Aimer l’été à Toulouse… #canicule

Aimer l’été à Toulouse …

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Accueillir.

Ne pas lutter.

Se laisser inonder, envahir, déborder par elle.

Mais ruser.

Oui, elle est partout, dans toute la France, sur toute l’Europe, elle fait fondre les glaciers de Norvège et mourir les ouvriers espagnols, elle nous suffoque, nous désespère : la canicule.

À nous, pauvres citadins enfermés dans nos étuves surchauffées, d’imaginer des échappatoires.

Prenons par exemple la corvée de vaisselle. Personnellement, je l’accomplis à la fraîche – toutes proportions gardées, les températures nocturnes, dans la ville rose, avoisinant les 32 jusque vers minuit 😊

C’est le moment de se la jouer dance floor à Ibiza, non ?

Franchement, faire barboter les mugs et les couverts dans un peu de produit vaisselle au son d’une électro endiablée m’évoque directement une torride soirée mousse. Un zeste de Despacito au rinçage, quelques mouvements de hanche pour naviguer jusqu’au buffet en imaginant aller au bar de la paillote, un soupçon de David Guetta pour couronner le tout, vous verrez, vous oublierez instantanément les langueurs accablées de la journée. À vous les déhanchés joyeux en récurant la poêle, comme si vous étiez à la soirée Miss tee-shirt mouillé du camping des Flots Bleus ou dans quelque soirée Blanche à St Trop…

Il suffit de si peu pour rêver aux ailleurs… Et de toutes façons, il est carrément impossible de partir en rando ou d’aller arpenter quelques forêts par 40 degrés à l’ombre…

Alors le matin, enfin vers 13 heures, quand j’émerge de ma nuit quasiment blanche, je me la joue campagne. Ambiance « Natures et découvertes » mâtinée de zénitude. À moi les playlists « chants d’oiseaux » et « alpages » de ma tablette. Un bon petit déjeuner avec des confitures Lidl qui semblent de venir de chez Fauchon disposées dans des coupelles, quelques rondelles de beurre demi-sel harmonieusement dentelées, une belle nappe blanche, et voilà : me voilà sur la terrasse d’un cinq étoiles non loin du Léman. Les pièces ont gardé la douceur apaisante de la fin de nuit, paraissant presque fraîches, et la journée s’annonce ainsi pratiquement respirable.

L’après-midi, c’est plage. Après la douche tiède au savon au monoï d’Yves Rocher (celui qui était le chouchou de ma Princesse 2), il suffira de s’enduire langoureusement d’huile prodigieuse (je garde comme une relique le minuscule flacon offert à Noël dernier par Princesse 1) avant de se prélasser sur un transat fauteuil devant le ventilateur tournant à plein régime en lisant À la recherche du temps perdu Marie-Claire pour se croire en quelque crique méditerranéenne. Je n’oublie pas de lancer la playlist « vagues » pour profiter du ressac et des cormorans, ni les petits verres en plastique garnis d’eau congelée disposés devant le susdit ventilo, donnant illico l’illusion d’une brise rafraîchissante.

En fin de journée, à l’heure où s’élèvent de chaque balcon des effluves de sardines grillées et que s’entrechoquent les verres de pastaga, nous allons dans les parcs. Avec cette impression de traverser un lotissement en bord de Grande Bleue avant d’arriver dans quelque arrière-pays où, entre chênes verts et garrigues, exploserait le chant des cigales.

Au coin de la rue, l’inénarrable Place Pinel a engrangé ses mystères et sa magie. Entre boulodrome et caniparc se dresse l’imposant kiosque à l’écho central et aux poteaux murmurants, tandis que les kabbalistiques tilleuls et platanes veillent sur les passants accablés de chaleur.

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Lovée paresseusement sur un banc devant le Jardin Japonais du parc Compans, je peux observer les sages sillons tracés au râteau sur les graviers non loin de la pagode. En admirant les nénuphars et les collines d’herbe rase, je me crois réellement au pays du Soleil Levant.

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À moins que mes pas ne me portent vers le Jardin des Plantes, où les arbres plusieurs fois centenaires veillent sur les Toulousains reconnaissants qui cheminent entre catalpas et tilleuls, au gré des allées alanguies.

Il y avait cette rose chavirant dans le soir
Vaisseau pourpre et lumière pavillon des espoirs
Embaumant crépuscule et glissant veloutée
Barcarolle fragile en esquif des étés

Au creux des mille allées s’ébattaient des enfants
Landaus bleus et cerceaux comme en siècle d’antan
Au cristal de ces rires un guignol surgissait
La calèche promenait et les pleurs s’apaisaient…

http://www.oasisdesartistes.org/modules/newbbex/viewtopic.php?topic_id=89716&forum=2

Les dimanches, au kiosque, on peut guincher comme en bord de Marne, entre langoureuses milongas et lindy hop déchaîné… Et l’on se prend à rêver qu’à la rentrée, on franchira enfin le pas pour pousser la porte d’une école de danse et se la jouer Fame ou Argentine…

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Parfois, l’eau verte du Canal me mène presque jusqu’à la mer, quand je longe les rives envahies par les ajoncs et l’onde immobile où se mirent des saules et des platanes un peu fatigués.

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Et bien sûr, auparavant, puisque les consignes de St Manu de Brégançon nous ordonnent d’aller « dans des endroits réfrigérés », j’ai le choix : emprunter ad libidum ma chère ligne 16 L1 dont la clim bruyante et glacée ravit mes amis les chauffeurs qui, du haut de leur bermuda sexy, se la jouent parfois guides de bus touristiques ; là, je peux m’imaginer découvrir les hauts-lieux de la vie toulousaine sans dépenser un cent de plus que mon abonnement Pastel, revisiter le monument aux Morts à François-Verdier, admirer la fleur de corail de la basilique Saint-Sernin…

Aucun texte alternatif disponible.

Ou encore profiter de ma dernière découverte estivale, elle aussi 100 % gratuite : flâner dans les allées propres et bien achalandées du Carrefour Market Compans dans le centre commercial « Reflets » et y jubiler en voyant des prix bien plus accessibles que dans mon habituel Casino Saint-Georges, avant de partir arpenter, en soirée, les méandres du superbe parc voisin…

Et Garonne… Ne pas oublier Dame Garonne, qui nonchalamment serpente entre briques et tuiles… Y marcher vous transporte immédiatement dans un tableau d’Henri Martin, et l’on se plaît à rêver à Bordeaux, la ville océane, qui accueillera les flots prêts à goûter au sel de l’Atlantique, et à nos chères Pyrénées dont on peut presque sentir la majesté et la fraîcheur… La nuit, les quais se font cour des miracles, accueillant toute la jeunesse toulousaine pour des nuits fauves et colorées.

L’image contient peut-être : plein air et eau

Enfin, les fontaines elles aussi ont un goût de plage, lorsque les enfants s’y ébattent comme si ils dévalaient des dunes, méduses aux pieds… Avec un peu d’imagination, derrière le Capitole, on pourrait presque entendre « Chouchous…Beignets aux pommes « et voir des parasols…

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Il existe aussi d’innombrables activités estivales permettant de pallier à l’infini un non départ en vacances lorsque l’on reste cloué chez soi par temps de canicule : ouvrir la malle des albums photos des enfants et se souvenir de la joie que nous avions à les confectionner, en ces temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître ; relire des lettres d’amour – idem pour les moins de 20 ans… ; jeter des factures payées depuis 10 ans ; se mettre au crochet ; découvrir un nouveau réseau social ( je viens par exemple de m’inscrire sur « Insta » et tente d’y poster les milliers de photos engrangées sur Facebook. Jonglant entre l’application layout qui permet de poster plusieurs images et l’indispensable Linktr.ee autorisant les supra narcissiques tels que moi à mettre des liens dans la « bio », je me la suis jouée geek et ai eu l’impression d’habiter avec Sheldon et Amy… À moi bientôt un flot de followers à faire pâlir Beyonce…)

https://www.instagram.com/sabine_aussenac/ ; jeter un œil sur ses anciens carnets d’adresse en tentant de se remémorer les visages de tous ces noms oubliés…

Lire, bien sûr ! Relire, découvrir, s’évader, dévorer, déguster, tout, pêle-mêle, les polars suédois de la médiathèque, les trouvailles de la boîte à livres de la rue, les mis de côtés pendant l’année, et puis les magazines, les fanzines…

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Ma vie comme un roman

Ma vie comme un roman
De mille cinq cent pages
Un suspense haletant
Et tant de personnages
Un style foisonnant
Beaucoup de mots tocsins
L’intrigue me plait bien
Ca fait passer le temps
Parfois c’est du théâtre
On dirait Cléopâtre
Sans les didascalies
Je me meurs je m’enfuis
On veut tuer la reine
Tous ces amants jaloux
Tragédie maux et peines
Catharsis qui rend fou
Je vis en roman russe
Karénine ou Lara
En mille bleus de Prusse
Je m’envole vers toi
Saga américaine
J’y parcours grandes plaines
Ils ont brûlé Tara
Mais Scarlett reviendra
Parfois en baie d’Along
Je me rêve un amant
Ma plume a les dents longues
Au gré des Hurlevent
Mon Heathcliff et mon Rhett
Me font tourner la tête
Parfois c’est un poète
Si jeune et si esthète
Je me coule en ses vers
J’y renais liberté
Diable au corps nuits d’enfer
Il m’offre éternité
Que jamais ne finisse
La saga de nos jours
Fleurs du mal ou clarisse
Oui j’aimerai toujours.

Et, aussi, se souvenir des chaines gratuites de notre box et du replay. Se faire toute une saison d’Alice Nevers, revoir Nord et Sud, faire découvrir Visconti à mon fils, m’abrutir devant les romances de la télé allemande : que du bonheur !

Enfin, la nuit… Pourquoi s’échiner à faire comme si de rien n’était en étouffant dans une chambre caniculaire ? Là encore, rêver… Se dire qu’on est dehors, à la belle étoile, dans quelque prairie embaumant les fleurs sauvages, ou sur une plage de sable blanc… S’endormir au son des grillons dont le stridulement nous bercera, imaginer un feu de camp non loin de nous et y voir des jeunes gens enlacés au son de quelque Hallelujah ou d’un standard d’Ed Sheeran, et, pourquoi pas, penser à une main caressant la nôtre.

In bed with Justin Nozooka

Le feu de camp me semble indispensable.

Et des étoiles. Bien sûr, il y aura des guitares, le ressac et cette légère brume qui descend sur l’océan.
A moins que nous ne soyons dans une prairie, l’amour en saison sèche, enveloppés dans ces myriades odorantes de foin coupé ; les cigales, assourdissantes, se sont tues à la levée de la lune, mais le doux frou-frou des grillons demeure, et ta main dans la mienne.

Nous ne sommes pas seuls, bien sûr. Ton été est celui de ta horde. Les bouteilles passent de rêve en rêve, une fille danse près du feu, elle est sublime, tout simplement.
Mais ta main est bien dans la mienne, malgré les petits froissements de mon âme, qui se lisent au coin de mes yeux verts.

Tu dis qu’ils ont la couleur de la forêt enchantée, celle de nos enfances.

Somme toute, le temps n’existe pas. Nous avons été des enfants, et nous restons les enfants du soleil. Qu’importe le fait que j’ai grandi avec Pimprenelle et Zorro, et toi en compagnie des Pokémons ?
A quinze ans, nous avons lu Rimbaud. A seize ans, nous avons écouté Morisson et Léo.
Arthur, Jim et Léo sont intemporels, tout comme cette nuit, notre nuit.

Il faut vivre. Maintenant. Tu me dis que tu as l’âge de quitter le monde, car tu en connais la laideur.

Viens, écoute les vagues, elles te disent les pays qui te tendent les bras, et ces cieux infinis qui murmurent là bas.
Viens, regarde les étoiles, elles brilleront un jour au-dessus de la maison où une femme donnera le sein à ton enfant.
Viens, prends-moi dans tes bras. Ne pense plus à ce mal qui envenime tes lèvres, ni à l’humain qui te maudit dans la fièvre.

Vois mes yeux qui lisent en toi et les plaines que je t’offre, tu y seras le cheval fou et les mille paysages.

Sens ma main sur tes cheveux et l’amour fou qui te caresse, et aime la nuit qui descend sur nos folies.

Nous partons dans les dunes où murmure la lune, ou à l’orée du bois éclairé par les Rhunes.

Justin Nozooka chuchote ses complaintes aux quatrains flamboyants, nos amis dansent et boivent les vins aux saveurs d’une absinthe.

Tu me coucheras sous les genêts sauvages ; tu ôteras délicatement mon infime corsage : en embrassant mes seins comme on goûte un poème, tu sauras mon amour que je deviens ta reine.
http://www.oasisdesartistes.org/modules/newbbex/viewtopic.php?topic_id=81059&forum=3

 

Il ne fait pas chaud. Il fait bon, vous aimez l’été, et même la canicule. Vous y repenserez avec une infinie nostalgie en rentrant, les soirs de brouillard et de neige sale fondue, portant un pull qui gratte et un gros sac de courses, après avoir raté un bus bondé.

Enfin, je dédie ce texte à tous les courageux et valeureux non aoûtiens qui travaillent dur et suent sang et haut, sur des échelles de chantiers, dans des salles d’opération surchauffées, devant des fourneaux fournaises, auprès de personnes âgées ou de malades en souffrance, dans des commissariats miteux, dans des bureaux non climatisés…

NB : THERMIDOR : mois de la chaleur , des bains 11ème mois du calendrier Républicain ( 20 juillet / 18 août )

Encore un été…


Encore un été sans la plage
Sans cigales et sans tournesols
Sans l’odeur du grand large
Et sans ombrage de parasols
Encore un été sans ce sable
Tendre fin et si doux
Sans rires joyeux et grandes tables
Sans cousinades et guilledoux
Encore un été sans Provence
Sans lavandes et sans froufrous
Sans marché à Saint-Paul de Vence
Sans festival au Puy du Fou
Encore un été sans valises
Faites et défaites gaiement
Sans robes légères insoumises
Sans regards brûlants des amants
Encore un été sans sourires
Sans ribambelles d’enfants
Sans monopoly sans fou rires
Sans prendre la clef des champs
Encore un été sans cerises
Sans courses folles en plein vent
Sans sursauts et sans surprises
Sans le parfum de l’Autan
Encore un été sans amis
Qui partageraient pâtes fraîches et rosé
Mozzarella salade de riz
Et plongeraient dans mon décolleté
Encore un été sans Paris
Sans arpenter les Champs
Sans bateau mouche café hors de prix
Sans Notre-Dame et touristes priant
Encore un été sans toi
Qui conduirait sur cette petite route
Qui me guiderait dans l’étroit
Passage de mes doutes
Qui tiendrait fermement ma main
Tout en haut de la falaise
Qui me montrerait Etretat
Et aimerait même mes fadaises
Qui découvrirait mes Cathares
En escaladant Montségur
Qui rirait de vieilles tares
Et me ferait sentir secure
Encore un été sans nous
Nous baignant nus sous la cascade
Et riant comme jeunes fous
Au gré des vents et cavalcades
Encore un été solitaire
Passé à faire et à défaire
A mettre petite vie en terre
En trébuchant sur lourdes pierres
Encore un été nomade
De juive errante dont seule patrie
Sera décidément aubade
Sornettes rêves et poésies.

 

http://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/actualite/ecrits/item/l-escarpolette

https://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/reforme-grandes-vacances_b_2769627.html

 

Une part de Sachertorte… #carnetdevoyageVienne2

Une part de Sachertorte…

Un moment exquis…

 

 

 

 

 

 

 

 

« Tradition ist nicht die Anbetung der Asche, sondern die Wiedergabe des Feuers. » (« La tradition n’est pas la contemplation idolâtre de la cendre, mais la passation du feu »)

Gustav Mahler

Certes, on pense plutôt à l’Allemagne lorsque l’on évoque les pâtisseries si typiques, évocatrices de nuages de chantilly, de devantures chargées d’immenses créations roboratives et consistantes, de celles qui vous laissent un souvenir inoubliable…

Mais l’Autriche n’est pas en reste, entre la fameuse Linzer Torte, le Apfelstrudel et surtout l’inénarrable Sachertorte. Il est tout bonnement impensable de quitter Vienne sans avoir éveillé ses papilles au gré de la rencontre avec ce gâteau d’exception, au cœur fondant et aux arômes incomparables. J’ai quant à moi décidé que c’était LE gâteau qui me correspondait le plus, à mi-chemin entre les mastodontes allemands, certes crémeux à souhait, mais qui tombent directement sur les hanches, et les légèretés hexagonales sur lesquelles trois poires effilées se battent en duel avec un liseré chocolaté -ce qui ne suffit jamais à combler mes appétences de bec sucré…

Des Sachertorten, à Vienne, vous en trouverez partout, dans toutes les pâtisseries et bien entendu dans chaque café, puisque l’ancienne capitale austro-hongroise regorge d’établissements au charme désuet, aux boiseries discrètes et patinées et aux cuivres rutilants.

Mais la véritable, l’unique, la divinissime tarte Sacher se déguste bien sûr de préférence au sein même du café éponyme, situé à quelques encablures du musée de l’Albertina et de l’office de tourisme. Il est aisément repérable à la foule de gens se pressant sagement, en file policée, à l’entrée de sa devanture, attendant en rang serré l’accès au Saint Graal pâtissier. On viendra vous chercher, vous débarrasser du vestiaire et vous conduire à votre table, dans l’une des deux salles sises de part et d’autre de l’entrée de l’hôtel, comme si vous étiez un invité de marque. Comment, d’ailleurs, ne pas se sentir l’âme aristocratique en trônant dans l’un des fauteuils capitonnés, entouré par les dorures et les tableaux, lorsque l’un des serveurs vient vous demander quel sera votre choix, entre un grand ou un petit Brauner, ce café noir servi avec un petit pot de crème parfumée au café, ou un Mozart, qui est en fait un grand moka parfumé au cherry, pour ne nommer que deux des innombrables possibilités…

Votre Sachertorte vous sera servie agrémentée de délicieuses petites collerettes de papier à l’effigie du lieu, avec le célèbre « S » faisant office d’armoiries, et vous aurez dès lors tout le loisir de plonger dans l’audacieux mariage inventé en l’an de grâce 1832 par le jeune apprenti Franz Sacher, qui, à peine âgé de seize ans, remplaçait son chef pâtissier dans cette confection demandée par le prince Klemenz Wenzel von Metternich. C’est à cette occasion que Franz inventa sa génoise cuite dans un moule rond, puis séparée en deux parties et fourrée de confiture d’abricots chaude avant d’être recouverte d’un glaçage de plusieurs chocolats noirs et consommée avec un nuage de chantilly…

Même si ce gâteau fut un succès lors de sa première apparition à la cour, il fallut attendre la naissance de l’hôtel Sacher, fondé par le fils de Franz, Edouard Sacher, pour que la tarte devienne la star de la carte de la grande maison et très vite l’emblème culinaire national et l’ambassadrice sucrée du savoir-faire autrichien…

C’est surtout la finesse de ce mets qui surprend lors de la mise en bouche, et la légende prête à sa confection une recette secrète que se disputèrent longtemps deux grandes institutions viennoises, avant que la justice ne fasse de l’hôtel Sacher, devant son concurrent du café Demel, le seul détenteur du label « Sachertorte ». Et il se murmure aussi que le gâteau serait encore fabriqué à l’ancienne et à la main, ce qui expliquerait sa texture si fine et si goûteuse.

Mais la Sachertorte est loin d’être l’unique trésor du lieu… C’est bien tout l’établissement qui mérite sa place de choix dans la réputation des hauts-lieux viennois… L’hôtel de luxe et le restaurant mené de main de maître par un chef étoilé viennent couronner le succès d’une saga familiale séculaire. « Sacher », ce seul nom fait partie intégrante du patrimoine viennois, cœur battant de la ville, jouxtant opéra et palais, accueillant en une joyeuse hospitalité musiciens, écrivains et politiques, et surtout le traditionnel dîner de gala au sortir du célèbre bal de l’opéra…

Et bien entendu, c’est tout au long de l’année que les Viennois et les touristes se pressent pour s’attabler dans les salons Mayerling et Metternich, pour siroter un cocktail dans le célèbre « bar bleu » (die blaue Bar), quand ils ne profitent pas du spa avant de se faire livrer une part de Sachertorte directement dans leur chambre… Et, si je dois avouer que j’ai pour le moment trouvé des solutions alternatives pour loger à Vienne, je ne rêve que de devenir une romancière à succès pour enfin goûter aux charmes de ce palace, aristocrate de cœur que je suis…

 

https://www.youtube.com/watch?v=rQgVRKWAdyU

L’hôtel Sacher n’a jamais souffert de la concurrence des géants que sont le Bristol ou le Park Hyatt, au vu de sa qualité de seul hôtel de luxe tenu par une famille et non par une « chaîne », famille qui plus est la même depuis 1945, lorsque la dynastie des premiers propriétaires fut remplacée, après une faillite, par la famille Gürtel, toujours aux commandes du navire…

C’est bien cependant la « patte » de la légendaire Anne Sacher, femme de tête et de cœur, toujours affublée de ses cigares et de ses deux bouledogues français (die Sacher Bullys!) qui a profondément marqué l’établissement, puisque la veuve d’Edouard Sacher a su fédérer diplomates et artistes autour de sa faconde et de sa bienveillance – elle avait même créé une assurance sociale pour son personnel…

     

Excentrique et passionnée, elle avait par exemple brodé elle-même une immense draperie sur laquelle sont encore exposées aujourd’hui dans un hall les signatures de toutes les personnalités ayant séjourné à l’hôtel !

De nombreux portraits de la reine des lieux ornent encore les couloirs du palace, où l’on peut d’ailleurs aussi admirer une impressionnante galerie de têtes couronnées et de personnalités aussi diverses que Sir Elton John ou Sharon Stone en miroir de Sissi ou de Metternich!

 

Et c’est tout l’hôtel qui est ainsi royalement décoré de tableaux, parfaisant l’atmosphère inégalable de luxe et de raffinement alliés à la culture et au savoir, faisant du Sacher un haut-lieu des rendez-vous de l’Histoire, cité dans de nombreux romans, tout comme la Sachertorte, d’ailleurs,  et mis en scène, aussi, dans le film éponyme de 1939 et dans une récente fiction en deux parties coproduite par les chaînes allemandes et autrichiennes ZDF et ORF.

https://www.youtube.com/watch?v=yOGLL8HabjI

https://www.youtube.com/watch?v=WYQlMeBFu9k

L’antichambre du paradis…

                                   

 

 

 

 

 

 

 

Et l’on aime à se souvenir de ces élégantes des siècles passés, froufroutant jusqu’aux fameux « séparées », ces petites alcôves intimistes où les galants retrouvaient leurs bien-aimées après le concert, lorsque l’on ose un instant se prendre soi-même pour un membre de l’aristocratie austro-hongroise, le temps d’un parfum de la Sachertorte…

Anne Sacher devant la nappe brodée par ses soins…

« Typisch für Wien, und nur für Wien, ist nach wie vor, dass die Legenden funktionieren. » (« Ce qui est typique de Vienne, et seulement de Vienne, c’est que les légendes fonctionnent encore »)

Friedrich Torberg

Hôtel Sacher

 

Abricotiers d’antan

fèves fines

d’Afrique un soupçon de

nuage fouetté

or du S ciselé

cristal de

Bohème en discrètes

« séparées »

où murmurent cocottes

corsetées et archiducs

guindés

Sissi sourit suave mirage

 Anna S. brode

signatures

tandis que les élégantes

en crinoline

volettent en mémoire viennoise.

https://www.austria.info/fr/activites/decouverte-culinaire/recettes-autrichiennes/sachertorte

https://www.sacher.com/hotel-sacher-wien/

https://www.zdf.de/filme/das-sacher

 

 

 

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Vivre libre…Et sans permis!

Vivre libre

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https://www.youtube.com/watch?v=Xzbrjxqwpoo

 

Je n’ai pas le permis. Je ne l’ai jamais passé ; et j’ai 55 ans.

Quand je lance cette phrase lors d’une conversation, entre amis ou dans une salle des profs, on me regarde comme si j’étais la grande sœur d’ET et que j’arrivais d’une autre planète.

  • Mais tu l’as raté ?
  • C’est à cause de ta myopie ? (Oui, on me confond parfois avec Nana Mouskouri…)
  • Et tu ne veux pas le passer, maintenant que tu as eu l’agreg ? (Sous-entendu : « Depuis 30 ans que tu la passais, on te comprend, tu n’as pas trouvé le temps pour le permis… »)

Non, je n’ai pas envie de « le » passer.

Parce que je vis très bien sans. Parce que j’ai élevé trois enfants sans l’avoir, parce que je vais travailler sans voiture, parce qu’il m’arrive même de voyager..

Comment fait-on pour vivre comme une star de l’empreinte carbone, et comment peut-on en arriver à ce défi écologique permanent ?

Au début, il y eut l’accident. Je vous parle d’un temps où les ceintures n’existaient pas…Une petite fille de six ans a donc été projetée depuis la banquette arrière, où elle dormait, sous le siège du conducteur où dormait aussi le cric – mon père a toujours eu un sens assez personnel du rangement. Fracture du crâne, solitude d’hôpital, cicatrice visible, et très vite kilos en trop liés à l’interdiction de courir, de bouger comme « avant » …Bon, c’était sympa, ça a permis de varier les surnoms, à « Hitler » – mes origines allemandes- se sont ajoutés « Bouboule » ou « Patate ».

Ma peur de la vitesse et mon vertige sont bien entendu liés à ce traumatisme, et, faute d’avoir vu des psys – ce n’était pas encore tendance -, je vis donc sans prendre l’escalator qui descend, et n’ai jamais imaginé pouvoir emprunter, au volant d’un véhicule, une rocade ou une autoroute…

Ensuite, il y eut mon premier mari, le cheminot. Nous nous mariâmes alors que j’avais encore les joues rondes de l’enfance et arpentâmes l’Europe en vélo…et en train gratuit ! Que de beaux souvenirs dans ce passé de cyclotouriste, entre lacs de montagne autrichiens et pistes landaises…J’en ai gardé des mollets de campeuse, le goût des petites routes de campagne et une nostalgie délicieuse du vent qui fouette le visage, même si depuis un autre accident, en 2013, lorsque j’embrassai, pourtant à pied, mais en frontal et avec élan et sans les mains une plaque d’égout, je n’ai plus osé enfourcher de bicyclette…

C’est à la même époque, d’ailleurs, que je me déclarai officiellement « écolo », entre un mémoire de maîtrise consacré aux mouvements alternatifs allemands, mes premiers Birkentocks et ma tendresse pour Dany le Rouge. De voiture, il n’était absolument pas question, puisque nous vivions en moulant le café au moulin à grain et en nous chauffant avec un poêle à charbon, rêvant, en bons post soixante-huitards, d’un retour à la terre ; d’ailleurs j’avais aussi en tête l’exemple de ma marraine hollandaise qui nous rendait visite chaque année et nous parlait de ce pays où, déjà, la « petite reine » était reine !

Ce sont donc les trois arguments que, ma vie durant, j’ai avancés pour justifier ma déviance non motorisée.

https://www.youtube.com/watch?v=QVHf1D91jTA

Oui, c’est effectivement possible : de vivre sans posséder le fameux sésame rose, d’amener les enfants à l’école à pied ou en bus, de faire les courses avec un caddy, de partir au travail grâce aux transports en commun, et de prendre le train pour rejoindre la plage ou la montagne…

Bon, je ne vous cache pas que tout n’est pas rose, et qu’il faut à la fois posséder un sens de l’organisation quasi germanique et faire preuve d’inventivité ; il faut jongler avec les horaires de train, de bus, de métro, se lever plus tôt, renoncer aux grandes surfaces, voyager (en principe) léger, et ne pas craindre la pluie et le froid.

Certains moments sont extrêmement désagréables, comme lorsque vous traversez des dizaines de wagons d’un train d’été en portant 5 ou 6 sacs, une enfant en bas âge, poussant en plus un landau et tirant un teckel, sous le regard impavide des voyageurs. De même qu’il est fort ennuyeux de monter marche à marche des escaliers de métro avec un caddy empli à ras bord, que vous rentriez des courses ou que vous partiez en WE – je sais, ce n’est pas très glam, mais il m’arrive de voyager avec ce fameux caddy que j’ai surnommé « ma Ferrari ».

Déménagement de Auch vers la Ville Rose...Et en partie en caddy!
Déménagement de Auch vers la Ville Rose…Et en partie en caddy!

Je me souviens aussi de cette année où le rectorat m’a envoyée à St Girons, alors que je vivais à Toulouse…Lever 4 h 30, puis bus-métro-TER-car, avec une heure complète de ce dernier, pour arriver en cours à 8 h (et avec le sourire !) Je vous passe les années où je vivais à Auch en travaillant à L’Isle-Jourdain ET Toulouse -respectivement 40 et 80 km de distance-, les petits matins blêmes où je me sentais très parisienne avec mes deux heures trente de transport – 1 h  30 de TER plus les trajets à pied et bus…(sans compter les centaines de journées de grève et/ou de travaux de la SNCF…)

Pour les courses, je jongle aussi, le LIDL du Canal, les moyennes surfaces du quartier, le Leader Price en rentrant du travail, le marché…On fractionne, on réfléchit, et on tire la charrette comme une marchande de quatre saisons, badant avec les commerçants et évitant la cohue des grandes surfaces…Oui, j’ai une névralgie cervico-brachiale chronique – une « sciatique du bras » – , non, je ne peux pas prendre d’anti-inflammatoires, oui, ça fait mal, et j’ai en plus des lumbagos et des soucis de genou, mais si j’avais une voiture je pense que je pèserais dans les 100 kilos, alors je me dis que c’est pas mal de marcher…

Je connais tous les chauffeurs de ma ligne de bus par les prénoms, et aussi les caissières. Ne pas avoir le permis, cela renforce aussi le lien social, on se parle, on se connaît, on se sourit.

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Bien sûr, cela génère aussi des frustrations que de ne pas pouvoir s’évader « librement ». Pas tellement lorsque l’on habite en ville -Toulouse, Clermont-Ferrand, Bruxelles…m’ont ravie par les libertés de circulation qu’elles offrent -, même s’il est aussi très frustrant de ne pas pouvoir facilement faire une petite virée dans une ville pourtant toute proche…Mes enfants ne sont jamais allés, par exemple, visiter l’Aveyron ou le Lot, j’aurais rêvé de leur faire découvrir la craie blanche et la vierge noire de Rocamadour, ou les caves de Roquefort et l’abbaye de Conques…Pour aller « à la mer », depuis la Ville Rose, il faut, l’été, se lever dès potron-minet pour prendre le Train des Plages, c’est vraiment contraignant, sans parler du parasol à caser sur les filets…Et il n’est quasiment pas possible d’aller « en forêt » depuis Toulouse, car les bus du Conseil Départemental, qui rallient les villages, ne circulent qu’en semaine…Pas de bras, pas de chocolat, pas de voiture, pas de châtaignes, pas de cèpes, pas de clairières…

Et c’est bien lorsque l’on vit dans une petite ville que les choses se corsent, avec les rares bus qui ne circulent pas le WE, qui s’arrêtent à 19 h, et avec l’immense sensation de frustration engendrée par une merveilleuse nature à portée de vue, mais factuellement inaccessible. De mes sept années passées dans le Gers, je garde en mémoire beaucoup de belles choses, mais hélas aussi ce terrible sentiment d’impuissance devant le manque cruel d’infrastructures de transport : j’ai été privée non seulement des festivals de musique – Jazz in Marciac, la Country de Mirande – quand je ne trouvais pas de covoiturage, mais aussi des marchés de nuit, de belles randonnées collinaires, bref, de tout ce qui fait le charme d’un département rural, faute de véhicule. Et il est clair que vivre en pleine campagne, ou dans un village, relève d’une gageure lorsque l’on n’est pas motorisé…

http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2011/07/09/2544635_assignee-a-residence-par-l-etat-francais.html

C’est aussi en ce sens que je suis si douloureusement privée de ma maison de famille tarnaise, faute de pouvoir m’y rendre quand bon me chante…

La balle est dans le camp de nos dirigeants. Et, à mon humble avis, pas seulement avec ces histoires de plaques impaires et de particules fines, car ces dernières sont bien là à l’année, pas seulement les jours de pollution aggravée…

Oui, on peut vivre sans voiture, oui, c’est un choix de vie intelligent, mais qui ne mérite pas tant de sacrifices. Il suffirait de peu de choses -et cela créerait tant d’emplois et redynamiserait tant de communes rurales et de déserts médicaux…- pour redonner vie aux campagnes françaises en instaurant des infrastructures adaptées, qui permettraient aussi à de jeunes familles de vivre au Vert même sans véhicule ; lignes de bus, lignes de train, et aussi maillage assidu des pourtours d’agglomérations, à l’image de ce qui se fait par exemple en Allemagne, où vous pouvez vivre à Berlin, mais aussi au fin fond de la Bavière ou des îles de la Baltique avec des dizaines de transports en commun devant votre porte, de jour comme de nuit…

Oui, on pourrait aussi à l’instar de ce qui se fait dans les pays nordiques interdire presque entièrement l’usage des véhicules en ville.

Et imaginer de nouvelles et/ou d’anciennes solutions…En vrac, le téléphérique, les voies navigables, des TER à foison, le cheval – et pourquoi pas ?-…

Ensemble, agir.

Et, comme le disait déjà l’empereur Guillaume II :

« La voiture est une invention qui ne durera pas.

Je crois au cheval. »

https://www.youtube.com/watch?v=LvTgpHi76oM

Quelques photos de voyages…

https://www.facebook.com/sabine.aussenac/media_set?set=a.3727758829379.2135687.1138188420&type=3

 

 

 

Arash Derambarsh : un élu en croisade contre le gaspillage

Arash Derambarsh, élu « Les Républicains » de Courbevoie, est à l’initiative de la loi contre le gaspillage alimentaire.

Il revient sur la loi votée à l’unanimité au Sénat, le 3 février 2016.

Voici son interview sur une pleine page dans le journal « Nice Matin et Var Matin ».

L’article est intitulé « On ne peut plus jeter de la nourriture ! »

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 À lire également sur Arash Derambarsh :

 

Noël en cours d’allemand:) Un avant-goût depuis la Ville Rose…

Frohe Weihnachten! Bientôt Noël, la plus grande fête allemande!


Dimanche, ce sera le premier dimanche de l’Avent: en effet, en Allemagne et dans les pays de langue allemande, on est déjà dans l’atmosphère de Noël, la fête la plus importante de l’année, dès ce jour-là. On fabrique une couronne en sapin, ornée de quatre bougies qui seront allumées une à une, chaque dimanche, jusqu’à Noël:
Le 6 décembre, on fêtera aussi la célèbre « Saint-Nicolas »! Les enfants mettront leurs chaussures devant la porte de leur chambre, et, s’ils ont été sages, ils recevront des sucreries et des cadeaux. Attention, ce n’est pas comme en Belgique, où l’on célèbre Noël par anticipation ce 6 décembre; mais c’est une tradition importante, et parfois, même, les enfants recevront une petite surprise tous les matins…http://gfvimoutiers.pagesperso-orange.fr/Coutumes/noel.de/nikolaus.html
Mais…ce n’est pas tout! Les enfants allemands adorent aussi ouvrir les petites fenêtres de leur Calendrier de l’Avent: der Adventskalender. Ainsi, chaque matin, on ouvre une petite fenêtre derrière laquelle se cache un chocolat!
Nous partagerons bien sûr cette ambiance festive au collège! Je vous ai déjà acheté quatre calendriers, un par classe, et, dès lundi, nous terminerons chaque cours (si vous avez « été sages »!!) par un quizz; et les chocolats seront distribués…Attention, si la classe a un comportement dérangeant… le chocolat du jour sera offert…à un professeur wink!smiley
Les thèmes des quizz:
– En troisième: savoir donner des noms de pays en allemand
– En quatrième: trouver des villes allemandes
– en cinquième: trouver des noms d’animaux, d’arbres, de fleurs
– en sixième, puisque vous l’avez appris avec notre assistante, les aliments!
Nous préparerons aussi une petite fête de fin d’année -une par classe!- mais attention, seulement si VOUS apportez des pâtisseries de Noël faites maison, les fameux « Plätzchen »!
Je vous donnerai bientôt de délicieuses recettes! Comme:
Bien sûr, nous apprendrons aussi un chant de Noël, comme:
Enfin, pourquoi ne décorerions-nous pas notre belle salle , déjà enrichie par vos exposés, de quelques touches de couleurs, avec des guirlandes, ou même une couronne d’Avent?
Pour terminer, je vous signale que vous trouvez, de nos jours, des sucreries de Noël allemandes dans de nombreux magasins, comme le « Marzipan » -pâte d’amandes entourée de chocolat-ou le « Stollen », (le gâteau de Noël), ou comme des pains d’épices. Vous en trouverez à très bon prix dans la chaîne de magasins LIDL-d’origine allemande- mais aussi d’excellente qualité dans la boutique « Heimat », à Toulouse, qui offre, dans un très joli cadre familial, de superbes choix de gâteries de Noël, en plus de toutes les denrées en provenance d’outre-Rhin!
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Ce n’est pas grand-chose, 40 euros…

Ce n’est pas grand-chose, 40 euros…

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Ce n’est pas grand-chose, 40 euros.

 Non, Monsieur Valls, ce n’est pas grand-chose, 40 euros. C’est le quart d’un manteau d’hiver, si on a un peu froid et que le nôtre est vraiment rapiécé de partout, même si on l’a soigneusement entretenu. C’est moins que le prix de la visite chez le spécialiste, vous savez, celui pour lequel on doit patienter six mois, et puis on ira à pied, ou en bus, même si on s’est cassé récemment le col du fémur, parce que la mutuelle ne prend pas en charge les taxis non conventionnés et puis qu’on ne va pas en plus revenir voir le docteur pour payer encore 23 euros et avoir cette autre prescription.

40 euros, ça nous fera un bon plein au LIDL ou chez Aldi, parce qu’on a pas vraiment la force de traverser la ville pour aller acheter les produits à un euro de chez Auchan, et puis si on habite à Paris, ce sera encore plus compliqué, parce que Franprix, ça reste rudement cher…40 euros, c’est ce qu’on dépensait, il y a longtemps, quand on allait en vacances, avec Ginette, ou avec Roger. On s’en payait, du bon temps, c’est vrai, Monsieur Valls, ce n’était pas grand-chose, 40 euros, enfin nous, on comptait en francs, et avec cette somme, qu’on dépensait en une belle journée d’été, on se faisait un petit gueuleton en bord de mer, quand on allait voir la mer, avant d’acheter des petits souvenirs pour les enfants, des bols avec le prénom, ou peut-être un collier de nacre…Avec 40 euros, en francs, donc, on faisait de belles courses, on pouvait acheter une jolie robe pour les dimanches, quand on était de communion, ou de la bonne nourriture, du gigot d’agneau, des fraises de pays, un bon petit vin chez le caviste…Si vous saviez, Monsieur Valls, les beaux dimanches qu’on avait, dans le temps…

Oui, Monsieur Valls, vous avez raison. 40 euros, ce n’est vraiment pas grand-chose…La voisine, elle ne les a même pas, cet argent-là, elle en rêve, quand elle fait la queue, le mardi, dans la petite salle du Secours Populaire, celle où les visages couperosés des SDF côtoient la dignité de tous ces petits vieux courbés, à la peau douce et parcheminée, qui se penchent au-dessus de leur caddy, dans la vieille odeur de robusta, le robusta qu’on boira dans les verres en pyrex récupérés à la brocante, le robusta servi par cette autre vieille dame qui, pour ne pas rester dans son appartement sans chauffage, vient aider à la distribution.

40 euros, on en rêve, nous aussi. Mais ce ne sera vraiment pas assez pour offrir des cadeaux de Noël aux petits-enfants, pensez, eux aussi ils en rêvent, l’aîné surtout, il avait tout pour réussir et ses parents se sont saignés pour lui payer une école très chère, mais malgré son diplôme il est livreur au Monoprix, et puis ils mettent du javel sur les poubelles, le gamin ne peut même pas récupérer les produits périmés, et puis la cadette elle est en apprentissage au village, elle aimerait bien aller vivre avec son copain, parce que les jeunes maintenant ils se mettent ensemble comme ça, mais vous savez, Monsieur Valls, c’est pas demain la veille qu’elle partira de chez nos enfants, parce qu’avec ce qu’elle gagne, la pôvrette, elle pourrait même pas passer son permis…

Mais merci quand même, Monsieur Valls, de penser à nous, parce que vous savez, on a encore toute notre tête, même Robert, mon copain de l’armée, avec qui je joue aux boules, ils disent qu’il a un début de Tzeimer, mais moi je parle avec lui et il me raconte comment c’est chez lui, maintenant que l’aide à domicile du Conseil Général vient pour faire le ménage, depuis que sa Colette a eu son attaque, et puis heureusement ils viennent aussi avec le repas, les gens de la Mairie, et je peux vous dire que mon poteau, c’est le seul repas chaud qu’il mange, parce que 40 euros, lui non plus il ne les a pas, avec sa retraite de peintre en bâtiment.

Alors voilà, Monsieur Valls. Je ne sais pas si je voterai encore une fois, je vis au jour le jour, je profite du soleil qui se couche sur le canal et j’écoute les enfants de la cité qui rient dans le parking, et ça me fait un peu de vie, et je me dis que peut-être eux ils en auront une de meilleure, de vie, mais c’est mal parti. Si Dieu me prête vie, me disait déjà ma ménine, ma mamie, au village, là-bas, dans les montagnes, je voudrais bien une chose, une seule : savoir que mes enfants et mes petits-enfants la verront encore, eux, la mer. Souvent.

 

http://www.franceinfo.fr/emission/noeud-emission-temporaire-pour-le-nid-source-713871/2012-2013/classes-moyennes-surendettees-pour-nous-c-est-ingerable

Tu m’as demandé de parler de l’été

Tu m’as demandé de parler de l’été

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Tu m’as demandé de parler de l’été…

J’eusse aimé te parler de l’enfance, de ces cent cigales emportées par l’Autan, des cieux immenses de la mémoire.

Mais mon été a froid.

Il frissonne devant un monde où des maîtresses reçoivent des coups de poignard dans leur peau douce en guise de ronde de fin d’année.

Il titube en sachant que des enfants tendres sont enlevés et torturés par leurs frères ennemis, de part et d’autre d’un Mur qui depuis longtemps vacille.

Il s’effondre quand je lis que des hommes se cousent des bombes sous la chair pour faire exploser des avions plein de femmes enceintes et de cris d’enfants joyeux.

Il hurle en silence en voyant l’inertie des puissants devant les ventres affamés des foules de plus en plus indigentes, sans parler de la Terre que nous dépouillons de concert.

Tu m’as demandé de te parler de l’été.

Le mien sera de glace.

J’ai acheté une glacière au bazar à deux euros et voulais aller vendre des bouteilles le long de Garonne, comme le font tous ces gens à Paris. Mais j’ai lu que c’était interdit.

J’ai imprimé mes poèmes et voulais aller les déclamer sous des kiosques en tendant un chapeau et mes sourires. Mais j’ai lu que c’était interdit.

J’ai cherché mes livres d’histoires et voulais les conter aux enfants dans les squares pour récolter trois sous et des rires. Mais j’ai lu que c’était interdit.

J’ai demandé au docteur de prescrire une cure à mon enfant qui tousse et à moi qui ne peux plus marcher. Mais la sécu ne rembourse les trajets et ne donne une aide au logement qu’aux très pauvres et je ne le suis que peu, juste assez pour que mon découvert se creuse comme une rivière asséchée. Et je vois que la cure nous sera interdite, car avec deux loyers de retard on ne prend pas de location, ni en montagne, ni au camping, ni à la mer. Alors mon enfant toussera à la rentrée et je boiterai encore.

Tu m’as demandé de te parler de l’été.

Le mien sera de plomb, attaché à la ville dont je ne sortirai pas, et il faudra déployer tous les trésors de l’imaginaire pour en faire une fête. Oh, je sais déjà qu’en l’absence de fiston, qui, grâce à dieu et à son père qui, s’il ne paye pas de pension depuis quatre ans, le prend au moins en vacances, je mangerai froid, irai dans les bibliothèques, écrirai un peu, et ferai contre mauvaise fortune bon cœur.

Il faudra comme chaque année depuis dix ans jouer à découvrir ma vie : me lever et déjeuner sur la terrasse aux tourterelles en bénissant cette aube neuve, et ces platanes de la Place Pinel qui frémissent en murmurant.

Me doucher longuement avec quelque huile parfumée, comme si ce massage m’était offert par quelque main experte, avant d’aller nager dans la belle piscine municipale avant que les hordes de gamins ne s’y jettent, m’imaginant en thalasso à Bandol, seule dans l’eau pure et miroitante.

Puis marcher dans les allées de ces parcs en respirant comme en forêt, y rêver de cerceaux et de billes, avant de plonger dans l’obscurité des musées et d’en lire les cent toiles.

Le soir, j’irai à tous les concerts gratuits ; à moi les orgues et trompettes, et puis tant de musettes.

Tu m’as demandé de parler de l’été.

Le mien rêvera de rivages. Des golfes infinis de ces mers couleur monoï,  des couleurs ocre de la Toscane où mille cyprès s’élèvent, de sous-bois parfumés et de landes violettes. Mon été arpentera les falaises de craie, mon été se tiendra devant les chutes du Niagara, mon été entendra un gospel dans cette petite église du Bayou, mon été sera flamenco. Mon été aura une odeur de sardines, et puis de feu de bois, quand sur cette plage infinie d’où partent des navires on dansera jusqu’au matin.

Mon été sera celui des « Dernières vacances », et comme Odile Versois je me réfugierai en rêve dans un pigeonnier pour échanger des premiers baisers maladroits ; mon été sera celui d’Isabelle Huppert dans « Villa Amalia », je me délesterai de tout ce qui m’englue et partirai, en robe de cotonnade légère, déguster l’inconnu ; mon été sera « La Baule-les Pins », j’y vivrai de roses trémières et de vagues, toute embuée de soleil.

Quand mon fils rentrera je lui ferai ses salades à défaut de lui en raconter, et puis nous irons chez mes parents et à notre « campagne », pourquoi donc me plains-je quand il y a cette datcha cernée de vallons et d’herbages, et la piscine au milieu des bois ?

Parce que j’eusse aimé avancer, enfin, vers de nouveaux rivages, et offrir la Californie à mon enfant, à défaut de cette Montagne Noire, même si je l’aime tant…

Tu m’as demandé de te parler de l’été.

Alors je t’offrirai, pour t’embrasser, notre occitane Louisa Paulin :

La cançon del silenci.

 Vèni, ausirem, anuèit, la Cançon del silenci,

 la cançon que comença,

 quand s’escantís, la nuèit, lo cant del rossinhòl ;

 la cançon que s’ausís al doç cresc de l’erbeta,

 la cançon de l’aigueta

 que se pausa, un moment, al rebat d’un ramèl ;

 la cançon de la branca

 que fernís e que dança

 desliurada del pes amorós d’un ausèl ;

 la secreta conçon breçant l’ombra blavenca

 del lir còrfondut de promessa maienca,

 qu’espèra, per florir, un signe del azur.

 La chanson du silence.

 Viens, nous entendrons, ce soir, la Chanson du silence,

 la chanson qui commence,

 quand s’achève, la nuit, le chant du rossignol ;

 la chanson qu’on entend à la douce croissance de l’herbe,

 la chanson de l’eau vive

 qui se repose, un moment, au reflet d’un rameau ;

 la chanson de la branche

 qui frissonne et qui danse

 délivrée du poids amoureux d’un oiseau ;

 la secrète chanson berçant l’ombre bleuâtre

 du lis défaillant de promesse printanière,

 qui attend, pour fleurir, un signe de l’azur.

 

http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2011/07/05/2540854_je-n-aime-pas-hollandais.html

 (article repris dans un Monde d’août 2009 et dans ce blog:

http://alain.laurent-faucon.over-blog.com/article-34731185.html )

Je n’aime pas les Hollandais

Je n’aime pas les Hollandais, trop blonds, trop grands, trop beaux. Et surtout, trop nombreux. Chaque année, c’est pareil, leur grande armada débarque, dès juin, et nous offre le spectacle de leurs nonchalances touristiques.

Ils sont partout. Sur les places et dans les églises, ne se taisant même pas pendant la messe. Au café et au restaurant. Dans les musées. Même le Lidl n’est pas épargné.

Bien sûr, je me dis que j’ai de la chance. Moi, la cathédrale de « my little town », je la vois tous les jours, de même que mes ruelles médiévales et mes collines. Je n’ai pas besoin de faire 1500 kilomètres pour me dorer au soleil dès le printemps, je vis dans un lieu chargé d’histoire, et je peux manger du foie gras (Lidl) à volonté !

Mais ces grandes invasions me renvoient bien douloureusement à mon immobilisme, à ma morte saison, à mon non-départ, en terre gasconne, enchaînée telle vilaine à son seigneur à mes indigences et à ce tourisme de proximité obligatoire qui est mon pain quotidien.

Oh ! comme j’aurais aimé, cette année, mettre le cap au nord, voir les champs de tulipes, même défleuris, arracher l’autre oreille de Vincent et m’illuminer d’ors flamands …

Ou, plus encore, descendre vers d’autres suds, plus lointains encore, ne serait-ce que vers ma mare nostrum, respirer l’odeur d’un vieux port et des salines, manger une glace en regardant la lumière du phare et rentrer à pas lents vers un petit patio bordé de lauriers-roses ! …

Mais je suis punie, en QHS de hautes terres, mon bracelet électronique en forme de soucis financiers m’interdit de sortir du périmètre de ma région, ma petite clochette de lépreuse sociale fait de moi une enfant des cités d’une nouvelle race, celle des sans-le-sou même s’ils en gagnent, celle des bannis des vacances.

Alors, pour me donner une contenance, je me maquille beaucoup et je joue les Françaises typiques, je lis un livre à la terrasse de mon café préféré et je m’en vais bronzer mon chagrin sur les berges de mon fleuve jaune, pas le Yangtsé, l’autre, le Gers …

 Enfin, rêvons un peu…

http://www.huffingtonpost.fr/sabine-aussenac/reforme-grandes-vacances_b_2769627.html

C’est d’abord cette perspective d’infini. Ce goût de la liberté. Cette antichambre du paradis. Souvenez-vous. Nous vidions les encriers pleins d’encre violette, recevions nos prix, promettions de nous écrire une carte.

Et puis nous rentrions, nos semelles de vents pleines de rêves, en sandalettes et robes d’été, pour affronter ces deux mois de liberté.

Les grandes vacances. Cette particularité française, aussi indispensable à la vie de la nation que la baguette ou le droit de grève. Les grandes vacances, celles qui d’un coup d’un seul amènent les Ch’tis jusqu’à Narbonne et font monter la Corrèze à Paris. Ces deux mois-là nous permettaient de vivre notre enfance. Jamais, jamais je n’oublierai la douceur de ces étés interminables. Chez moi, fille d’enseignant, ils avaient mille couleurs.

Le petit jardinet d’Albi et ses pommiers abritait la balançoire, le sureau et nos jeux innocents. L’impitoyable soleil estival jaunissait la pelouse et faisait mûrir les pommes, tandis que papa nous amenait à la piscine municipale.

Mais surtout, nous allions aux Rochers . Notre maison de campagne, celle que mes parents avaient achetée pour une bouchée de pain dans les années soixante, et où passaient les cousins et amis, au gré de longues soirées emplies de grillons et de fêtes. Il me faudrait mille ans pour raconter les orties et les mûres, les bâtons frappant l’herbe sèche des sentiers et le clapotis du ruisseau.

Parfois, nous descendions au village, et les adultes alors s’installaient à l’ombre des platanes au café de la place. Nous prenions des pastis et des Orangina, et au retour nous achetions ce bon pain de campagne au parfum d’autrefois. Un soir, sous les tilleuls, j’ai écouté Daniel Guichard qui parlait d’une Anna.

Les grandes vacances, nous les passions dehors, à cueillir des étoiles et à planter des rêves.

Parfois, nous partions à la mer. Il fallait la voir, la petite route qui quittait les plaines pour affronter les ravines, et puis soudain, au détour d’un causse, les cigales nous attendaient et nous guidaient vers la grande bleue. À Saint-Chinian, mon père achetait des bouteilles, et nous enfilions les maillots au crochet fabriqués par mamie.

C’est au café de la plage que j’ai entendu Julien Clerc chanter la Californie.

L’été avançait, nous brunissions, mes frères avaient les jambes griffés de ronces et moi les yeux rougis, à force de lire les Alice et les Club des cinq. Ma marraine de Hollande arrivait en train, et son époux, Camillo, faisait la vaisselle après les immenses tablées des cousinades. Il nous construisait des moulins sur les pierres du ruisseau, et je voyais en lui que l’homme parfois peut respecter la femme.

Nous comptions les semaines. La ligne de partage du temps, étrangement, n’était pas la fin juillet, non, plutôt la mi-août. Car mon père annonçait toujours, sentencieusement, que l’été est fini au quinze août, et c’est vrai que souvent le temps s’alourdissait vers cette période, comme si le ciel, imperceptiblement, prenait des tons d’automne.

Mais nous n’en avions cure, car souvent, nous avions déserté l’Hexagone pour franchir la ligne bleue des Vosges. Ma mère rentrait au pays et nous amenait outre-Rhin, et nous partions, au gré des routes de France, couchés dans la 404 de papa, buvant un chocolat à Limoges et reconnaissant ensuite, à la nuit, les phares blancs des automobilistes allemands. Parfois, nous prenions le train, le Capitole, qui, aussi interminable que l’été, serpentait entre les campagnes françaises. Je me souviens des Aubrais, et puis de ces premiers trajets en métro entre Austerlitz et Gare du Nord. Au retour, la France, étrangement, nous semblait sale et étriquée.

C’est que nos étés rhénans aussi avaient un goût d’immense. Le jardin de mes grands-parents allemands, empli de groseilles, rivalisait d’attrait avec les longues promenades au bord du Rhin. Souvent, j’entendais Camillo chanter Sag warum….

À notre retour, les pommes étaient tombées et les mûres envahissaient le sentier. Il fallait faire tomber le sable des valises, ranger les tongues et remettre des socquettes. Le cartable attendait, et nos maîtresses aussi.

Mes étés adolescents s’étirèrent, eux aussi, entre ennui et espérances. Toujours, je me sentais en marge. Je me souviens de cette soirée de quatorze juillet où j’entendais, au loin, quelque fête. Trop pleutre pour désobéir au couvre-feu familial, je m’y rêvais un jour. Sans oser franchir la porte. Un peu comme dans ce superbe film avec Odile Versois, Dernières Vacances…Là aussi, des adolescents vivent dans le no man’s land de cette vie suspendue, et leur été s’étire, entre interdits et fanfaronnades.

Mais les grandes vacances, c’est aussi cela: oser s’ennuyer, savoir attendre, aimer espérer. Je suis devenue prof. Oh, pas par vocation, non, loin de là. Mais souvent je me dis que ces grandes vacances sont réellement, avec, bien entendu, nos satisfactions pédagogiques, ce qu’il y a de mieux dans le métier.

Car même si je ne suis plus partie en vacances depuis bien longtemps-mais c’est une autre histoire-, je retrouve ainsi, chaque année, cet interminable temps suspendu qui fait de moi un être libre.

Ces grandes vacances demeurent en effet l’espace des possibles. On s’y sent démiurge, créateur de mondes, inventeur. Bien sûr, souvent, on se contentera d’aller voir des amis ou de camper en Ardèche. Mais pour nous, les profs, qui avons souvent une autre vie parallèle de chercheurs ou d’écrivains du dimanche, ces deux mois sont une respiration. Enfin, notre schizophrénie trouve un peu de place pour libérer le poète ou le musicien qui s’étiole au fil de l’année scolaire.

Et puis autrefois, dans ces temps d’avant-crise, les enseignants, c’est vrai, en profitaient, de ces longs congés… À eux les fjords de Norvège ou les langoustes de Cuba, quand le Français lambda allait simplement passer une semaine à Saint-Malo.

Aujourd’hui, le prof ne part presque plus. Il tente de survivre, tout simplement, comme tout le monde, il a droit aux chèques vacances, il tente une inscription dans un camping mutualiste, ou encore il accompagne des enfants en camps ou en colos. Mais il sait aussi que, la plupart du temps, ces grandes vacances lui appartiennent, comme lorsqu’il était enfant.

Lui aussi, le dernier jour de classe, il jette au feu ses livres et ses cahiers mais pas son ordi portable, faut pas pousser mémé dans les orties, non plus! Lui aussi, il rêve, assis au bord de la rivière, ou marchant le long des grèves, à ce qu’il n’a pas encore accompli…Le demandera-t-il, ce poste à l’étranger, qui lui permettrait enfin de voyager un peu? Le tentera-t-il, ce concours de chef d’établissement, qui lui permettrait de mettre un peu d’argent de côté? Souvent, il prépare l’agreg, et les livres du programme sont de la partie, entre anisette et marché de Provence.

L’été est fini au quinze août, et c’est à cette période-là que commencent ses cauchemars de rentrée. Il rêve aux élèves, il rêve qu’il a perdu ses clefs, son code de photocopie, ses sujets de bac.

Comme les enfants, il va flâner dans les librairies et se choisir un nouvel agenda.

Dans lequel il se dépêche de marquer au surligneur…les dates des vacances!

Et puis la veille de la rentrée, fébrile, il prépare son cartable, et songe avec nostalgie à ces deux mois interminables qui, pourtant, ont filé comme l’éclair.

Monsieur le Ministre, nous avons tant de choses à vous demander. En vrac, des augmentations, de vrais bureaux, des postes fixes, des classes moins chargées, des remplaçants compétents, des livres, des ordinateurs, de l’argent pour des voyages, des locaux corrects et sécurisés, des assistants d’éducations, des AVSI, des assistants de langues, des labos de langues, des CDI bien achalandés…Alors on va faire un deal: commencez par accéder à toutes nos requêtes, et ensuite, nous reparlerons éventuellement de cette histoire de grandes vacances.

Mais moi je dis: touche pas à mon été! Sinon, je gage que nombre de collègues en profiteront pour faire l’école buissonnière et prendre la poudre d’escampette vers des métiers qui seraient plus valorisants…Sinon, je gage que les attraits de la profession, déjà si vilipendée, perdraient encore de leur valeur. Nos grandes vacances, c’est un peu la Grande Illusion mâtinée de Grande Vadrouille, c’est un peu nos Grandes espérances et nos Grandes Orgues: nos grandes vacances font la grandeur de notre métier.

L’été est fini au quinze août
Bribes de sagesse estivale
Sable suitant de valises fânées
Biscuits écrasés dans sac tout usé
L’été est fini au quinze août
Les feuilles bariolées tombent des marroniers
Les hirondelles ont déjà le feu aux plumes
Et les champignons se bousculent au portillon des sous-bois
Piétinnés par randonneurs de panurge
La mer soudain respire à pleins poumons
Les plages souillées vont se refaire une santé
Châteaux de sable défenestrés et parasols rouillés
Cimetières de cris d’enfants de glaces fondues et de chairs exposées
L’été est fini au quinze août
On remballe
On plie
Plus rien à voir messieurs dames
Et surtout épargnez nous le vague à l’âme
C’est pas grave s’il n’a pas fait beau
Têve de flots bleus
Et de tentes ensardinnées
La pétanque sonne creux
Le pastis est noyé
Les mouettes toutes folles se pavanent en reines
Les feux d’artifice ont les pétards mouillés
L’été est fini au quinze août
Mais voilà les retardataires
Les traîne les pieds les réfractaires
Ceux qui vont goûter aux restes
Aux plages immenses et silencieuses
Aux sentes douces et lumineuses
Premières pluies odeurs de pommes
Vins renouveau
Poires éclatées
Prairies humides parfums d’automne
Vagues nouvelles coeurs désablés
Il reste toujours une petite place
Pour ceux qui n’aiment pas palaces
Et qui soudain prennent la route
L’anti chemin des écoliers
A eux les silences et les aubes
Lorsque la montagne s’est refait une beauté
Quand l’océan en majesté s’offre en écrin d’éclat saphir
Et qu’au loin crient les oies sauvages
Si tu m’entends sur ce passage
N’oublie pas de me laisser message
Je ne suis pas encore partie
Mon sac est prêt ma peau laiteuse
Aimerait près de toi se mordorer
Aux tendres lueurs d’un couchant apaisé.

Je ne ferai pas les soldes…

Je ne ferai pas les soldes…

 Photo1912

La nausée, hier, en arrivant au centre-ville pour y retrouver fiston.
Pas une personne sans son petit sac cartonné à la main, et ces grappes humaines sans âme se pressant dans chaque boutique, chaque ruelle…Nul ne semble y échapper, on découvre toute une humanité bigarrée, qui d’ordinaire ne se croise jamais, ou si rarement : les grandes bourgeoises des beaux quartiers, leur emplettes griffées au bras, les jeunes des cités, traficotant déjà leur nouvel I Phone, de vieilles mamies qui, aujourd’hui, préfèrent, au cœur du Capitole, les Nouvelles Galeries à la castagne…

La nausée, sans trop savoir si je ressentais les premiers signes d’une agoraphobie, un sursaut identitaire altermondialiste et alternatif, ou simplement, et ce serait plus grave, une jalousie, une envie…

Et me souvenir de ce petit texte, somme toute indémodable, lui…

***

Résister.

Ne pas sortir.

Ne pas regarder, faire le singe aveugle.

Ouvrir nos placards.

On l’a déjà, le petit top noir brillant.

Ouvrir les armoires.

Ressortir les draps en lin blanc brodés, avec les initiales de nos arrières grands-parents, de mamie Marie-Louise.

Ils sont tout aussi jolis que la paire de draps tout juste sortie d’un atelier de Pékin qui nous tend ses beautés factices en mille rayons bigarrés.

Redécouvrir la simplicité du bois, des lignes d’épure. Admirer chaque objet de notre home, sweet home. S’arrêter un instant devant le vase chinois, la tapisserie de la licorne, le buddha. Les toucher, les yeux fermés.

Allumer la radio. Écouter la musique, beaucoup, souvent. Une heure de Virgin radio valent quatre séances de thérapie. On a 18 ans, on danse, on est heureux.

Demander à nos enfants comment ça marche, le téléchargement illégal-c’est quand même plus excitant, on ne va pas tout s’interdire non plus !!!

Sélectionner nos envies non plus selon les pochettes-nous qui regrettons encore les grands pochettes des vinyles (mais souvenez-vous comme c’était lourd, quand on déménageait !!!), mais en fonction des titres disponibles sur Deezer.

Aller à la bibliothèque.

D’accord, ce n’est pas là que nous rencontrerons l’homme-la femme de notre vie-moyenne d’âge, en deux tranches, 4/8 ans et 75/98 ans, selon les départements… (Quoique chez moi, la bibli ait eu la chouette idée des Book-Dating , mais je n’ai pas encore osé tester, au vu de la moyenne d’âge du café philo…)

Renoncer à flâner des heures dans les librairies. Ça, c’est sans doute le plus difficile. L’odeur du livre neuf, ce petit coup de cœur à la Delerm pour l’encre fraîche, ce plissé que nous déflorerions, les illustrations qui rivalisent de beauté ou d’audace…

Il faudra préférer le toucher usé et quelque peu collant des livres de prêt, cette couverture aussi impersonnelle que des verres de cantine, et cette idée que nous ne foulons pas une terra incognita.

Regarder dans notre bibliothèque. Se rendre compte qu’au fil des scolarités de nos enfants nous avons au moins quatre exemplaires de Phèdre et du Grand Meaulnes ! Les ouvrir. Ressentir cette pointe d’émotion lorsqu’Yvonne de Galais apparaît à Augustin, ou Hippolyte à Phèdre:

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue :

Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue.

Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler :

Je sentis tout mon corps et transir et brûler.

S’asseoir dans le salon, si possible à même le sol. S’y sentir aussi bien que dans les rayons surchauffés de la Fnac. Prendre un petit quart d’heure et se persuader que, oui, tout a déjà été dit, écrit, pensé sur l’âme humaine, mais avoir néanmoins envie de continuer à jouer les défricheurs de terres et de mots.

Ouvrir le frigo. Se demander si il est vraiment nécessaire de ressortir pour aller dans une grande surface ou au discount. En imaginant d’heureux mariages gustatifs, il y a bien encore une semaine d’avance…Expliquer aux enfants comment mettre une barre de chocolat noir dans un quart de baguette, l’envelopper d’alu et le glisser dans le cartable, leur dire que ce sera aussi bon qu’une barre chocolatée.

Faire une citronnade. Chaude, brûlante, avec du miel, ou la servir frappée, avec des glaçons, et en humer chaque gorgée divinement acidulée.

Sortir, malgré tout. Se glisser dans une rue traversière. Atteindre la rivière, sans voir tous ces visages excités par les achats. Regarder le ciel. Y observer chaque nuage. Se pencher contre le tronc de ce saule noueux et le toucher, se faire pont entre l’eau, la terre et le ciel. Se mettre à courir. Peut-être va-t-il se mettre à pleuvoir, ce n’en sera que plus doux. Mais le soleil sera le bienvenu.

Vivre, tout simplement.

***

PS: si vraiment vous aviez la fière acheteuse, souvenez-vous de ma page Amazon:)
http://www.amazon.fr/Sabine-Aussenac/e/B00K0ILDZS/ref=ntt_athr_dp_pel_1

PS: http://www.franceinfo.fr/emission/noeud-emission-temporaire-pour-le-nid-source-713871/2012-2013/classes-moyennes-surendettees-pour-nous-c-est-ingerable