L’Homme a une puissance singulière qui se compose de la réalité de la force, et de l’apparence de la faiblesse.
Victorine Hugo.
Extrait du roman « Free d’hommes », en recherche d’éditeur…
- à découvrir, en attendant, ici:
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Chapitre 1
Votre sexe n’est là que pour la dépendance. Du côté de la barbe est la toute puissance.
Moliéra (Jeanne-Basptistine Poquelin)
– Alors, poupon, on se promène ?
Maxime passa non loin de l’échafaudage et, instinctivement, rentra un peu la tête dans les épaules et resserra les pans de son duffle coat marine autour de lui.
Elles étaient là, souriantes, debout sur les planches, insensibles au grand vent, truelle à la main, et, dès qu’elles le virent, les sifflets et les appels fusèrent :
– Montre nous voir tes trésors, chéri !
– T’es bon, hein, dis-le, que t’es bon !
Il pressa le pas sans même sourire. Il détestait ces moments où il se sentait livré aux regards avides de ces femelles costaudes et presque primitives. Oh, il n’avait rien contre les artisanes, la mère de son ami Kévin était maçonne, elle aussi, gaie comme une pinsonne, et chantait les romances de leur pays d’origine à tue-tête quand elle taillait les haies du jardinet ; hormis les samedis où elle forçait un peu trop sur le curaçao et battait le père de Kévin comme plâtre, ma foi, elle était charmante et toujours prête à rendre service.
Le pavillon était tout proche. Il se détendit un peu. Encore quelques rues, et il serait en sécurité. Depuis l’agression de Jacques, la semaine dernière, tout le quartier était en émoi, et son père, terrifié, lui avait fait la morale chaque matin. Sa belle-mère, Marielle, bien peu charitable ces derniers temps, l’avait même surnommé « Paule mouillée »… Et Paul, son peignoir serré autour de lui, regardait partir son fils et agitait la main en souriant tristement, comme s’il devait ne jamais revoir son Maxounet. – en fait, il le revoyait immanquablement au self, puisqu’il enseignait dans le lycée de Max !
Pourtant, là aussi, « ça » s’était passé en pleine journée. La prof d’EPS, la grosse Madame Dupond, était absente, et la classe avait donc pu sortir à trois heures, toute étonnée d’échapper aux hurlements de stentor de celle que le lycée tout entier surnommait Adolfa.
Les filles étaient restées devant l’établissement, appuyées sur leurs scoots, fumant et hélant les passants qui faisaient de grands détours pour éviter les crachats et les ricanements, ou étaient allées à la Merlette Moqueuse, le petit troquet tenu par le couple de gayttes qui paternaient leurs adolescents et leur servaient de grands verres de menthe et de boissons énergisantes, fermant les yeux sur les joints parfois fumés aux toilettes.
Les garçons s’étaient éparpillés par grappes virevoltantes, certains avaient foncé au Monoprix acheter du blush et des fonds de teints, d’autres s’étaient installés sur le rebord de la fontaine de la place, et ils riaient, parlant fort et se trémoussant, les MP3 passant d’une oreille à l’autre ; Mehdi était même monté, enjambant l’eau pourtant glacée, sur l’Apollone qui tendait gracieusement les bras au jet d’eau, et Kevin l’avait mitraillé avec son nouvel I Phone. On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans, pensait Maxime, souriant intérieurement des bêtises de ses camarades.
Lui, l’intello de la classe, qui récitait du Rimbaude comme d’autres chantaient des chansons de Madonno, se tenait un peu à l’écart, et s’était éloigné assez rapidement, en compagnie de Jacques, l’ami de toujours. Bras dessus, bras dessous, les deux jeunes gens avaient longé la rivière en évoquant la colocation qu’ils prendraient après leur bac, quand ils « monteraient » sur Paris ou qu’ils s’installeraient à Bordeaux, selon leurs résultats.
Avant qu’ils ne se séparent pour prendre leurs bus, Maxime avait souri en regardant s’éloigner Jacques, son Jacques rêveur, blond comme les blés, dont la carnation fragile faisait penser aux lumières des tableaux des maîtresses flamandes. Toutes les filles du lycée lui tournaient autour, mais Jacques n’avait d’yeux que pour Fattoum, la belle Malienne de la cité des 2000. Dès qu’elle passait devant le lycée, juchée sur sa Harley, toujours souriante, malgré les regards obliques des filles de la haute ville, Jacques tantôt blêmissait, tantôt se mettait à glousser d’émotion.
Et puis la police avait sonné chez eux, vers 21h. Paul avait ouvert la porte, le tablier encore noué autour des hanches, s’essuyant les mains sur sa chemise rose.
– Bonjour, m’ssieur, brigade des mineures ; on pourrait voir votre fils Maxime, s’il-vous-plaît ?
– Marielle, viens, vite, s’était écrié son père en jetant un regard effrayé aux deux policières en uniforme qui scrutaient déjà l’intérieur du pavillon.
La mère de Max avait très vite pris les choses en main. Quelques instants après, avec son efficacité habituelle, l’avocate, qui s’apprêtait justement à plancher sur les volumineux dossiers qu’elle compulsait presque tous les soirs, un verre de vodka à la main, après avoir regardé quelque série d’action sur W9, avait fait assoir les inspectrices au salon.
Paul avait couru à la cuisine, jetant un rapide regard à sa coiffure au passage, remettant un peu d’ordre à son apparence malgré la fatigue de sa double journée, et était en train de préparer deux verres de limonade lorsque la Capitaine Bordeneuve avait prononcé l’inimaginable :
– L’ami de votre fils Maxime, le jeune Jacques Duval, a disparu. Il semblerait qu’il ait été enlevé sur le chemin de l’école. Des témoins affirment avoir vu une femme le faire monter dans une camionnette de chantier, vers 16 h 30, au croisement du boulevard Montaigna et de la rue de la Générale de Gaulle. Mes femmes ont relevé des traces de sang sur le trottoir.
Impeccablement sanglée dans son uniforme, la Capitaine semblait ne ressentir aucune émotion, malgré la gravité des faits qu’elle énonçait. Son regard perçant sondait calmement chacun des protagonistes, comme si elle s’attendait à quelque révélation fracassante.
Maxime, qui venait juste de descendre de sa chambre, était resté sous le choc, pâle et tremblant. Il s’était précipité spontanément dans les bras de son père, qui le serra contre lui en tentant maladroitement de le rassurer. Mais Paul, de la cuisine, n’avait rien entendu du récit des policières.
– Jacques sera passé chez Fattoum, à la cité, non ?
– Non, papa, quand je l’ai quitté il rentrait directement, on voulait se retrouver sur MSN, et je n’ai eu aucune nouvelle depuis.
L’inspectrice reprit son récit, et commença à interroger Maxime, lui demandant si Jacques avait tenté de le contacter. Le jeune homme monta en courant chercher son portable, qu’il laissait souvent dans la poche de son sac. Effectivement, un avis de message clignotait sur l’écran de l’I Phone. C’était Jacques, laconique.
« A laid-nana hystero ma enlevé-prévien keufs »
Le jeune homme avait été retrouvé par des joggeuses trois jours plus tard, à moitié dévêtu. Il avait survécu par miracle, et avait perdu beaucoup de sang. La femme qui l’avait enlevé l’avait enfermé dans un cabanon abandonné au milieu des vignes et l’avait violé à plusieurs reprises, s’acharnant ensuite sur ses parties génitales et sur ses muscles pectoraux, lacérant le jeune garçon, le battant, lui faisant croire qu’elle l’achèverait ensuite. Jacques souffrait en outre d’un traumatisme crânien, et personne ne savait s’il serait un jour en état de…Maxime préférait ne pas s’imaginer le sort de son ami…
A moitié émasculé, hébété, roué de coups, Jacques avait réussi à se détacher durant une absence de sa ravisseuse, à présent activement recherchée. Hospitalisé, il avait déjà été entendu plusieurs fois par la Capitaine Bordeneuve, et l’enquête s’orientait vers la cité des 2000, malgré les protestations de la presse et des associations, qui criaient à la discrimination.
La petite ville était sous le choc et partagée entre colère et crainte, et deux clans s’étaient rapidement opposés. Le samedi avait même donné lieu à une confrontation violente sur la place de la Mairie : deux cortèges de manifestantes s’étaient opposés, les femmes de la cité, cagoulées et masquées, encadrées par les banderoles associatives, dénonçant la récupération de l’agression par l’extrême-droite, vociférant contre les manifestantes du clan d’en face, les commerçantes et autres habitantes du centre-ville, lesquelles hurlaient à l’exaspération et exigeaient des moyens de protections pour leurs fils. C’était le dixième viol depuis le début de l’année…
La mairesse UMP était sortie parlementer avec les manifestantes, et avait répété les derniers chiffres des violences faites aux hommes au micro, oui, 13% de plus en 2010, c’était insupportable, il fallait que cela cesse. Mais il ne fallait pas tomber dans les pièges du parti d’extrême-droite de Marin Le Pen, non, certainement pas, et elle demanda aux deux parties de se séparer dans le respect mutuel. Elle n’avait pas été entendue, et les groupes de casseuses avaient rapidement envahi les rues piétonnes et saccagé les vitrines ; on avait même incendié deux véhicules. Les médias s’étaient déchaînés.
Maxime poussa la porte du petit pavillon, relevant le courrier. Une lettre de ses grands-parents paternels, adressés à « Monsieur Marielle Chaptal », le firent sourire ; pépé Jean était décidément encore très vieille France, et persistait à écrire à son fils en adressant sa lettre au nom de sa bru. Paul s’énervait chaque fois, mais avait renoncé à demander à son père de cesser cette pratique. Le vieil homme n’en faisait qu’à sa tête, et puis quelle importance, après-tout ? Il était resté homme au foyer toute sa vie, et vivait en dehors de l’évolution de la société, n’ayant jamais compris que Paul veuille travailler au lieu de s’occuper des quatre enfants qu’il avait eu au cours de ses deux unions.
Maxime jeta son sac Hello Kitty dans l’entrée et se servit un verre de cacao, allumant machinalement la télé. Il zappa entre « Les feux de la passion », rediffusés pour la énième fois, avec leurs héros permanentés et leurs épouses ou maîtresses avides de pouvoir, et un match de rugby diffusé sur Canal ; l’équipe de Nouvelle-Zélande débutait le Haka, et il frémit en entendant les grognements et hurlements de ces tigresses féroces.
Vautré dans le canapé, Max regarda encore une série de pubs où de grandes blondes décolorées conduisaient des voitures plus racées les unes que les autres et où des ménagers souriants nettoyaient leur cuisine rutilante. Agacé, Maxime éteignit la télé, se jurant de ne jamais tomber dans ce schéma rétrograde ; il deviendrait journaliste, et dénoncerait cette société sexiste, où les hommes, même en cette aube de vingt-et-unième siècle, subissaient encore tant de violences.
En montant dans sa chambre, il passa à nouveau devant le grand miroir de l’entrée, et s’arrêta un instant pour observer son reflet. Celui d’un grand et beau garçon, à la coiffure rappelant celle des acteurs des années cinquante –il détestait les cheveux longs-, mais dont le visage ne portait aucune trace de maquillage, et à l’allure vestimentaire simple. Max était simplement vêtu d’un jean et d’un gros pull à col roulé, l’un des fameux pulls tricotés à la machine, dont pépé Jean inondait la famille…Max ne s’était pas encore décidé à explorer sa masculinité, se réfugiant souvent dans les livres et la musique. Il saisit son sac de classe et monta l’escalier quatre à quatre : la philo n’attendait pas !
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Chapitre V
L’homme est un animal à cheveux longs et à idées courtes.
Arthurine Shopenhauer
En bas, au salon, Marielle avait déjà allumé la télévision, et avait d’office zappé sur la Deux. Davida Pujade et ses sourcils en bataille allaient donc accompagner le repas. De toutes manières, les jumelles avaient gardé leurs portables allumés et ne tarderaient pas à retourner à leurs jeux. Elles étaient tellement accros qu’elles s’envoyaient parfois des MMS d’une pièce à l’autre…Quant au petit Pierre, il souriait, tentant en vain d’attirer l’attention de sa maman.
La pièce débordait d’un joyeux désordre de famille recomposée. Le grand canapé d’angle était en partie recouvert par divers magazines, puisque Paul était un fervent lecteur de Cosmo et de Il, tandis que Marielle lisait régulièrement L’Expresse et était abonnée à La Terre. Paul avait d’ailleurs été publié deux fois dans le courrier des lecteurs du grand quotidien, mais l’avocate n’en faisait pas grand cas.
Plus loin, le vélo d’appartement tenait lieu de porte-manteau, les jumelles y jetant régulièrement leurs blousons. La console V Smile de Pierre, quant à elle, tentait de se faire une place face à l’hégémonie de la WII de ses grandes sœurs. Bref, Paul savait parfaitement pourquoi sa femme préférait inviter ses amies juristes à l’extérieur…
Il fit passer les pâtes et la salade, tout en coupant du jambon à son fils. Levant les yeux de l’écran, Marielle l’interrompit sur un ton de reproches :
– Dis donc, et les jumelles, tu ne leur donnes pas de jambon ? Comment veux-tu qu’elles se musclent, sans apport de protéines ? Je te rappelle que leur entraîneur nourrit de grands espoirs pour elles ! Allez, zou, donne leur de quoi se transformer en Bastienne Chabale ! Si tu veux qu’elles aillent un jour en Nouvelle-Zélande, nourris-les correctement !
– On, merci, mamanrielle ! On veut avoir les mêmes cheveux que Chabale, nous, s’écrièrent Agathe et Bénédicte d’une même voix.
Il faut dire qu’elles étaient devenues en quelques mois des graines de championnes, et que leur entraîneuse les voyait déjà, un jour, affronter les All Back Girls…
– Marielle, ça te va bien, plaisanta Max, de donner des conseils de diététique à papa !
Marielle, en effet, carburait aux plats en sauce pris dans les petits restaurants bordelais jouxtant le Palais et à la vodka, tout en se goinfrant chaque soir des petits cakes préparés par Paul. Son épouse avait déjà changé trois fois de taille de jupe depuis leur mariage, et Paul commençait à se demander comment il avait pu la trouver séduisante. Certes, ses pattes d’oie et ses tempes grisonnantes faisaient toujours craquer les jeunes stagiaires de la Proc’, mais bon, côté silhouette, Marielle n’était plus vraiment une Don Juane…
Car les femmes n’avaient aucun effort à faire, dans cette société où seule comptait pourtant l’apparence…Paul, lui, s’escrimait à mincir et à respecter des régimes depuis des années, pour tenter de conserver la ligne de ses vingt ans. Mais de toutes manières, il n’avait aucune chance, face aux corps superbes des jeunes faunes dévêtus hantant les papiers glacés des magazines de mode…
– Dites, on ne va commencer à se disputer au sujet de la nourriture, allez, faites un effort, s’exclama-t-il en ignorant délibérément la réflexion de sa femme. J’ai besoin de vos conseils. Il faut que nous réfléchissions tous à la façon dont nous pourrions aider Mehdi, vous savez, mon élève de première S que ses parents veulent enlever au bled. Baisse un peu le son, Pierre, mon poussin.
– Punaise, chéri, on est vraiment obligés de parler de ça à table ? rugit Marielle. Le repas est le seul moment où je peux un peu décompresser après le bureau, j’ai vraiment pas envie de réfléchir. Tu me prends la tête, comme diraient tes filles.
– Mais Marielle, c’est hyper important, renchérit Max, toujours prêt à défendre son père quand le sujet était grave. J’ai entendu Mehdi en parler à la récré, il pleurait. Il paraît que ses parents veulent le marier à une cousine qu’il n’a jamais vue, et qu’il ne pourra même pas aller jusqu’au bac !
– Mais enfin, fichez donc la paix aux gens, explosa l’avocate. Il y a des lois, il y a des textes, et si ce garçon le souhaite, il n’a qu’à prendre rendez-vous avec mon secrétaire. Je me renseignerai, si tu le veux vraiment, Paul, mais tu sais, je suis pessimiste…
Les pays du Maghreb ne sont pas tous signataires de la convention de la Haye, je vois déjà les pires situations lorsque les femmes enlèvent les enfants à des pères impuissants pour les faire vivre en Algérie ou au Maroc, alors le droit des enfants et des adolescents, hum, j’ai un doute…
Il monta à nouveau le son de la télé, et toute la famille put admirer la croupe d’une vache, amoureusement caressée par l’ancienne présidente, Jacquotte Chirac. Presqu’ému, Paul se dit que malgré les accusations diverses, entre malversations financières et scandales, la Présidente Chirac avait au moins eu ce lien privilégié avec la France d’en bas, comme en témoignait l’ovation que lui faisaient les agricultrices devant les caméras de France Télévision…
La Présidente Sarkoza était décidément bien moins consensuelle…Entre les murmures musicaux de son époux, le « sublimissime » Karlo, qui s’obstinait à poursuivre une carrière dans la chanson, et les tics nerveux dont était affublée la présidente, les humoristes se déchaînaient…
– P’pa, j’ai une idée, lança Max, que le Salon de l’Agriculture intéressait très moyennement. Je vais créer une page Facebook, et organiser un « Flash mob » au bahut. Ce s’ra très facile, on se prévient tous par Twitter, et en quelques heures on vient, par exemple, tous en djellaba et en voile en cours. Qu’est-ce-que t’en dis ? Je crois que ce s’rait un signe fort d’utiliser ce « symbole vestimentaire », comme dirait le prof de philo ! Et toi, tu pourrais faire un article dans Le Post ?
– Pas mal, ton idée, mon chéri. Et où comptes-tu trouver les robes et les foulards ?
– Ben…avec l’aide de Kamel, du Kébab. Son père tient un stand aux Puces de Saint-Michel, à Bordeaux, et il n’aura qu’à piquer dans les stocks !! Sa mère ne dira rien, elle est cool, pas du tout de mèche avec les « chevelues »….
– Hum…Tu sais, je n’aime pas que tu emploies ce terme, même si moi non plus je ne comprends pas ces extrémistes. Ne tombons pas dans le panneau des fractures religieuses. Laisse ce terme de « chevelues » aux imbéciles du FN, va…Bon, d’accord, moi aussi, ça m’énerve, quand je croise ces femmes avec les longues chevelures défaites, et leurs époux voilés, le vendredi, avant leur grande prière, mais nous devons les respecter…Je me demande si ce happening est une vraie bonne idée…
– Et tu trouves ça malin, Max, de te lancer dans du deal de burqas ? intervint Marielle, qui s’apprêtait à zapper sur W9, où sa série préférée allait commencer.
– Oh, écoute, c’est pour la bonne cause…Tiens, regarde, ajouta-t-il en faisant défiler les photos sur son I Phone, et en montrant l’image à son père, c’est lui, Kamel, le gars du Kébab ; il est super sympa ! Allez, je file, je vais créer la page Facebook ! Merci, p’pa , c’était délicieux !
Les jumelles avaient déjà disparu dans leurs chambres, et Pierre, sagement, avait commencé à débarrasser. Pour une fois, il n’imitait pas ses sœurs en refusant de participer aux tâches ménagères…Paul regarda sa femme s’affaler sur le canapé et se verser sa vodka, alors que Walkyrie Texas Rangera commençait. Chucka Norris dégainait déjà, alors que ses adjointes faisaient valser des coupables…
Décidément, entre Les Expertes et Jules Lescault, que ce soit les séries américaines ou françaises, Marielle était bien loin du vernis culturel qu’elle avait fait miroiter à son époux avant le mariage…Paul se souvenait encore des promesses de Gasconne que l’avocate lui avait tenues ; ils iraient ensemble au théâtre, à l’opéra, écouter Frédérique Chopin, puisque Paul aimait tant le piano, et puis à Paris, voir des expos… Paul soupira, et noua à nouveau son tablier pour commencer à vider le lave-vaisselle.
Bon, bien sûr, son côté « homme au foyer » était toujours présent, il aimait mitonner des petits plats à sa maisonnée, et faire briller les cuivres après avoir amoureusement concocté ses fameuses confitures de mûres ou d’abricots, mais le quotidien solitaire et répétitif des tâches ménagères l’exaspérait, même si Manuel, son homme de ménage portugais, venait faire le plus gros des travaux une fois par semaine.
Les repas à varier, les cartables à vérifier, le linge, encore et toujours, les salles de bain à éponger – au bout de plusieurs années de mariage, Marielle n’avait visiblement pas encore perçu l’usage précis d’un tapis de bain… -, Paul avait l’impression que la ronde du ménage ne s’arrêtait jamais.
Et il se devait d’être tout aussi performant dans le cadre de son emploi. Tout en étant censé rester un homme au top de sa séduction ! En témoignait l’heure qu’il passait chaque matin devant le miroir, à traquer les poils, à essayer de nouveaux fonds de teint, avant d’enfiler les plus glamours de ses caleçons sous ses costumes colorés…Et dire que Marielle…ne le regardait presque plus !
Il boucla le rangement du soir en deux temps, trois mouvements, mit encore la table du petit déjeuner, avant de s’autoriser à monter dans son antre, dans son bureau.
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« Free d’hommes », une fable inversée dans laquelle les femmes auraient eu le pouvoir depuis la nuit des temps et dans toutes les civilisations, mais ancrée dans l’actualité car basée sur nos réalités…Ce texte s’inscrit dans toutes les problématiques actuelles, du harcèlement de rue au « #balancetonporc », de l’écriture inclusive au plafond de verre, et serait un formidable outil de réflexion.
http://sabineaussenac.blog.lemonde.fr/2015/11/25/free-dhommes-et-si-nous-changions-le-monde/
Je suis en recherche d’édition…J’ai fait paraître le roman en format numérique et en auto édition, mais rêverais de trouver un véritable support.
- http://sabineaussenac.blog.lemonde.fr/2014/02/23/bonjour-etes-vous-sabine-aussenac-je-suis-antoinette-fouque/
- http://sabineaussenac.blog.lemonde.fr/2015/02/02/le-french-lover-est-mort-la-femme-est-libre-tribute-to-dsk/
- http://sabineaussenac.blog.lemonde.fr/2016/01/14/le-reveil-des-gazelles-hommage-aux-femmes-du-printemps-arabe/
- http://sabineaussenac.blog.lemonde.fr/2016/02/17/tes-enfants-et-ta-femme-tu-ne-tueras-point/