque contrée où seules les aurores boréales éclairent encore les cieux gelés… J’ai soif de vie, d’eaux étincelantes en rivières chantantes, de reflets sur les vagues, d’iridescences dans les sous-bois, quand le soleil darde à travers des futaies pour éclairer les fougères, j’ai faim de ces petits matins doux quand on va à la fraîche chercher le pain et les croissants, de ces après-midis où, alanguis, les vacanciers se balancent dans un hamac, bercés par les stridulations des cigales, les yeux éblouis de beautés.

Je voudrais qu’on me rende l’été.

A l’abric de la cançon de junh #poésie #occitan #Occitanie #juin #littérature #JeuxFloraux #printemps #déconfinement

A l’abric de la cançon de junh

Al bòrd del cèl,
a l’abric de la cançon de junh,
la meuna anma canta coma los ausèls
e dança la ròda dins l’ombrum.

Aquel camin, que nos fa tornar a la sorga,
non es que cant d’amor,
fresinament d’alas e patz eternala,
ostalada e baudor.

(en occitan, ma langue d’oc…)

À l’abri de la chanson de juin

Au bord du ciel,
à l’abri de la chanson de juin,
mon âme chante comme les oiseaux
et danse la ronde dans l’ombre.

Ce chemin, qui nous fait revenir à la source,
n’est que chant d’amour,
frémissement d’ailes et paix éternelle,
maisonnée et allégresse.

Ce texte fait partie des « Mémoires d’Autan », ouvrage ayant reçu le Prix Camille Pujol lors des Jeux Floraux toulousains de 2020.

http://jeuxfloraux.fr/15.html

« * Une médaille d’Académie égalementà Mme Sabine Aussenac, de Toulouse,  pour son poème « Et les pivoines »

  * Le Prix Camille-Pujol à Mme Sabine Aussenac, de Toulouse, pour son ouvrage Mémoire d’Autan. »

https://www.thebookedition.com/fr/memoires-d-autan-p-371712.html

Mes Mémoires d’Autan sont des miscellanées poétiques entremêlées de réflexions autour de l’être-soi d’un Sud-Ouest baigné par l’Atlantique et Mare nostrum, illuminé par nos campagnes gorgées de tournesols, et bien sûr surtout, pour moi, toulousain et tarnais ; alternances de nouvelles, d’essais et de poèmes en ancrage de cette terre d’Oc qui m’est chère, ces textes vivent au gré des méandres de Garonne et de l’Histoire ancienne ou contemporaine de la Ville Rose et du Grand-Sud…

El d’Artagnan! #VicFezensac #Pentecôte #Férias #coronavirus #corrida #Gers #Prixlittéraire #Hemingway

Cette nouvelle, qui avait été écrite lors de ma première participation au Prix Hemingway, avait aussi été publiée dans le Huffington Post en 2012. Je la reposte en hommage à cette Féria de « Pentecôte à Vic » qui n’a pas eu lieu cette année… Et aux communautés gitanes du monde entier!

https://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/el-dartagnan-feuilleton-ete-_b_1745234.html

https://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/el-dartagnan-la-suite_b_1767229.html

Vic-Fezensac, juin 2011.

Des coquelicots. Rouges, bien sûr. Elle en avait rêvé toute la nuit, et elle savait pourquoi. Rouge, la couleur de la muleta. Rouge, la couleur du sang. Rouge, la couleur de la corrida. De cette corrida qui revenait, elle aussi, chaque nuit dans ses rêves.
Maria marchait le long de la route poussiéreuse et souriait. Le bus l’avait déposée non loin de la place principale, et elle allait passer sa soirée à servir des mojitos et des pastis à ces hommes un peu frustes, mais qui respectaient cette jeune fille qui venait tous les week-ends d’Auch pour gagner trois francs six sous et aider sa famille. Maria logeait au camping des bords du Gers, avec deux autres familles roms, originaires, elles aussi, d’Andalousie. Car les parents de Maria et sa grand-mère tentaient de se fixer dans le Gers pour soigner la lourde maladie de Pablo, son petit frère de onze ans. La route leur manquait, mais la santé de Pablo primait sur tout le reste. Les enfants étaient scolarisés, et Pablo, suivi à l’hôpital des enfants malades de Toulouse, surmontait lentement sa leucémie.

Maria vit l’affiche sur la porte du bar, et faillit tomber à la renverse. « Pentecôte à Vic : la Corrida du siècle ! » La photo datait de quelques années, montrant Antonio Ibáñez, alors jeune prodige des arènes, posant fièrement avec les représentants de l’empresa vicoise, avec le maire et l’équipe des organisateurs, dont elle connaissait à présent les visages. Beaucoup étaient des habitués du bistrot de Paulo. C’était lui ! C’était lui, Antonio, qu’elle voyait chaque nuit, lui avec qui elle passait des heures éblouissantes, dont elle rougissait au matin. Cette bouche avait effleuré son sexe longuement, ses mains l’avaient transportée de la poussière d’une arène aux soieries d’un lit, et elle connaissait chaque cicatrice de la peau ambrée du jeune homme, même celle sise à hauteur de la cuisse, celle où Maria posait sa bouche qu’elle faisait ensuite, très doucement, remonter vers…


La porte s’ouvrit, et le vieux Marcel sortit en rigolant de toute sa bouche édentée :
– Hé bé la pitchounette, c’est le cagnard du mois de juin qui te rend toute chose ?
Les rires fusèrent, mais Paulo, le patron, le béret vissé sur la tête, rabroua sa clientèle. Il l’adorait, sa petite serveuse, et elle était aujourd’hui comme sa fille, puisque lui et sa femme l’avaient prise sous leur aile, depuis leur rencontre dans un couloir d’hôpital, avant la guérison de leur Julie.
Maria fila derrière le bar, ses rêves de la nuit refoulés en catastrophe, et commença à servir les habitués et les touristes, de plus en plus nombreux en cette veille de week-end de Pentecôte. On arrivait de loin pour parcourir la petite cité gasconne, réputée pour cette féria printanière, et, même si certains la décriaient come une monstrueuse beuverie, elle n’en conservait pas moins un caractère festif et particulier. On attendait plus de 120 000 personnes pour ce beau week-end de juin, des passionnés de tauromachie, mais aussi des badauds, des parisiens « descendus » pour la fête, des salseros, qui s’entraînaient pour le festival Tempo Latino de l’été… Tout l’esprit de la Gascogne se retrouvait dans les ruelles joyeuses de Vic, dans les bars où le foie gras et le Tariquet côtoyaient les banderilles et le flamenco. Les effluves ibériques envahissaient les collines du Gers. Oui, l’Espagne poussait bien un peu sa corne aux portes de Toulouse, comme le chantait le grand Claude…

Les Copains d’abord joués à Vic…

La caravane était petite, mais propre et confortable. Maria, assise au coin de la table, tentait de réviser sa philo. Elle était en terminale, et espérait qu’un miracle se produirait avant la fin de l’année. Elle le savait: dans la communauté rom, personne ne faisait d’études. Son destin était tout tracé ; elle se marierait dans un an ou deux, aurait quatre ou cinq enfants, et irait parcourir les routes d’Europe, sa vie durant. Et ce n’est sûrement pas celui qui lui rendait visite en rêves qu’elle épouserait, non, car il restait un gadjo, même s’il était le plus grand des matadors du vingt-et-unième siècle. Elle serait mariée à quelqu’un de son clan. Qu’elle le veuille ou non.
Mais la jeune fille avait découvert autre chose, grâce à l’école, grâce à des rencontres avec des enseignants qui ne l’avaient jamais méprisée ou humiliée. Voilà presque cinq ans que sa famille était semi sédentarisée, et l’adolescente avait forcé l’admiration de tous ses professeurs, rattrapant son retard, s’intégrant à merveille, et faisant preuve d’une intelligence rare. Elle savait ce qu’elle voulait faire : étudier l’histoire de son peuple, puis s’engager dans la défense des siens. Elle voulait se faire passerelle entre sa communauté et cette France qu’elle aimait tant.
Et surtout, elle voulait que le petit Pablo guérisse, et qu’il puisse accéder à son rêve : Pablo voulait devenir torero, comme leur grand-père. Depuis leur enfance, abuela leur racontait les histoires de cet époux adoré, de ce matador des années trente dont la légende auréolait toujours les siens : le grand Juan Sanchez, celui que l’Espagne d’avant Franco adulait comme le Dieu des arènes, et que la communauté rom continuait de vénérer. Celui qui se faisait appeler El Gitano, oui, était encore solidement ancré dans la mémoire collective, et abuela passait des heures à raconter à ses petits-enfants comment son époux était passé de l’état de peone à celui de picador, puis comment sa dextérité et sa force avaient fait de cet anonyme un grand matador. El Gitano était tombé aux côtés des forces républicaines, dans un dernier combat, loin de l’arène, au cœur de la vie.
– Maria, montre-moi le traje de luces, s’il-te-plaît, supplia le petit Pablo, livide, allongé dans le lit au fond de la caravane.
La jeune fille soupira, le cœur serré devant les souffrances de son frère. Elle savait que sa grand-mère ne rentrerait pas tout de suite, et elle osa donc ouvrir la grande malle, et en sortir délicatement le costume de torero d’El Gitano, son « habit de lumières ». Pablo effleura les paillettes et les couleurs, fermant les yeux, et il sembla à cet instant à Maria que la vie revenait doucement rosir les joues pâles du petit, comme si la force du grand torero avait soudain redonné du courage à l’enfant.


On toqua à la porte. Maria prit le temps de ranger le costume avant d’aller ouvrir. Personne n’avait le droit de voir le seul trésor que possédait la famille Sanchez. Deux gendarmes et un huissier se tenaient sur le seuil et la saluèrent d’un air maussade. Ils lui apprirent d’un ton sec et définitif que sa famille disposait d’une semaine pour partir, sinon, ce serait la reconduite à la frontière. Et ce n’était pas la peine de discuter. Le recours présenté par l’association avait échoué, le préfet avait signé l’ordre d’expulsion. Le camping était un terrain municipal, réservé aux touristes, qui allaient commencer à affluer avant la manifestation de Vic, et puis cette situation précaire avait assez duré. Maria expliqua, cria, tempêta, parla de son bac, du traitement de Pablo, de son travail à Vic, de ses parents en passe de trouver un emploi ; rien n’y fit. Et puis ce n’était pas le moment de discuter, dit l’huissier, elle n’avait qu’à écouter les infos. La France virait au bleu marine, alors elle pouvait bien voir rouge, elle n’aurait certainement pas raison devant la loi.

Non loin de là, un jeune homme plantait sa tente. La belle nuit de juin serait longue, et il prenait tout son temps pour s’installer. Maria l’avait observé de loin, sans lui prêter vraiment attention, toute à sa dispute avec les représentants de l’ordre, et ne l’avait pas reconnu. Cependant, lorsqu’il se redressa et lui adressa un sourire radieux, la voyant assise sur la vieille chaise de toile, perdue dans ses pensées, le cœur de la jeune fille se mit à battre la chamade. C’était lui, à n’en pas douter. Sa fossette et son épi rebelle, ses grands yeux noirs, et ce sourire, un sourire à réveiller les morts, même lorsqu’il se contentait de l’esquisser : Antonio Ibáñez venait de planter sa tente dans la parcelle voisine.
Le jeune homme s’avança vers elle, et la regarda intensément. Il avait vu cette frêle jeune fille, vêtue pauvrement, mais aussi lumineuse que le soleil gersois, se dresser fièrement face aux gendarmes, les affronter, sans crainte. Il avait vu briller son regard de colère. Elle avait eu la dignité d’un taureau avant la mise à mort. Antonio venait de tomber éperdument amoureux de cette inconnue. Il s’arrêta devant la caravane et dit, dans un français presque parfait :
– Nous ne nous laisserons pas faire. Je vais vous aider. Je m’appelle Antonio Ibáñez de la Plata. Mon nom ne vous dit peut-être rien, mais je connais pas mal de gens, j’ai des relations dans les médias. Je vais appeler mon agent.
– Je sais qui vous êtes, répondit Maria, tentant de calmer les battements de son cœur. J’ai vu une affiche dans le bar où je travaille, à Vic. Mais… que faites-vous ici, dans ce petit camping, et à une demi-heure de Vic ? Pourquoi n’êtes-vous pas dans un hôtel ?
– J’ai besoin de calme, j’ai besoin d’être seul, et proche de la nature. Dès que je le peux, je campe, cela me rappelle mon enfance, dans les plaines mexicaines, quand mon père nous amenait, avec mes deux frères, camper dans les gorges du Sumidero. Je m’isole toujours un jour ou deux, avant la première corrida, pour réfléchir, me concentrer, prier… Venez, vous allez me raconter votre histoire, j’ai une heure avant de repartir à Vic pour la soirée.


Et les jeunes gens, profitant du retour d’abuela, qui surveillerait Pablo, partirent marcher le long des berges. Ils longèrent la rivière au soleil couchant, observèrent la Tour d’Armagnac qui se dressait fièrement aux côtés de la cathédrale Sainte-Marie, et parlèrent, dans un joyeux mélange d’espagnol et de français. Antonio raconta son enfance dans la ganaderia familiale, ses premières corridas, les cris et le silence, la puissance et la passion. Maria raconta les chemins de poussière, le soleil andalou, les feux de camp, et puis l’ancrage forcé dans la sédentarité gersoise. Ils s’arrêtèrent sur le pont de la Treille, et, au moment même où elle leva la main pour lui montrer les Pyrénées qui se profilaient à l’horizon, Antonio la saisit et la porta à ses lèvres.
– Querida, tu es si forte. Je veux que tu viennes me voir après-demain. Tu me porteras chance.

Vic était en fête. Les bandas jouaient depuis le matin, les ruelles bondées de rires et de cris, les mojitos coulaient à flots. Des nuées d’enfants se poursuivaient en criant « toro, toro », tandis que quelques vieilles mamies dodelinaient de la tête en souriant sur leur bancs, devant les maisons en pierre jaune du Gers. Maria se sentait à la fois épuisée et heureuse. Elle devait retrouver Antonio à la fermeture du bar, il lui avait proposé de la ramener à Auch, et elle termina donc son service dans une sorte d’état second. La lune était pleine. Les ruelles commencèrent à se vider. Au loin, un chien aboyait, et de délicieux parfums printaniers faisaient chavirer la nuit.


Elle attendit presqu’une heure, et puis elle pensa qu’il l’avait oubliée. Il fallait absolument qu’elle rentre, sa mère devait commencer à s’inquiéter. Normalement, Anne, l’une des serveuses du restaurant de la place, la raccompagnait en voiture, et elle était toujours de retour au camping avant une heure du matin. Elle partit donc, seule, sur la petite route de campagne. Tant pis, elle ferait du stop. Quelques voitures passèrent sans s’arrêter, pleines de jeunes gens déjà bien éméchés, trop, sans doute, pour la remarquer. Elle avait déjà parcouru plusieurs kilomètres au milieu des collines et des champs de tournesols lorsque la BM noire freina brutalement.
Ils étaient trois. Elle avait eu le temps de voir que ce n’était pas des gars de la région, avant de respirer leurs haleines plus qu’avinées. Celui qui semblait être le chef, casquette vissée sur un crâne rasé, ordonna aux deux autres de la plaquer contre le capot. Il ricanait. La lune éclairait la scène, et Maria, qui n’avait jamais peur, se mit à hurler lorsque le cran d’arrêt déchira son tee shirt. Sa poitrine nue jaillit comme une biche sous des phares, et les chasseurs avides poussèrent des exclamations de joie.
– On va te planter nos banderilles, pétasse !
– Toro, toro ! Allez, tu veux courir ? On va t’attraper, salope! C’est pour ça qu’on est venus de Paris ! Juste pour picoler et baiser des meufs de ploucs !
Le gros skin s’approcha et commença à lui lécher les seins en reniflant comme une bête fauve. Maria était terrorisée. Mais soudain, elle se dégagea en criant « hijo de puta ! », donna un énorme coup de genou dans les corones du gros porc et partit en courant sur la route déserte, sous les yeux médusés de ses agresseurs. La voiture d’Antonio arriva précisément à cet instant, et le jeune homme comprit instantanément la gravité de la situation. Il sauta à terre, prit Maria par la main et lui cria de monter. D’un coup d’œil, il s’assura qu’elle n’était pas blessée, que ces salauds ne l’avaient pas touchée.
Mais le skin s’était très vite remis du choc infligé par la belle en furie. Antonio n’eut pas le temps de remonter en voiture. Les trois voyous commencèrent à le tabasser, malgré les suppliques de la jeune fille. Elle eut le réflexe d’appeler des secours depuis le portable d’Antonio, qu’elle trouva sur le siège, et assista, impuissante, à la bagarre inégale. L’agilité et la force du torero ne pourrait avoir raison du nombre et des armes. Antonio faisait face aux trois fauves, le visage déjà couvert d’hématomes, mais debout, malgré les lames qui brillaient dans la nuit. Et il ne cessait de penser qu’il se trouvait à présent tel un taureau dans une arène, face aux banderilles qu’on voulait lui planter dans le corps, et qu’il lutterait, vaillamment, jusqu’à son dernier souffle. Le matador était devenu le taureau. Mais cette arène là était sordide.
La police arriva à ce moment là. Le skin bouscula Antonio démarra en trombe la dans la voiture du jeune homme : les clefs étaient restées sur le contact. Ses deux comparses avaient filé dans la BM, en apercevant les gyrophares dans le tournant, sans demander leur reste. Maria pleurait, cachant son torse avec ses bras. Soudain, Antonio se jeta à genoux et se mit à implorer la vierge. Le policier courut vers lui, pensant qu’il avait peut-être été grièvement blessé. Mais le jeune homme tourna vers Maria un visage défait en murmurant dans un souffle :
– Le costume. J’ai perdu mon costume…Mon habit de lumières…

Ils étaient assis dans la caravane, et la mère de Maria leur servait un verre de Moscatel, pendant que son père discutait avec les policiers. Maria tremblait encore, et Antonio avait le regard vide. Il avait fallu expliquer, encore et encore, passer au commissariat d’Auch pour déposer une double plainte, Maria avait même été conduite à l’hôpital pour un examen. Un interne avait badigeonné le visage tuméfié du jeune homme. Antonio n’avait plus décroché un mot. Et Maria pleurait. Elle ne pouvait plus s’arrêter de pleurer.
– C’est ma faute. Tout est de ma faute. Si je n’étais pas rentrée seule, ils ne m’auraient pas attaquée, et tu n’aurais pas été blessé…et ton costume…
– Arrête, Mariacita, lui souffla sa mère. Les victimes ne sont jamais les coupables, jamais. Tu l’as appris en philo, rappelle-toi.
– Mais comment il va faire, demain ? Comment ? Sans le costume !
La jeune fille avait crié, réveillant même Pablo, qui sortit de son lit en maugréant. En apercevant le matador, il écarquilla ses mirettes et se précipita vers lui. Ce sourire enfantin sembla soudain réveiller Antonio, qui sortit enfin de son mutisme. Il se tourna vers Maria et lui prit doucement les mains.
– Maria, j’aurais donné ma vie pour toi. Je suis si heureux d’être arrivé à temps, je ne me le serais jamais pardonné, s’il t’était arrivé quelque chose. En plus, tu sais bien que tout est de ma faute ; je ne pouvais pas deviner que les aficionados avaient tant de choses à me dire : Vic est une ville merveilleuse, nous avons mangé dehors, on a préparé la novillada… La soirée s’est prolongée, et… tu n’y es pour rien, Maria, pour rien.
– Mais, ton costume, alors ? balbutia Maria.
– Je vais repartir. Un torero ne peut pas combattre sans son costume. C’est impossible. Et puis il m’a été donné par ma mère, c’était celui de son oncle, le grand Balderas. Perdre cet habit, c’est perdre l’âme de ma famille, l’âme du Mexique. Je ne combattrai pas. Je suis nu, tu comprends. Sans mon costume, je suis une ombre.
– Non, pequeño, tu ne partiras pas.
Abuela se tenait devant eux, toute courbée, dans sa robe de chambre effilochée. Elle serrait contre son cœur le traje de luces de son mari, et elle le tendit au jeune homme, souriant de toute sa bouche édentée.
– Tiens, mon fils, c’est pour toi. Et tu seras le premier gadjo à toucher ce costume, et aussi le premier gadjo à épouser une fille de notre famille. Mais El Gitano aurait été fier de te connaître.
Un silence religieux se fit dans la caravane. Maria fut la première à le rompre, osant prendre la main d’Antonio, et en défiant son père du regard.
– Papa, ne t’énerve pas. Il ne m’a même pas embrassée. Abuela exagère, comme toujours. Par contre, Antonio a déjà parlé de nous au maire de Vic et à la presse ; ils vont voir ce qu’ils peuvent faire pour nous aider.
Antonio s’était levé. Il s’approcha de la vieille dame et l’enlaça longuement. Il lui chuchota quelque chose à l’oreille en espagnol, avant de se relever, le costume dans les mains, comme une offrande. Le petit Pablo se mit alors à applaudir de toutes ses forces. La caravane venait d’être transformée en arène, et Antonio venait d’y gagner une première fois, contre le sort.

Le soleil, de plomb. Le ciel, d’azur. Et le taureau, de jais. Sur les gradins bondés, le public s’était déchaîné. A midi, le paseo avait commencé pour la foule des Vicois et des aficionados venus de tous les horizons, et Antonio avait défilé, vêtu du costume sacré d’El Gitano. Il avait réussi à faire assoir Maria et sa famille dans la tribune d’honneur ; en passant, il jeta un regard de feu à la jeune fille, tel un chevalier saluant sa dame avant le tournoi. Le spectacle fut grandiose, et le jeune homme séduisit tout le public avec une superbe Manoletina, avant de porter l’estocade, sous le soleil gascon qui aurait pu être celui de Mexico, de Madrid ou de Nîmes. Car la corrida rassemble les peuples en rapprochant les hommes de leur destin. Antonio avait combattu un adversaire aussi noble que la vie elle-même.
Il créa la surprise en restant debout, au milieu de l’arène, après avoir couru vers les gradins pour s’emparer du micro du journaliste de La Dépêche. Face à un public médusé devant cette entorse au rituel, alors que le sable était encore brûlant du combat mené, il se mit à parler de la famille Sanchez, de l’abuela qui venait de lui sauver la mise en le revêtant du costume du célèbre El Gitano. En entendant ce nom, la foule se mit à murmurer comme un champ de tournesols sous l’Autan. Puis il évoqua le courage de Maria, ses projets, et surtout la maladie du petit Pablo, qu’il désigna du doigt. L’enfant, fièrement, se mit debout en souriant. Et puis l’expulsion. La reconduite à la frontière. L’errance, alors que les Sanchez souhaitaient justement ancrer leur histoire en terre gersoise, en terre taurine. Soudain, le maire se leva, descendit vers l’arène, et saisit à son tour du micro :
– Au nom de l’hospitalité gersoise et au nom de la solidarité taurine, je m’engage solennellement à accueillir cette famille à Vic.

La Dépêche, Sud-Ouest, mais aussi Libération et Le Figaro furent unanimes : l’esprit de la Corrida avait conquis même ses détracteurs. Antonio fit la une de nombreux quotidiens, tandis que la presse s’emparait de l’incroyable histoire du costume volé et de l’intervention d’un torero en faveur d’une famille rom. En quelques jours, c’est un pont d’or que la municipalité de Vic fit aux parents de Maria, leur attribuant une petite maison en cœur de ville et une carte de transports gratuite, pour qu’ils puissent se rendre aussi souvent que nécessaire à Toulouse pour y soigner Pablo. Le père de Maria fut embauché par l’association vicoise de tauromachie, tandis que le conseil général offrait une bourse à la jeune fille, afin qu’elle puisse en toute quiétude commencer ses études.
Antonio Ibáñez, que la presse avait surnommé « El d’Artagnan », avait remporté, en mousquetaire des temps modernes, cette double victoire : il avait combattu brillamment le taureau, mais aussi porté l’estocade à la frilosité administrative et politique.

Vic-Fezensac, juin 2021.

Maria reposa le combiné en souriant. Elle venait de recevoir un appel du responsable du Prix Hemingway. On réclamait son torero de mari pour qu’il accepte d’être le parrain de la manifestation de l’année suivante. El Gitano avait croisé l’écrivain dans les rues de l’Espagne en lutte… Bouleversée, mais ravie, elle sortit dans le jardin de la belle « gasconne » et s’installa à l’ombre de la terrasse, admirant les volets qu’elle venait de repeindre en bleu de Lectoure. Elle était heureuse de pouvoir à présent profiter de son congé de maternité, après ces années virevoltantes, passées à étudier le droit à Paris et à Barcelone, puis à exercer comme avocate dans un grand cabinet parisien. Elle avait bien mérité cette pause. Son I Phone la tira de sa rêverie : un MMS de son petit frère, à présent bel et bien guéri, et installé au Mexique chez les parents d’Antonio, où il se formait à la corrida.


Antonio n’allait pas tarder. Même si sa ganaderia gersoise l’occupait beaucoup, il faisait toujours en sorte de rentrer tôt. Et puis le festival allait commencer, la soirée serait belle. Mojitos, rires, courses dans les ruelles, et, pour elle, juste un petit verre de jus de raisin, dans le bistrot de Paulo. Madame l’avocate n’avait rien changé à ses habitudes, et Antonio Ibáñez de la Plata non plus. Le Gers les avait réunis, et ils en appréciaient avant tout la douce simplicité. Les paillettes, ils ne les aimaient que sur le costume de torero d’El Gitano, qui était accroché dans leur chambre, près du baldaquin. A cette seule évocation, le rouge monta aussitôt aux joues de la jeune femme. Les nuits du jeune couple étaient autant de ferias. Ils s’adoraient, comme au premier jour.
– Maman, regarde, je t’ai ramassé des coquelicots.
Maria observa la fillette qui venait vers elle, un énorme bouquet de coquelicots pressé dans la main, et un sourire à renverser le monde. Oui, Marie-Sara était bien la fille de son père !

https://actu.fr/nouvelle-aquitaine/bayonne_64102/sud-ouest-plus-belles-ferias-2019-ne-pas-manquer_23897689.html

…Et à l’année prochaine à Vic Fezensac?!

https://www.tf1.fr/tf1/jt-13h/videos/feria-de-pentecote-a-vic-fezensac-un-rendez-vous-manque-a-cause-du-covid-19-52869672.html

http://www.tourismedartagnanenfezensac.com/

Longtemps, je t’ai rêvée

Longtemps, je t’ai rêvée.

Perdue au fond des terres arides du Cantal, enlisée dans la lave stratifiée des volcans, je te cherchais, palais de briques roses, sur le fil ténu de ma mémoire.
Je fixais tes vertiges, placardant de grandes affiches de la basilique St Sernin sur les murs gris de mon appartement clermontois, m’enivrant de tes lumières, orpheline de tes mondes colorés, de tes petits marchés, de tes pincées de tuiles… La ligne bleutée des Pyrénées, se dessinant les soirs d’été tout au loin, m’était appel et mirage. J’avais soif de toi.

Crédits Sabine Aussenac

Me manquaient la douceur de tes ocres toscans, le parfum des tilleuls et des lilas des soirs de mai; me manquaient ta croix occitane et tes ruelles chargées d’histoire, tes bleus pasteliers et tes joutes hérétiques, tes éblouissements multicolores, de tes violettes timides au sang de tes briques. Toi la fière, la rebelle, capitale debout d’une Occitanie qui se rêvait libre…


Sans toi, je n’étais rien. J’avais faim de tes petits matins gourmands et tendres, lorsque tu t’éveillais, mi Reine des Pyrénées, mi village gascon, faim des claquements des persiennes et du café brûlant dans les tasses vert et or du Florida. J’avais faim de ta faconde, des effluves de cassoulet aux marchés aux gras. Mes lieux de vie me semblaient orthorexiques et glacés. J’avais froid sans tes ardeurs méditerrannes, lorsque ton soleil d’enfer dardait la brique et que seules tes églises offraient des oasis de fraîcheur.
https://www.instagram.com/p/Bp99pOJApsW/
Longtemps, je descendais en songe tes fleuves impassibles. Je revoyais tes eaux mêlées. Ville confluente, carrefour entre l’orient des plages languedociennes et l’occident des déferlantes, à mi voie des garrigues et des pins landais. A la croisée des chemins, cité Gasconne aux lumières provençales, antichambre de la méditerranée et promesse océane, arc-en-ciel identitaire, tu te fais passerelle, route de la soie des Suds et escale, auberge espagnole et métissage portuaire. L’eau verte du Canal me conduisait à Sète, et Garonne me guidait presque outre atlantique. Tu étais mon Ellis Island, mon espérance, ma terre promise.

Crédits Sabine Aussenac

Mon hérétique…Tu m’as appris le devoir d’insolence. Toi la protestante, la cathare, sœur des Esclarmonde et autres « Parfaites », écho des citadelles du vertiges se profilant aux confins de l’Aude, porte de Montségur. Jamais tu n’as fait profil bas, résistant à cette langue d’oïl qui voulait faire taire tes terres, hostile à tous les Parisianismes, défiant les lois de ces lointains quais des Brumes, éclatante de fierté. Même martyre, embrasée dans le moderne et sinistre bûcher de l’AZF, victime des incohérences et des lâchetés humaines, tu as su te relever.

Reconstitution historique au Capitole. Crédits Sabine Aussenac
Crédits Sabine Aussenac

Longtemps, je t’ai aimée. Nous écoutions les notes bleues de Claude et buvions du thé au Jasmin au Bol Bu, hypokhâgneuses en révolte, chassant les nuages et les garçons, découvrant la vraie vie au sortir de nos campagnes tarnaises ou gersoises… Nous hantions les longues travées de ce Mirail bétonné, récitant Verlaine et critiquant nos pères. Les martinets hurlaient dans un ciel bleu comme en enfer et je plaquais les trois accords de Blowing in the wind , moniale naïve et vestale encore, sous la travée du cloître des Jacobins. Nous voulions changer la vie: Ma première matraque m’a frappée rue du Taur.

Crédits Sabine Aussenac

J’avais 20 ans quand la France a rosi, et je me souviens du Capitole en liesse, de la première fête de la musique, de nos grandes espérances. Beaucoup plus tard, petite Poucette rêveuse, j’ai égrené mes rêves et grandi. Mais je n’oublierai jamais ma foi adolescente, motivée avant l’heure, rouge comme Rosa Luxembourg et persuadée que nous transformerions le monde …

Et puis j’ai goûté Paris et ses ors magnifiques, Bruxelles et sa Grand place, Londres, Prague, Berlin…Pourtant, c’est vers toi que mon cœur me porte. Tu es mon ancre et ma grand voile, mon passé et mes futurs.

Crédits Sabine Aussenac

J’ai rêvé ma vie sur les coussins de mon petit appartement du quartier des Chalets, je la rêve encore, plantant le lilas de mes espérances sur la terrasse d’une grande maison qui hésiterait entre Jardin des Plantes et canal… Aujourd’hui, mes enfants te découvrent et vivent sous tes toits de tuiles. Premiers baisers sous les tilleuls de la promenade, le long de Garonne… On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans…

Crédits Sabine Aussenac

Tu as grandi aussi.Tu vogues sur tes ailes du désir, sœur des étoiles, carrefour de l’Europe. Parfois mutilée par les chantiers immenses, tu seras bientôt libérée des trafics. Tes affaires Calas et autres scandales ne peuvent te noircir. Tu respectes ceux qui t’aiment, et ils te le rendent bien.

Tu es toujours mon autre. Mon double je, ma ville mémoire, ma ville espoir. De l’angélus de l’aube à l’angélus du soir, j’écrirai, face au clocher de St Sernin, au-dessus d’un million de toits roses.

Au fronton du Capitole, sous le palmier des Jacobins, le long des berges de Garonne, sur l’eau verte du Canal du Midi, j’écrirai ton nom :

TOULOUSE.

Crédits Sabine Aussenac

https://www.youtube.com/watch?v=7gqPkb_sQQo

Ce petit texte avait été lu au Marathon des Mots 2006, avec d’autres « Lettres à ma ville », par Carole Bouquet et Sami Frey.

https://www.ladepeche.fr/article/2006/06/16/58481-ils-ecrivent-un-poeme-a-leur-ville.html

Quelques images:

Et le temps à Albi semble d’éternité

Mutine et légère comme un matin 
d’été 
la statue nous sourit en dominant
rivière.

Sur le Tarn impassible coule 
une histoire fière:

Et le temps à Albi semble d’éternité .

Sabine Aussenac.

Photo prise derrière le Palais de la Berbie, à Albi.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Palais_de_la_Berbie#Jardins_et_cours

Aimer l’été à Toulouse… #canicule

Aimer l’été à Toulouse …

L’image contient peut-être : plante, arbre, ciel, table et plein air

Accueillir.

Ne pas lutter.

Se laisser inonder, envahir, déborder par elle.

Mais ruser.

Oui, elle est partout, dans toute la France, sur toute l’Europe, elle fait fondre les glaciers de Norvège et mourir les ouvriers espagnols, elle nous suffoque, nous désespère : la canicule.

À nous, pauvres citadins enfermés dans nos étuves surchauffées, d’imaginer des échappatoires.

Prenons par exemple la corvée de vaisselle. Personnellement, je l’accomplis à la fraîche – toutes proportions gardées, les températures nocturnes, dans la ville rose, avoisinant les 32 jusque vers minuit 😊

C’est le moment de se la jouer dance floor à Ibiza, non ?

Franchement, faire barboter les mugs et les couverts dans un peu de produit vaisselle au son d’une électro endiablée m’évoque directement une torride soirée mousse. Un zeste de Despacito au rinçage, quelques mouvements de hanche pour naviguer jusqu’au buffet en imaginant aller au bar de la paillote, un soupçon de David Guetta pour couronner le tout, vous verrez, vous oublierez instantanément les langueurs accablées de la journée. À vous les déhanchés joyeux en récurant la poêle, comme si vous étiez à la soirée Miss tee-shirt mouillé du camping des Flots Bleus ou dans quelque soirée Blanche à St Trop…

Il suffit de si peu pour rêver aux ailleurs… Et de toutes façons, il est carrément impossible de partir en rando ou d’aller arpenter quelques forêts par 40 degrés à l’ombre…

Alors le matin, enfin vers 13 heures, quand j’émerge de ma nuit quasiment blanche, je me la joue campagne. Ambiance « Natures et découvertes » mâtinée de zénitude. À moi les playlists « chants d’oiseaux » et « alpages » de ma tablette. Un bon petit déjeuner avec des confitures Lidl qui semblent de venir de chez Fauchon disposées dans des coupelles, quelques rondelles de beurre demi-sel harmonieusement dentelées, une belle nappe blanche, et voilà : me voilà sur la terrasse d’un cinq étoiles non loin du Léman. Les pièces ont gardé la douceur apaisante de la fin de nuit, paraissant presque fraîches, et la journée s’annonce ainsi pratiquement respirable.

L’après-midi, c’est plage. Après la douche tiède au savon au monoï d’Yves Rocher (celui qui était le chouchou de ma Princesse 2), il suffira de s’enduire langoureusement d’huile prodigieuse (je garde comme une relique le minuscule flacon offert à Noël dernier par Princesse 1) avant de se prélasser sur un transat fauteuil devant le ventilateur tournant à plein régime en lisant À la recherche du temps perdu Marie-Claire pour se croire en quelque crique méditerranéenne. Je n’oublie pas de lancer la playlist « vagues » pour profiter du ressac et des cormorans, ni les petits verres en plastique garnis d’eau congelée disposés devant le susdit ventilo, donnant illico l’illusion d’une brise rafraîchissante.

En fin de journée, à l’heure où s’élèvent de chaque balcon des effluves de sardines grillées et que s’entrechoquent les verres de pastaga, nous allons dans les parcs. Avec cette impression de traverser un lotissement en bord de Grande Bleue avant d’arriver dans quelque arrière-pays où, entre chênes verts et garrigues, exploserait le chant des cigales.

https://www.youtube.com/watch?v=qRzEB0wOZFw

Au coin de la rue, l’inénarrable Place Pinel a engrangé ses mystères et sa magie. Entre boulodrome et caniparc se dresse l’imposant kiosque à l’écho central et aux poteaux murmurants, tandis que les kabbalistiques tilleuls et platanes veillent sur les passants accablés de chaleur.

L’image contient peut-être : arbre, plante, ciel, herbe, plein air et nature

https://www.youtube.com/watch?v=6dy56Uek5k0&t=27s

Lovée paresseusement sur un banc devant le Jardin Japonais du parc Compans, je peux observer les sages sillons tracés au râteau sur les graviers non loin de la pagode. En admirant les nénuphars et les collines d’herbe rase, je me crois réellement au pays du Soleil Levant.

L’image contient peut-être : arbre, plante, ciel, plein air et nature

À moins que mes pas ne me portent vers le Jardin des Plantes, où les arbres plusieurs fois centenaires veillent sur les Toulousains reconnaissants qui cheminent entre catalpas et tilleuls, au gré des allées alanguies.

Il y avait cette rose chavirant dans le soir
Vaisseau pourpre et lumière pavillon des espoirs
Embaumant crépuscule et glissant veloutée
Barcarolle fragile en esquif des étés

Au creux des mille allées s’ébattaient des enfants
Landaus bleus et cerceaux comme en siècle d’antan
Au cristal de ces rires un guignol surgissait
La calèche promenait et les pleurs s’apaisaient…

http://www.oasisdesartistes.org/modules/newbbex/viewtopic.php?topic_id=89716&forum=2

Les dimanches, au kiosque, on peut guincher comme en bord de Marne, entre langoureuses milongas et lindy hop déchaîné… Et l’on se prend à rêver qu’à la rentrée, on franchira enfin le pas pour pousser la porte d’une école de danse et se la jouer Fame ou Argentine…

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Parfois, l’eau verte du Canal me mène presque jusqu’à la mer, quand je longe les rives envahies par les ajoncs et l’onde immobile où se mirent des saules et des platanes un peu fatigués.

L’image contient peut-être : arbre, plante, plein air et eau

Et bien sûr, auparavant, puisque les consignes de St Manu de Brégançon nous ordonnent d’aller « dans des endroits réfrigérés », j’ai le choix : emprunter ad libidum ma chère ligne 16 L1 dont la clim bruyante et glacée ravit mes amis les chauffeurs qui, du haut de leur bermuda sexy, se la jouent parfois guides de bus touristiques ; là, je peux m’imaginer découvrir les hauts-lieux de la vie toulousaine sans dépenser un cent de plus que mon abonnement Pastel, revisiter le monument aux Morts à François-Verdier, admirer la fleur de corail de la basilique Saint-Sernin…

Aucun texte alternatif disponible.

Ou encore profiter de ma dernière découverte estivale, elle aussi 100 % gratuite : flâner dans les allées propres et bien achalandées du Carrefour Market Compans dans le centre commercial « Reflets » et y jubiler en voyant des prix bien plus accessibles que dans mon habituel Casino Saint-Georges, avant de partir arpenter, en soirée, les méandres du superbe parc voisin…

Et Garonne… Ne pas oublier Dame Garonne, qui nonchalamment serpente entre briques et tuiles… Y marcher vous transporte immédiatement dans un tableau d’Henri Martin, et l’on se plaît à rêver à Bordeaux, la ville océane, qui accueillera les flots prêts à goûter au sel de l’Atlantique, et à nos chères Pyrénées dont on peut presque sentir la majesté et la fraîcheur… La nuit, les quais se font cour des miracles, accueillant toute la jeunesse toulousaine pour des nuits fauves et colorées.

L’image contient peut-être : plein air et eau

Enfin, les fontaines elles aussi ont un goût de plage, lorsque les enfants s’y ébattent comme si ils dévalaient des dunes, méduses aux pieds… Avec un peu d’imagination, derrière le Capitole, on pourrait presque entendre « Chouchous…Beignets aux pommes « et voir des parasols…

L’image contient peut-être : une personne ou plus, personnes debout, ciel et plein air

Il existe aussi d’innombrables activités estivales permettant de pallier à l’infini un non départ en vacances lorsque l’on reste cloué chez soi par temps de canicule : ouvrir la malle des albums photos des enfants et se souvenir de la joie que nous avions à les confectionner, en ces temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître ; relire des lettres d’amour – idem pour les moins de 20 ans… ; jeter des factures payées depuis 10 ans ; se mettre au crochet ; découvrir un nouveau réseau social ( je viens par exemple de m’inscrire sur « Insta » et tente d’y poster les milliers de photos engrangées sur Facebook. Jonglant entre l’application layout qui permet de poster plusieurs images et l’indispensable Linktr.ee autorisant les supra narcissiques tels que moi à mettre des liens dans la « bio », je me la suis jouée geek et ai eu l’impression d’habiter avec Sheldon et Amy… À moi bientôt un flot de followers à faire pâlir Beyonce…)

https://www.instagram.com/sabine_aussenac/ ; jeter un œil sur ses anciens carnets d’adresse en tentant de se remémorer les visages de tous ces noms oubliés…

Lire, bien sûr ! Relire, découvrir, s’évader, dévorer, déguster, tout, pêle-mêle, les polars suédois de la médiathèque, les trouvailles de la boîte à livres de la rue, les mis de côtés pendant l’année, et puis les magazines, les fanzines…

L’image contient peut-être : plante et plein air

Ma vie comme un roman

Ma vie comme un roman
De mille cinq cent pages
Un suspense haletant
Et tant de personnages
Un style foisonnant
Beaucoup de mots tocsins
L’intrigue me plait bien
Ca fait passer le temps
Parfois c’est du théâtre
On dirait Cléopâtre
Sans les didascalies
Je me meurs je m’enfuis
On veut tuer la reine
Tous ces amants jaloux
Tragédie maux et peines
Catharsis qui rend fou
Je vis en roman russe
Karénine ou Lara
En mille bleus de Prusse
Je m’envole vers toi
Saga américaine
J’y parcours grandes plaines
Ils ont brûlé Tara
Mais Scarlett reviendra
Parfois en baie d’Along
Je me rêve un amant
Ma plume a les dents longues
Au gré des Hurlevent
Mon Heathcliff et mon Rhett
Me font tourner la tête
Parfois c’est un poète
Si jeune et si esthète
Je me coule en ses vers
J’y renais liberté
Diable au corps nuits d’enfer
Il m’offre éternité
Que jamais ne finisse
La saga de nos jours
Fleurs du mal ou clarisse
Oui j’aimerai toujours.

Et, aussi, se souvenir des chaines gratuites de notre box et du replay. Se faire toute une saison d’Alice Nevers, revoir Nord et Sud, faire découvrir Visconti à mon fils, m’abrutir devant les romances de la télé allemande : que du bonheur !

Enfin, la nuit… Pourquoi s’échiner à faire comme si de rien n’était en étouffant dans une chambre caniculaire ? Là encore, rêver… Se dire qu’on est dehors, à la belle étoile, dans quelque prairie embaumant les fleurs sauvages, ou sur une plage de sable blanc… S’endormir au son des grillons dont le stridulement nous bercera, imaginer un feu de camp non loin de nous et y voir des jeunes gens enlacés au son de quelque Hallelujah ou d’un standard d’Ed Sheeran, et, pourquoi pas, penser à une main caressant la nôtre.

In bed with Justin Nozooka

Le feu de camp me semble indispensable.

Et des étoiles. Bien sûr, il y aura des guitares, le ressac et cette légère brume qui descend sur l’océan.
A moins que nous ne soyons dans une prairie, l’amour en saison sèche, enveloppés dans ces myriades odorantes de foin coupé ; les cigales, assourdissantes, se sont tues à la levée de la lune, mais le doux frou-frou des grillons demeure, et ta main dans la mienne.

Nous ne sommes pas seuls, bien sûr. Ton été est celui de ta horde. Les bouteilles passent de rêve en rêve, une fille danse près du feu, elle est sublime, tout simplement.
Mais ta main est bien dans la mienne, malgré les petits froissements de mon âme, qui se lisent au coin de mes yeux verts.

Tu dis qu’ils ont la couleur de la forêt enchantée, celle de nos enfances.

Somme toute, le temps n’existe pas. Nous avons été des enfants, et nous restons les enfants du soleil. Qu’importe le fait que j’ai grandi avec Pimprenelle et Zorro, et toi en compagnie des Pokémons ?
A quinze ans, nous avons lu Rimbaud. A seize ans, nous avons écouté Morisson et Léo.
Arthur, Jim et Léo sont intemporels, tout comme cette nuit, notre nuit.

Il faut vivre. Maintenant. Tu me dis que tu as l’âge de quitter le monde, car tu en connais la laideur.

Viens, écoute les vagues, elles te disent les pays qui te tendent les bras, et ces cieux infinis qui murmurent là bas.
Viens, regarde les étoiles, elles brilleront un jour au-dessus de la maison où une femme donnera le sein à ton enfant.
Viens, prends-moi dans tes bras. Ne pense plus à ce mal qui envenime tes lèvres, ni à l’humain qui te maudit dans la fièvre.

Vois mes yeux qui lisent en toi et les plaines que je t’offre, tu y seras le cheval fou et les mille paysages.

Sens ma main sur tes cheveux et l’amour fou qui te caresse, et aime la nuit qui descend sur nos folies.

Nous partons dans les dunes où murmure la lune, ou à l’orée du bois éclairé par les Rhunes.

Justin Nozooka chuchote ses complaintes aux quatrains flamboyants, nos amis dansent et boivent les vins aux saveurs d’une absinthe.

Tu me coucheras sous les genêts sauvages ; tu ôteras délicatement mon infime corsage : en embrassant mes seins comme on goûte un poème, tu sauras mon amour que je deviens ta reine.
http://www.oasisdesartistes.org/modules/newbbex/viewtopic.php?topic_id=81059&forum=3

 

Il ne fait pas chaud. Il fait bon, vous aimez l’été, et même la canicule. Vous y repenserez avec une infinie nostalgie en rentrant, les soirs de brouillard et de neige sale fondue, portant un pull qui gratte et un gros sac de courses, après avoir raté un bus bondé.

Enfin, je dédie ce texte à tous les courageux et valeureux non aoûtiens qui travaillent dur et suent sang et haut, sur des échelles de chantiers, dans des salles d’opération surchauffées, devant des fourneaux fournaises, auprès de personnes âgées ou de malades en souffrance, dans des commissariats miteux, dans des bureaux non climatisés…

NB : THERMIDOR : mois de la chaleur , des bains 11ème mois du calendrier Républicain ( 20 juillet / 18 août )

Encore un été…


Encore un été sans la plage
Sans cigales et sans tournesols
Sans l’odeur du grand large
Et sans ombrage de parasols
Encore un été sans ce sable
Tendre fin et si doux
Sans rires joyeux et grandes tables
Sans cousinades et guilledoux
Encore un été sans Provence
Sans lavandes et sans froufrous
Sans marché à Saint-Paul de Vence
Sans festival au Puy du Fou
Encore un été sans valises
Faites et défaites gaiement
Sans robes légères insoumises
Sans regards brûlants des amants
Encore un été sans sourires
Sans ribambelles d’enfants
Sans monopoly sans fou rires
Sans prendre la clef des champs
Encore un été sans cerises
Sans courses folles en plein vent
Sans sursauts et sans surprises
Sans le parfum de l’Autan
Encore un été sans amis
Qui partageraient pâtes fraîches et rosé
Mozzarella salade de riz
Et plongeraient dans mon décolleté
Encore un été sans Paris
Sans arpenter les Champs
Sans bateau mouche café hors de prix
Sans Notre-Dame et touristes priant
Encore un été sans toi
Qui conduirait sur cette petite route
Qui me guiderait dans l’étroit
Passage de mes doutes
Qui tiendrait fermement ma main
Tout en haut de la falaise
Qui me montrerait Etretat
Et aimerait même mes fadaises
Qui découvrirait mes Cathares
En escaladant Montségur
Qui rirait de vieilles tares
Et me ferait sentir secure
Encore un été sans nous
Nous baignant nus sous la cascade
Et riant comme jeunes fous
Au gré des vents et cavalcades
Encore un été solitaire
Passé à faire et à défaire
A mettre petite vie en terre
En trébuchant sur lourdes pierres
Encore un été nomade
De juive errante dont seule patrie
Sera décidément aubade
Sornettes rêves et poésies.

 

http://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/actualite/ecrits/item/l-escarpolette

https://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/reforme-grandes-vacances_b_2769627.html